Toc, toc, a fait le reporter de TVA à la porte de Charles Lapointe, ex-PDG de Tourisme Montréal, hier matin...

M. Lapointe a passé des années à la tête de Tourisme Montréal. Salaire: 398 000$! C'est plus élevé, de 40%, qu'un sous-ministre au provincial.

Il paraît que c'est comparable à ce qu'on donne aux dirigeants de pareils organismes à Toronto et à Boston. C'est ce qu'a dit Tourisme Montréal en réponse aux critiques très vives du vérificateur général du Québec, qui a mis son nez dans les livres de cet organisme.

Et le VG Michel Samson a découvert des trucs pas jojo: par exemple, que le salaire de M. Lapointe n'avait probablement pas été entériné par le conseil d'administration, comme le veut la «bonne pratique». Seul le président du C.A. a signé ce contrat.

Le VG nous apprend aussi que Charles Lapointe a eu droit à deux années de salaire (deux!) quand il a - volontairement - quitté son job, pour un total en avantages de... 654 000$.

Également: pour les trois années après son départ, on a consenti à M. Lapointe l'utilisation d'un bureau et d'une secrétaire!

Il y a aussi le cas de cette allocation pour frais d'utilisation d'une automobile, alors que M. Lapointe avait une limousine et un chauffeur. Sans oublier des dépenses remboursées en double!

J'arrête ici...

Mais je vais dire ceci: les excès de Charles Lapointe ont été en partie rendus possibles par le fait que son organisme n'est pas couvert par la Loi sur l'accès à l'information. Je suis convaincu que M. Lapointe aurait appuyé un peu moins fort sur le crayon s'il avait su que ses notes de frais étaient susceptibles de se retrouver à la une de La Presse.

N'oublions pas que Tourisme Montréal a donné le feu vert à ces conditions pharaonesques. C'est le président du C.A. qui a signé le dernier contrat de M. Lapointe. Il s'appelle Jacques Parisien. Espérons qu'il répondra aux questions: il ne l'a pas fait hier.

Toc, toc, toc, a donc fait le reporter de TVA à la porte du retraité Charles Lapointe...

M. Lapointe a refusé de répondre aux questions et il lui a fermé la porte au nez.

Je le comprends. À sa place, moi aussi, j'aurais honte. Moi aussi, je me cacherais.

La vieille politique

Philippe Schnobb n'était pas le journaliste le plus flamboyant en ville. Mais c'était un journaliste compétent et rigoureux. Quand il a pris congé de Radio-Canada pour faire le saut dans l'équipe de Denis Coderre, j'ai eu la même réaction que quand d'autres journalistes sont devenus politiciens...

Primo: es-tu fou?

Deuzio: bravo.

Es-tu fou, parce que nous faisons un beau métier, surtout quand nous évoluons dans des boîtes qui ont un minimum de moyens. Bravo, parce qu'il faut bien que quelqu'un se fasse élire et qu'un Schnobb qui fait le saut, ça enlève la place à au moins un peddler.

Mais Schnobb - que je ne connais que de loin - a perdu ses élections, par la peau des fesses. Pas de job de conseiller municipal pour lui. Il aurait pu retourner à Radio-Canada, où il aurait eu à subir un purgatoire, loin des caméras.

Notre nouveau maire Denis Coderre avait d'autres idées pour son candidat-vedette malheureux. Il veut que Philippe Schnobb soit le prochain président du conseil d'administration de la Société de transport de Montréal (STM).

Ayoye.

L'évidence, d'abord, rapidement soulignée par Richard Bergeron, chef de l'opposition: Philippe Schnobb n'a pas de compétence particulière en matière de transports collectifs. Pas plus qu'en gestion d'un organisme public au budget colossal.

C'est un journaliste dans l'âme, un bon journaliste dans l'âme: il va faire ses devoirs et apprendre les bases du métier de président du conseil d'administration d'une organisation capitale dans la gestion du transport à Montréal.

Mais était-il le meilleur homme pour le job?

Poser la question, c'est y répondre. Non.

Que le maire de Montréal souhaite placer une personne de confiance dans un poste semblable, passe encore. La gestion des transports est hautement politique, on comprend que le maire souhaite asseoir dans cette chaise quelqu'un avec qui il est sur la même longueur d'onde.

C'est d'ailleurs ce que Gérald Tremblay avait fait, en 2009, en plaçant Michel Labrecque à ce poste. Labrecque venait de perdre ses élections à la mairie du Plateau, quartier qu'il avait représenté comme conseiller d'Union Montréal pendant quatre ans.

Labrecque était une nomination éminemment politique. Mais il était une nomination éminemment compétente: il avait dirigé Vélo Québec pendant des années, il avait dirigé le festival Montréal en lumière. Philippe Schnobb a géré ses beats de journaliste.

J'ai l'air de lancer des tomates à Philippe Schnobb. Mais il a bien fait de prendre le job, au fond, s'il a envie d'une seconde vie hors des médias. Celui à qui il faut lancer des tomates, c'est bien sûr le maire Coderre.

Ce n'est pas la première fois qu'un politicien fait une nomination politique qui défie les lois de la physique. Celle de Nicolas Girard, ex-député péquiste nommé par les péquistes à l'Agence métropolitaine de transport, me vient spontanément à l'esprit.

Les tomates, c'est surtout parce que dans les mois précédant son élection, Denis Coderre avait promis de rompre avec les vieilles façons de faire de la politique.

Photo Anne Gauthier, La Presse

Philippe Schnobb