Vous me connaissez, « controverse » est mon second prénom, je ne recule pas devant elle. Et ce n'est pas parce que nous sommes en pleine période de réjouissances des Fêtes que je vais faire relâche. Permettez donc une déclaration audacieuse : j'aime le film Love Actually.

Oui, je parle de cette comédie romantique sortie en 2003, qui raconte les histoires d'amour d'une dizaine de personnages dont les trajectoires finissent - ou pas - par s'entrecroiser, pour ne pas dire s'entrechoquer.

Oui, je parle de ce film à la guimauve avec Hugh Grant en PM britannique qui courtise son adjointe tout en remettant à sa place un président des États-Unis (Billy Bob Thornton) qui est à un cheveu d'agripper les femmes par la chatte, Colin Firth en écrivain cocu qui tombe amoureux de sa femme de ménage portugaise et un couple d'Anglais dont l'Histoire a oublié le nom, mais qui se sont rencontrés sur le plateau de tournage d'un film XXX. Ah, j'oubliais la déclaration d'amour d'un écolier à une écolière, au mépris de la sécurité aéroportuaire...

Il y a aussi Mr. Bean. Je ne vous vends pas le punch.

Love Actually est un film qui serait imbuvable si on ne le regardait pas pendant les Fêtes, dans cette période de l'année où nous réfléchissons à nos péchés, à l'espoir d'une nouvelle année à venir et au pouvoir de l'amour, romantique ou fraternel. Love Actually qui se déroulerait en juillet ? Je ne l'aurais jamais regardé.

J'aime Love Actually, mais le film de Richard Curtis (Notting Hill, les Bridget Jones) donne des boutons à des millions de personnes. Ainsi, chaque mois de décembre, surtout dans l'anglosphère, ce débat annuel revient sur le tapis : pour ou contre Love Actually ?

photo fournie par Universal Pictures

Keira Knightley et Andrew Lincoln dans Love Actually

photo fournie par Universal Pictures

Bill Nighy dans Love Actually

Vous trouverez sur Google 47 000 pages contenant les mots « I hate Love Actually », signe indéniable que le film compte plus de détracteurs que les films Hot dog, Les Boys 22 ou Star Wars - La revanche des clones.

BuzzFeed a pondu « 22 raisons pour lesquelles Love Actually n'est pas un bon film » et The Atlantic a décrété que ce film est « le moins romantique de tous les temps », ce qui est plutôt surprenant. Moi qui pensais qu'il s'agissait plutôt de celui sur un couple de plongeurs sous-marins qui repoussent pendant tout un film les attaques de requins. Et qui finissent par se faire manger, à la fin. Dans la catégorie « films de Noël », Love Actually serait aussi dans une course vers le fond du baril.

Personnellement, je m'en fous, je l'assume et je m'assume : j'aime Love Actually, d'abord et surtout parce qu'il a l'heur de me mettre de bonne humeur. J'essaie de l'écouter chaque année, entre Noël et le jour de l'An.

Ne négligeons pas, ici, le pouvoir d'une bonne trame sonore. Si le film est de la guimauve, la trame sonore est une généreuse cuillerée de Nutella. Oui, le film tire sans subtilité sur toutes les ficelles qui ont le don de déclencher l'activité des glandes lacrymales, mais c'est un des charmes de ce film choral : il n'est pas subtil. C'est la barre Mars des films d'amour.

Il y a des analyses critiques qui ont percolé à la surface du web depuis quelques années qui décrètent que la célèbre scène où le gars (Andrew Lincoln) se pointe à la porte de la maison de son meilleur ami (Chiwetel Ejiofor) pour avouer son amour à l'épouse (Keira Knightley) de ce dernier était inappropriée...

Vrai, mais ce n'est pas comme si ce n'était jamais arrivé dans l'histoire des relations hommes-femmes qu'un gars tombe amoureux d'une femme inaccessible, par exemple la blonde/conjointe/épouse de son meilleur ami. J'oserais même dire que l'inverse est vrai : il y a des femmes qui tombent amoureuses du chum/conjoint/mari de leur meilleure amie. Heureusement, il n'y a que dans les films qu'une des parties déclare cet amour sous couvert de cantiques de Noël.

Personnellement, après une année à travailler avec ma tête, à analyser, décortiquer et ausculter les sujets de l'actualité, j'ai envie de m'en remettre à mon coeur, pendant les Fêtes. C'est ainsi que je regarde Love Actually : avec mon coeur, mesdames et messieurs.

Et à la fin du film, je suis toujours charmé et touché devant le guts de Daniel, qui va trouver Joanna à la porte d'embarquement de son vol pour lui dire qu'il l'aime. Quiconque a déjà tu son amour vibre un peu, en voyant le ti-cul courir dans le terminal, les flics à ses trousses...

J'aime Love Actually parce qu'il transforme la complexité des fjords et des montagnes de l'amour en sagas parfaitement digestibles qui trouvent, pour la plupart, des résolutions tout à fait réjouissantes, le tout en 2 heures 25 minutes.

Puis, le film prend fin, les vacances achèvent, la vraie vie reprend ses droits avec toute la complexité qui est la sienne... 

Je sors faire une promenade et, évidemment, la déneigeuse a enterré mon char, j'ai un trou dans ma mitaine et l'amour est une chose en perpétuelle évolution, souvent décevante, sans trame sonore pour me faire taper du pied.