Dans le corridor longeant leur vestiaire, les Penguins de Pittsburgh attendent le signal pour sauter sur la glace en vue de l'échauffement d'avant-match. Assis dans la «suite bunker» du Centre Vidéotron, un salon privé doté d'un mur vitré permettant d'observer les joueurs, Régis Labeaume ne cache pas sa satisfaction: «Pour les maniaques de hockey, c'est parfait!»

Le maire de Québec a raison d'être fier. Le nouvel amphithéâtre est une pure merveille. De l'extérieur, cette immense masse blanche se découpant sur le ciel de la capitale est franchement impressionnante. À l'intérieur où, sans surprise, le bleu prédomine, tout rappelle que nous sommes dans un édifice du XXIe siècle.

«Je suis bien fier de l'amphithéâtre, dit M. Labeaume. Mais je suis encore plus content de l'avoir fait à ce prix-là. Pour moi, comme gestionnaire, c'est ma plus grande satisfaction. J'avais mis ma tête sur le billot en disant qu'il ne coûterait pas plus que 400 millions. Au bout du compte, la facture est de 365 millions.»

Le groupe mis sur pied pour superviser les travaux a tenu la bride serrée. Aux commandes, on retrouvait Jean-Guy René, un ancien de la Société d'énergie de la Baie James. «On a été tough avec les entreprises, on les a mises en concurrence, ajoute le maire. Aujourd'hui, elles sont contentes d'avoir participé au projet.»

Le Centre Vidéotron est un atout pour tout l'est du Québec et renforce le pouvoir d'attraction de la capitale. «Maintenant qu'il est construit, des gens me demandent pourquoi on ne l'a pas fait plus tôt! lance le maire. Quelque chose a changé en ville. On a monté d'une coche. On n'avait pas l'amphithéâtre. Et pour nous, ça signifiait beaucoup, ne pas l'avoir. C'est maintenant réglé. Regarde ce que le retour des Jets a fait pour l'ambiance à Winnipeg. Nous, notre amphithéâtre a cet effet-là pour commencer. On verra pour le reste.»

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Le reste. Deux petits mots qui signifient beaucoup. Les espoirs de retour des Nordiques n'ont jamais été aussi élevés. Aujourd'hui, Brian Mulroney et Pierre Dion seront à New York afin de présenter aux gouverneurs de la LNH leur projet pour ramener les Bleus.

Président du conseil d'administration de Québecor, l'ancien premier ministre du Canada est un acteur majeur dans ce dossier. Durant son séjour au pouvoir, M. Mulroney a cultivé ses liens avec les dirigeants américains, notamment l'ancien président Ronald Reagan et son successeur George Bush père. Les dirigeants de la LNH lui vouent un grand respect. En septembre dernier, en visite au Québec, Gary Bettman avait tenu des propos très flatteurs à son endroit.

Quant à Pierre Dion, le président de Québecor, il s'est adressé aux propriétaires d'équipe en décembre dernier, lors d'une réunion en Floride. Le commissaire l'avait invité à expliquer comment le réseau TVA mettait en valeur la LNH en tant que diffuseur national. Lui aussi possède donc des contacts dans cet univers très fermé.

Hier matin, avant de s'envoler pour New York, M. Mulroney a appelé M. Labeaume pour évoquer de nouveau ce dossier. Les prochaines heures seront à coup sûr déterminantes.

Le maire est-il confiant? Ce n'est pas la bonne manière de présenter les choses puisque, comme tous ceux qui souhaitent le retour des Nordiques, il est à la merci d'une décision prise par d'autres. En revanche, il est heureux du travail accompli jusqu'à maintenant. Il estime que la Ville et Québecor ont posé les bons gestes aux bons moments.

«Rien n'est parfait, mais jusqu'à maintenant, on a livré à chaque étape, soutient le maire Labeaume. On avait dit qu'on construirait un nouvel amphithéâtre, on l'a fait. Il est beau et il a coûté moins cher que prévu. Personne ne peut dire que nous n'avons pas bien mené ça. Et nous avons le gestionnaire idéal, qui possède toutes les plateformes médiatiques. Nous sommes tous des maniaques de hockey. Personne ne regarde uniquement le dossier comme une business. C'est aussi une passion.»

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Dans les coulisses du Centre Vidéotron, l'ambiance était fébrile avant le match d'hier. Tout le milieu du hockey est conscient de l'importance du rendez-vous d'aujourd'hui, même si aucune décision ne sera prise.

La LNH demandera sûrement des compléments d'information aux groupes de Québec et de Las Vegas. Mais l'important sera le message de Gary Bettman, lors de son point de presse, à l'issue de la réunion. Le commissaire choisit toujours bien ses mots et ceux-ci seront scrutés à la loupe.

Comme bien d'autres, Michel Therrien espère que les nouvelles seront bonnes. L'entraîneur du Canadien a rappelé l'impact que l'éventuel retour des Nordiques aurait pour tous les francophones rêvant de faire carrière dans la Ligue nationale, comme entraîneurs ou gestionnaires. Avec deux équipes au Québec, les occasions seraient forcément plus nombreuses.

Therrien, qui a participé au tournoi international de hockey pee-wee avec l'équipe de Saint-Léonard et porté les couleurs des Remparts, a un lien particulier avec Québec. Il a même assisté à plusieurs matchs des Nordiques lorsqu'il était junior.

Hier, les gens de Québec ont appuyé l'équipe de Therrien. À la fin du match, P.K. Subban et compagnie ont même salué la foule, comme si le match avait lieu au Centre Bell. Et les joueurs ont retraité au vestiaire sous l'air de «Halte-là, les Canadiens sont là!».

Régis Labeaume était sûrement content que la rencontre soit disputée à guichets fermés. Il s'agit d'un autre bon signal envoyé à la LNH. Mais comme des centaines de milliers de Québécois, il a hâte que le Centre Vidéotron vibre au rythme des Nordiques et que le Canadien s'y sente un peu moins à la maison.