Quand on s'oppose à des goons de la FTQ-Construction, on risque de perdre quelques dents en plus de sa quiétude d'esprit. C'est ce qui ressort du témoignage de Normand Pedneault, un entrepreneur saguenéen qui a eu le malheur d'hériter d'un chantier sur la Côte-Nord, en 2005.

Vous avez peut-être vu M. Pedneault aux nouvelles, hier. Vous l'avez peut-être vu, ému aux larmes en se remémorant comment les goons de la FTQ-Construction ont brutalisé ses deux frères, en débarquant sur ledit chantier.

Ils étaient 40 ou 50, a relaté M. Pedneault. Ils ont encerclé ses travailleurs, ils ont envoyé des claques, des coups de pied. Pour isoler les deux frères de l'entrepreneur, ses associés au sein de Pedneault inc.

Pourquoi?

Pour les détails, vous lirez le compte rendu de Daphné Cameron, ci-dessous, mais le «pourquoi» importe peu. Il n'y a de toute façon pas de «raison» pour se comporter comme des Huns. C'est la méthode, le problème.

Et plus globalement, le problème, c'est que ce qu'a décrit M. Pedneault lors de son témoignage devant la juge Charbonneau recoupe d'autres sales méthodes cautionnées ou utilisées par le sympathique Bernard Rambo Gauthier, sur la Côte-Nord.

Les médias ont fait des enquêtes là-dessus. D'autres témoignages ont été livrés à la commission Charbonneau. La cour est pleine.

Par exemple, la Commission a entendu la semaine passée comment Gauthier gérait les relations patronales-syndicales sur le chantier de La Romaine, par exemple. Il gérait cela comme s'il était le boss absolu, à coups de menaces.

Tu peux insinuer - comme le subtil avocat de la FTQ-Construction Félix Laurin l'a fait hier - qu'un fait incriminant pour Rambo et son gang est basé sur du ouï-dire, donc non recevable...

Mais quand plusieurs faits avancés par plusieurs personnes témoignant à propos de plusieurs événements distincts se recoupent quant aux méthodes brutales, le portrait commence à être assez limpide.

Et le portrait, sur la Côte-Nord, c'est que la menace de violence et le recours à la violence étaient utilisés par les leaders de la FTQ-Construction pour arriver à leurs fins.

Au fait, ces individus étaient regroupés dans une organisation. Ils utilisaient la violence (ou la menace de violence) pour modifier le comportement des autres, à répétition.

Question: c'est quoi le mot pour ça?

Réponse: banditisme.

En 2013, la Commission des relations de travail (CRT) a rendu une décision dans le cas d'un travailleur qui s'estimait lésé dans son droit de travailler sur la Côte-Nord, viré d'une entreprise à la suite de pressions de Rambo Gauthier.

La CRT a constaté l'évidence: la FTQ avait installé un système illégal pour gérer la concurrence de la CSN.

Les méthodes employées par Rambo Gauthier étaient du même acabit que celles qu'on lui reproche d'avoir employé à La Romaine et sur le chantier routier de Normand Pedneault. Entre autres.

Quand on a fait jouer à la CRT un enregistrement d'un témoin où on peut entendre Rambo Gauthier menacer de «lui en crisser une dans les dents».

Explication du «roi de la Côte-Nord»: je parlais de lui mettre une sucette entre les dents...

Sera-t-il aussi fanfaron à la commission Charbonneau? On verra la semaine prochaine.

Que Bernard Gauthier soit un être violent qui agit comme un taupin mafieux, c'est son affaire. Mais le fait est que depuis le temps, la FTQ et la FTQ-Construction savent que cet homme utilise des méthodes dignes du banditisme pour arriver à ses fins.

Pis rien ne change.

La FTQ n'est pas un syndicat de bandits, mais elle tolère le banditisme en son sein. La différence en est une de degré.

Mais au bout du compte, l'aveuglement de la FTQ fait mal à l'idée même du syndicalisme. On devrait comprendre, rue Crémazie, que ces histoires de banditisme syndical risquent d'entacher bien plus que le petit nombril efftéquiste.

Dans une époque d'individualisme glorifié, le principe même de travailleurs qui se rassemblent pour se doter de conditions de travail décentes ne convainc pas tout le monde.

Aux États-Unis, le taux de syndicalisation est en baisse depuis plusieurs décennies. À Ottawa, la souche hyper conservatrice qui bande sur l'AmericanDream rêve d'émasculer les syndicats. La guérilla est d'ailleurs commencée.

Dans ce contexte, des goons organisés qui sacrent des volées à du monde honnête, c'est une infopub antisyndicale inespérée pour la droite dure.

Bravo, Rambo, bravo Arsenault, on pourrait quasiment croire que vous êtes payés par le Conseil du patronat.

Pis le politique? - Le passage aux rayons X de la brutalité et de la collusion syndicale, très bien, j'en suis. La commission Charbonneau fait son travail, petit à petit, un témoignage à la fois.

J'espère que les bonzes de la politique provinciale auront droit à une coloscopie publique aussi élaborée.