Dans plusieurs équipes de la LNH, le capitaine n'est pas seulement un gars capable de regrouper ses coéquipiers dans le vestiaire. Il est aussi un joueur d'exception, en mesure de changer à lui seul le cours d'un match.

Jonathan Toews à Chicago, Zdeno Chara à Boston et Sidney Crosby à Pittsburgh, pour ne nommer qu'eux, sont trempés dans ce moule. Chacun à leur façon, ils influencent la dynamique d'une rencontre. Sur la patinoire, ces capitaines font partie de l'élite de la LNH.

Chez le Canadien, la situation est différente. Malgré son ardeur au travail et son influence positive au sein du groupe, le capitaine Brian Gionta n'est pas membre de ce club sélect.

En revanche, il est clair que le jeu de P.K. Subban au cours des prochains jours en dira long sur les chances du Canadien de franchir la première ronde. Cela explique pourquoi les journalistes se sont rués vers lui, lundi, après l'entraînement de l'équipe. Au fil de la saison, Subban est devenu le moteur autour duquel l'équipe s'articule.

«P.K. Subban est le meilleur défenseur de la Ligue nationale», dit Serge Savard, qui en connaît long sur le sujet. «Sur la glace, il n'a aucune faiblesse. Il patine extrêmement bien, ses lancers sont puissants et il est dur physiquement. Personne n'aime jouer contre lui.»

Savard ne fait pas de mystère: si tous les défenseurs de la LNH étaient disponibles dans un repêchage imaginaire, il choisirait Subban au premier rang sans hésitation. «L'autre jour, il a fait le spin-o-rama à pleine vitesse... Il faut du talent pour réussir ça!»

L'ancien DG du Canadien a émis ces commentaires dimanche matin, à l'émission de Guy Simard au 98,5. En compagnie de Pierre Rinfret, j'ai eu le plaisir de participer à la conversation.

Savard a été passionnant comme à l'habitude. Il a signalé le travail formidable de Marc Bergevin qui, à son avis, a eu le grand mérite de bien s'entourer. L'embauche de Jean-Jacques Daigneault comme entraîneur adjoint, responsable des défenseurs, lui a particulièrement plu. «C'est un gars que j'ai toujours aimé», a-t-il dit.

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Lorsque j'ai transmis à Subban l'opinion de Serge Savard à son propos, son visage s'est illuminé.

«Que ça vienne d'un gars comme lui, si respecté dans le hockey, signifie beaucoup pour moi. Je ne pense pas qu'il aurait répondu la même chose il y a un an. J'ai travaillé très fort pour me retrouver aujourd'hui dans une bonne position. Et je vois les séries éliminatoires comme une occasion d'atteindre un autre plateau.»

Subban a raison: Savard, comme la majorité des observateurs, n'aurait sans doute pas été aussi élogieux l'an dernier. Le fringant défenseur canalisait parfois mal sa formidable énergie. Et il lui arrivait de tomber sur les nerfs de ses coéquipiers.

Peut-on vraiment l'en blâmer? L'organisation du Canadien était désemparée. Après le renvoi de Jacques Martin, aucune figure d'autorité crédible n'a pu imposer de l'ordre. Pour un jeune joueur impulsif comme Subban, cette absence totale d'encadrement était le pire des scénarios.

L'arrivée de la nouvelle administration a eu une influence majeure sur la carrière de Subban. Juste avant que les mauvais plis ne s'incrustent, Marc Bergevin, Michel Therrien et Jean-Jacques Daigneault l'ont aidé à rectifier le tir.

De tous les succès de Therrien cette saison, le plus important est peut-être la manière dont il a dirigé Subban: un appui sans réserve, mais beaucoup de fermeté.

L'entraîneur du Canadien ne semble d'ailleurs pas prêt à relâcher la bride de sitôt. À l'approche du duel contre les Sénateurs, tout en rendant hommage à son jeune prodige - «Il a gagné en maturité et a été un défenseur dominant» -, Therrien a rappelé que son numéro 76 avait encore des choses à apprendre. Bref, pas question de l'ensevelir sous les fleurs dès maintenant, une attitude sûrement très sage.

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C'était il y a deux semaines, dans un vaste espace près du vestiaire du Canadien au Centre Bell. Plusieurs joueurs s'échauffaient en prévision du match contre le Lightning de Tampa Bay, deux heures plus tard.

P.K. Subban, lui, faisait de la corde à danser. Avec une habileté, une vitesse et une variété de mouvements à couper le souffle. On aurait dit un champion boxeur, pour qui cet exercice est fondamental.

- Dis donc, P.K., où as-tu appris ça?

- Mon père s'entraînait ainsi pour le basketball, afin d'augmenter la rapidité de ses pieds. J'ai commencé à faire de la corde à danser à l'âge de 7 ou 8 ans et je n'ai jamais arrêté.

Non, ce n'est pas pour rien que Subban est capable de réussir des «spin-o-ramas» qui impressionnent Serge Savard, lui-même un spécialiste de cette feinte à l'époque du «Big Three» à la ligne bleue du Canadien.

Les séries éliminatoires qui commencent demain pourraient devenir un merveilleux tremplin pour P.K. Subban. Il sera confronté à Erik Karlsson, une autre supervedette de la LNH. Les yeux de tous les amateurs seront rivés sur ces deux jeunes et brillants défenseurs.

La série sera serrée. Et au bout du compte, si la troupe de Michel Therrien élimine les Sénateurs, P.K. Subban aura sûrement eu son mot à dire. Sans être le capitaine du Canadien, il est désormais le vrai leader de l'équipe.