Avez-vous suivi l'abracadabrant feuilleton chez les Sharks de San Jose la semaine dernière? Incroyable comment un gestionnaire de haut niveau peut se mettre les pieds dans les plats!

L'affaire commence de manière innocente: une rencontre entre la direction de l'équipe et des détenteurs d'abonnements saisonniers. Le genre d'exercice qui ne devrait jamais conduire à une controverse, puisqu'il s'agit d'une simple opération de relations publiques.

Mais c'est sans compter sur Doug Wilson, le DG des Sharks. En voilà un qui aurait besoin d'une formation en relations interpersonnelles. Un patron doit gérer les crises, arrondir leurs côtés tranchants, et non pas les provoquer avec ses gros sabots.

Interrogé par un amateur sur la raison l'ayant poussé à retirer à Joe Thornton son titre de capitaine avant la saison, une vieille histoire sur laquelle il s'était déjà expliqué, Wilson décide d'en beurrer une nouvelle couche.

Après avoir souligné le «coeur immense» de Thornton, Wilson lance cette phrase assassine: «Lorsque le stress s'empare de lui, il s'en prend aux autres et ça les dérange. J'ai eu l'impression que la pression et le stress affectaient Joe.»

Imaginez: le DG d'une équipe avec des ambitions affirme que son attaquant numéro un, favori de la foule, gère mal le stress. Et que la pression le touche négativement. Hé, Doug, il aurait peut-être fallu y penser avant de lui consentir un contrat frôlant les 7 millions par saison et une clause de non-échange...

Avec colère, Thornton réplique: «Doug devrait se la fermer. Et arrêter de mentir.»

Bonsoir l'ambiance, comme dirait l'autre!

Un affrontement entre un DG et un joueur-vedette fait inévitablement mal à une équipe. Le pauvre entraîneur est le premier sur la ligne de front, partagé entre la loyauté à son DG et son désir de ne pas couper les ponts avec son protégé. Les autres joueurs prennent parti pour un camp ou l'autre. La concentration du groupe est touchée.

Sans surprise, les Sharks ont perdu le match suivant 6-2 devant leurs partisans.

Pour les journalistes, l'épisode représente une saprée bonne histoire! Mais pour les Sharks, il s'agit d'une catastrophe. En pleine course aux séries éliminatoires, Wilson a choisi le pire moment pour provoquer une tempête.

Décidément, cette organisation n'est toujours pas remise de son affaissement du printemps dernier. Rappelez-vous: en avance trois matchs à zéro sur les Kings de Los Angeles au premier tour éliminatoire, les Sharks ont finalement perdu la série.

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Soyons sûrs d'une chose: Marc Bergevin ne commettrait pas une gaffe semblable.

L'automne dernier, peu avant l'ouverture de la saison, j'ai demandé au DG du Canadien pourquoi il avait créé deux classes d'adjoints au sein de l'équipe: Andrei Markov et Tomas Plekanec portent le "A" en permanence, alors que Max Pacioretty et P.K. Subban le font en alternance.

N'aurait-il pas été plus équitable de créer une rotation à quatre joueurs, même si les deux vétérans auraient aussi été privés du "A" à l'occasion?

La réponse de Bergevin a été immédiate: «Andrei porte le "A" [à tous les matchs] depuis plusieurs saisons. Moi, je ne crois pas qu'on puisse enlever des choses. Tu n'enlèves pas un "C", tu n'enlèves pas un "A". Ce n'est pas ma philosophie, car c'est une chose très sensible».

En clair, Bergevin a reconnu le statut de Markov au sein de l'équipe. Parce qu'il connaît toute la symbolique attachée aux postes de capitaine et d'adjoint. Parce qu'il sait que jouer avec les lettres sur un chandail est une entreprise à haut risque, comme Doug Wilson vient de le comprendre.

Les Sharks disputent leurs sept prochains matchs à l'étranger. Leur DG n'a certes pas créé l'environnement idéal en vue de cette portion décisive de leur calendrier. Humilier publiquement Thornton est une gaffe majeure. Selon Sportsnet, le propriétaire de l'équipe a dû s'en mêler pour rapiécer les pots cassés. Parions que le commentaire spontané de son DG ne l'a pas réjoui.

Si les Sharks ratent les séries, les joueurs et l'entraîneur ne seront pas les seuls responsables. Le DG devra analyser son propre comportement. Encore heureux que Wilson travaille à San Jose. Dans un marché de hockey comme ceux de Montréal et de Toronto, l'affaire aurait pris des proportions encore plus grandes.

Ne touchez pas aux tirs de barrage!

Les DG de la LNH sont réunis à Boca Raton, en Floride, cette semaine. Les tirs de barrage constituent un dossier chaud.

Plusieurs organisations, les Red Wings de Detroit en tête, souhaitent diminuer le nombre de matchs décidés durant cette séance spectaculaire.

Ils aimeraient que la LNH adopte un modèle semblable à celui de la Ligue américaine (LAH). Cette saison, la prolongation dure sept minutes plutôt que cinq. Et au premier arrêt de jeu après les trois premières minutes, les équipes évoluent à trois contre trois plutôt qu'à quatre contre quatre.

L'initiative est concluante. En 2013-2014, 15,6% des matchs de la LAH ont été tranchés en tirs de barrage; cette saison, le taux a chuté à 5,6%. En clair, le jeu à trois contre trois fournit de nombreuses occasions de marquer. Et le recours aux tirs de barrage devient moins fréquent.

J'espère néanmoins que la LNH conservera le statu quo. Les tirs de barrage fournissent des moments spectaculaires. Suffit d'observer la tension dans un amphithéâtre lorsqu'un attaquant s'élance vers le gardien pour le comprendre.

Les tirs de barrage ne dénaturent pas davantage la manière habituelle de remporter un match qu'une séquence à trois contre trois. D'ailleurs, en temps réglementaire, les échappées sont plus fréquentes que le jeu à trois contre trois, un phénomène rare.

Les tirs de barrage ont deux autres qualités: ils ne causent pas de blessures et n'exigent pas un surcroît démesuré d'effort physique.

Au bout du compte, la LNH a des problèmes plus urgents à régler que la mécanique des prolongations, qui fonctionne très bien. Michel Therrien a raison d'affirmer que la protection des gardiens de but constitue un enjeu autrement plus important.

Source des données: NHL.com