Qui l'aurait pensé? En ce début de 2015, le baseball majeur semble plus ouvert au retour des Expos que la LNH à celui des Nordiques.

À Columbus samedi, la LNH a servi une rebuffade à la ville de Québec.

«Les gouverneurs de la ligue n'envisagent pas d'expansion pour le moment, mais si jamais ils devaient le faire, nous aurions à regarder du côté de l'Association de l'Ouest, a déclaré le commissaire adjoint Bill Daly. Il y a deux clubs de moins dans l'Ouest, c'est une inégalité.»

Le lendemain, The New York Times a publié une entrevue avec Rob Manfred, le nouveau commissaire du baseball. Interrogé sur l'éventuelle renaissance des Expos, il a montré une ouverture étonnante.

«Montréal s'est aidée comme candidate à une équipe du baseball majeur avec les deux matchs des Blue Jays l'an dernier. C'est dur d'ignorer le nombre de gens présents à ces rencontres pré-saison. C'était une forte démonstration. Montréal est une grande ville. Dans les bonnes circonstances et avec une installation adéquate, c'est possible.»

Trois raisons rendent cette déclaration significative.

D'abord, le fait que The New York Times demande à Manfred son opinion sur Montréal illustre le sérieux du dossier aux États-Unis.

Ensuite, les propos de Manfred s'inscrivent dans la continuité de ceux de son prédécesseur Bud Selig, qui a déclaré en juillet dernier que Montréal serait une «excellente candidate dans l'avenir». L'arrivée du nouveau commissaire n'altère donc pas cette position. Il donne même un tour de vis supplémentaire en qualifiant le projet de «possible».

Enfin, ce message encouragera des investisseurs potentiels intéressés au retour des Expos.

Les propos de Manfred, qui repousse dans la même entrevue toute idée d'expansion, ne promettent cependant pas de changements rapides.

Cela dit, le transfert d'une concession serait la perspective logique pour ramener les Expos à Montréal. Une seule équipe des majeures, les Rays de Tampa Bay, est dans une situation problématique, prisonnière d'un bail à long terme dans un stade dont elle ne veut plus.

En vantant Montréal, Manfred veut-il augmenter la pression sur les autorités floridiennes, peu enclines à appuyer la construction d'un nouveau stade pour les Rays? L'avenir nous le dira.

Chose sûre, les circuits professionnels aiment compter sur un Plan B. Et Montréal tient aujourd'hui ce rôle, un scénario inimaginable il y a trois ans à peine.

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Pendant ce temps, à Columbus, Gary Bettman a juré que toutes les concessions de la LNH étaient en «très bonne santé».

Ce n'est évidemment pas le cas. Les Panthers de la Floride attirent des foules modestes, et les cotes d'écoute de leurs matchs à la télé locale sont faméliques. Ils demandent des avantages financiers au comté de Broward, site de leur amphithéâtre, afin d'améliorer leur situation financière.

Mais Bettman tient mordicus à garder les Panthers en Floride. La LNH compte moins d'équipes aux États-Unis que les trois autres grands circuits professionnels (football, baseball et basketball). Une expansion permettrait d'augmenter leur nombre. À tort ou à raison, Bettman y voit une occasion de croissance.

À moins d'une surprise, Las Vegas obtiendra bientôt une concession. Le mois prochain, les citoyens de Sin City n'auront qu'à déposer de 150$ à 900$ pour démontrer leur intention d'acheter un abonnement saisonnier, à un prix évidemment supérieur.

Cet exercice ressemble à un écran de fumée. À titre comparatif, Gary Bettman a exigé la vente ferme de 13 000 abonnements, pour un minimum de 3 saisons, afin d'autoriser le transfert des Thrashers d'Atlanta à Winnipeg en 2011. Pour les fans des Jets, l'option la moins coûteuse était de 1755$ par année durant 3 ans!

Bien sûr, le dossier de Winnipeg était plus avancé. Mais à Vegas, la LNH met tout en place pour que l'objectif de 10 000 promesses d'abonnement soit facilement atteint. Des montants majorés auraient dû être exigés pour crédibiliser l'opération.

D'ailleurs, le baseball majeur exigerait sans doute un engagement ferme des Montréalais avant d'autoriser le retour des Expos. Les belles foules accueillant les Blue Jays au Stade olympique sont un signe prometteur. Mais soyons prudents avant de croire que les néo-Expos attireraient automatiquement 2,5 millions d'amateurs par saison.

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À l'heure actuelle, les chances du retour des Nordiques semblent liées aux ennuis des Panthers de la Floride.

En décembre dernier, Bettman a vanté le nouveau modèle d'affaires de cette organisation, qui ne solde plus ses billets. En revanche, il a implicitement reconnu que l'équipe ne pourra jouer éternellement devant tant de sièges vides.

Si la LNH envisage un transfert dans deux ou trois ans, Québec serait une destination de choix pour les Panthers, qui évoluent déjà dans la division du Canadien.

Mais le plus troublant pour Québec est l'absence d'enthousiasme de la LNH à son endroit. On souhaiterait que ses dirigeants se montrent aussi positifs envers la capitale nationale que Rob Manfred l'est à propos de Montréal.

Seule consolation: Gary Bettman n'était pas chaud à l'idée de redonner vie aux Jets de Winnipeg. Mais la décision s'est imposée d'elle-même en raison des ennuis des Thrashers. Si Québec retrouve ses Nordiques, ce sera dans un contexte semblable.

Compte tenu des ennuis des Panthers de la Floride, je crois toujours plus élevées les chances de revoir les Nordiques que les Expos. Le retour du baseball majeur à Montréal est un projet à long terme.

En revanche, le seul fait d'évaluer cette question est une surprise. Le dernier week-end aura été riche en rebondissements.