Rappelez-vous la saison 2011-2012 du Canadien: le renvoi inutile de Jacques Martin, la nomination malavisée de Randy Cunneyworth, l'échange bizarroïde de Michael Cammalleri au milieu d'un match à Boston, la pagaille dans l'équipe, la chute au classement, la dernière place dans l'Est... Des mois de misère, une organisation... désorganisée!

Mais rappelez-vous aussi le proverbe: «À quelque chose malheur est bon.» Et ce fut vrai dans ce cas.

Ce dérapage a permis au Canadien de choisir au troisième rang du repêchage. Marc Bergevin, fraîchement nommé DG du Canadien, a alors pris un risque. Il a sélectionné un joueur prometteur, mais qui avait raté la plus grande partie de sa saison junior en raison d'une grave blessure à un genou: Alex Galchenyuk.

S'il avait fallu que le jeune attaquant garde des séquelles de cette malchance, le Canadien en aurait payé le prix. Détenir un des cinq premiers choix du repêchage représente une occasion exceptionnelle de mettre la main sur un joueur d'impact. Il ne faut pas la rater.

S'il est encore trop tôt pour porter un jugement définitif sur Galchenyuk, avouons que sa progression est de bon augure. Mardi, contre les Hurricanes de la Caroline, son tour du chapeau a donné une autre mesure de son talent: des mains en or, des accélérations vives, une vision du jeu hors du commun... Et il possède le sens du spectacle, comme le démontre sa mine réjouie en célébrant ses buts.

«Dis-moi, Max, jusqu'à quel point Alex Galchenyuk peut-il devenir un joueur spécial dans cette ligue?»

Dans le vestiaire du Canadien, Max Pacioretty sourit. Le match est terminé depuis plusieurs minutes, mais un sourire demeure accroché à son visage. Avec trois aides et un effort de tous les instants, le gros ailier du Canadien a connu une excellente rencontre. Mais le succès de son jeune coéquipier explique aussi son bonheur.

«Ce que j'apprécie d'Alex, c'est qu'il veut apprendre à être solide dans les deux sens de la patinoire. Il veut être un marqueur, il veut être un fabricant de jeux, il veut être un patineur, il veut s'améliorer à tous les niveaux...

«Pour devenir le joueur que nous souhaitons tous qu'il devienne, il possède la bonne attitude. On est chanceux d'aligner un gars avec autant de potentiel, mais surtout qui pense de cette façon.»

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Les propos de Pacioretty nous ramènent à une grande loi du sport. Le talent est un atout exceptionnel. Mais sans le désir de l'exploiter au maximum, un joueur ne pourra jamais s'accomplir entièrement. L'histoire du hockey est pleine de gars doués mais qui n'ont jamais atteint leur plein potentiel. La détermination fait toujours la différence.

Si Pacioretty analyse correctement Galchenyuk, cela signifie que le numéro 27 du CH possède le goût de s'imposer et de s'établir comme vedette du circuit. Et le Canadien a un plan pour l'aider à atteindre ce but.

«J'ai eu une bonne discussion avec Alex plus tôt cette semaine, a dit Michel Therrien, mardi. Nous avons des objectifs très précis pour lui. Il possède un beau potentiel, mais qui reste à polir énormément.»

L'entraîneur du Canadien souhaite surtout voir Galchenyuk devenir plus constant. «On est à la recherche de constance. La maturité l'aidera à en acquérir. Un défi des jeunes joueurs est d'apprendre à performer match après match.»

En janvier 2013, lorsque le lock-out a pris fin dans la LNH, le Canadien a gardé Galchenuyk à Montréal, une excellente décision. Même si ses minutes de jeu étaient comptées, il a apprivoisé la vie d'un athlète professionnel. La saison dernière, il n'a pas été aussi flamboyant qu'on l'aurait espéré. Mais à sa troisième saison, il trouve manifestement ses marques. Son parcours rappelle à quel point il faut être patient avec les jeunes joueurs.

«Je vois Alex comme un joueur de 20 ans, mais aussi comme un gars de troisième année», a ajouté Therrien.

En clair, cela signifie que Therrien, malgré la jeunesse de Galchenyuk, l'estime prêt à franchir une nouvelle étape de sa carrière. Sa période de découverte de la Ligue nationale est terminée. Cela explique pourquoi il lui a confié le rôle de joueur de centre.

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Avec raison, Galchenyuk a obtenu la première étoile du match de mardi. Réussir un tour du chapeau est un exploit rare dans le hockey d'aujourd'hui. Cela vaut cette marque de reconnaissance. Mais il n'a pas été le meilleur joueur du CH.

Ce titre revient plutôt à Pacioretty. Ses trois aides sur les buts de Galchenyuk ont montré l'étendue de ses habiletés. Et Therrien l'a bien remarqué.

«Max a été le leader du trio, a dit l'entraîneur. J'ai beaucoup aimé sa persévérance à aller sur le porteur de la rondelle. Il a travaillé fort pour relayer la rondelle à Galchenuyk et a montré une belle vision offensive.»

Vous le savez déjà, Pacioretty se comporte de plus en plus en capitaine. J'ai été impressionné par la manière dont il a parlé de Galchenuyk après le match, s'exprimant avec naturel au nom du groupe: «... le joueur que nous souhaitons tous qu'il devienne...», a-t-il dit.

Pacioretty a ensuite ajouté s'être lui-même fixé des objectifs cette saison. Le plus important: être plus imprévisible sur la patinoire, seule façon «d'élargir» sa palette de jeu, a-t-il expliqué.

Sur la patinoire, Pacioretty a été dominant. Lorsqu'il joue de cette façon, et contre les meilleurs défenseurs adverses de surcroît, le Canadien se transforme en redoutable machine.

Si Galchenyuk et lui continuent d'améliorer leur symbiose sur la glace, l'attaque du Canadien n'aura pas aligné une paire si explosive depuis très longtemps.