Juste après le Boss du gâteau (Cake Boss) et juste avant l'Homme tronc, deux émissions à forte densité intellectuelle, Sarah Palin était en reprise mercredi au réseau TLC.

Pour ceux qui l'ignorent, Sarah Palin est, depuis dimanche dernier et pour les sept prochaines semaines, la première politicienne à oser l'aventure de la téléréalité. Jusqu'à maintenant, les téléréalités étaient réservées aux chanteurs populaires sur leur retour d'âge, aux rockers aux neurones brûlés, aux toiletteurs pour chiens exhibitionnistes ou aux starlettes névrosées et au chômage. Mais Sarah Palin vient une fois de plus de créer un précédent en invitant les caméras dans sa «petite» maison de 22 pièces dans la toundra à Wasilla en Alaska, moyennant évidemment une généreuse rétribution du producteur.

Cinq millions d'Américains ont regardé le premier épisode, un nombre duquel il faut tout de suite soustraire Steven Cowan, du Wisconsin, qui a fait exploser sa télé avec sa carabine après avoir vu Bristol, la fille de Palin, danser avec les étoiles dans une autre émission à la télé.

Mais revenons à nos moutons ou plutôt à nos ours et à nos saumons, vedettes récalcitrantes de la partie de pêche de Sarah et de sa famille. Avant de sauter dans un hydravion comme dans un taxi, Sarah nous a présenté ses cinq rejetons. Tous portent des noms bizarres empruntés aux avions (Piper), au papier glacé (Bristol), au saule (Willow), aux sentiers dans la forêt (Track) ou à la trigonométrie (Trig). Décidément, Sarah ne manque pas d'imagination. En revanche, elle manque de discernement face à ses propres contradictions.

Réfugiée sur la tranche de béton de sa terrasse, elle «étudie» des dossiers sans doute préparés par un accessoiriste, tout en se plaignant de son nouveau voisin. Le voisin en question est le journaliste et auteur Joe McGinnis qui écrit un livre sur la peut-être future candidate à la présidence dans une bicoque louée à 10 pieds de chez elle. Pour le punir, Todd, le mari de Sarah, a bricolé une clôture vacillante de 14 pieds entre leurs deux propriétés. «C'est une invasion de ma vie privée», clame celle qui vient d'inviter cinq millions d'Américains dans sa vie et dans sa maison. Allô!

La suite de l'émission est une longue pub sur les vastes étendues de forêts et sur les sommets enneigés de l'Alaska, qui en fin de compte ressemble au Canada. D'ailleurs, par son amour du grand air et de la nature sauvage, Sarah est un peu canadienne, sauf qu'elle ne le sait pas et c'est parfait comme ça.

Peu importe si elle est dans sa cuisine ou au sommet d'une montagne, en gougounes ou en habit de motoneige, Sarah est toujours maquillée et coiffée comme pour aller à un bal viennois avec le maire de Laval. Elle a la fâcheuse habitude d'émailler toutes ses phrases du mot cool. L'ours qui s'apprête à lui sauter dessus est cool. L'hydravion qui la dépose sur son perron est cool. Son mari bricoleur est cool. Mais le plus cool de tout, c'est le véhicule récréatif à bord duquel la famille part parfois en excursion. Le véhicule ressemble au tour bus d'Ozzy Osbourne, mais Sarah nous le présente comme s'il s'agissait d'une modeste tondeuse.

Certains font une promenade l'après-midi. Sarah Palin elle, enjambe des glaciers et découvre un nouveau mot: crevasse. Éblouie par la neige et distraite par la caméra, Sarah manque de tomber dans une crevasse du glacier Ruth. J'avoue qu'un bref instant, j'ai souhaité que la crevasse l'avale et la fasse disparaître à jamais. Mais je me suis ravisée en apprenant que Ruth est moins dangereuse que Lisa (Murkowski), la nouvelle sénatrice de l'Alaska. Au lendemain de son écrasante victoire, Lisa a déclaré que Sarah n'avait pas les qualités de leader ni la curiosité intellectuelle pour devenir présidente. À ne pas inviter au même party de grizzly.

Demain soir, Sarah apprend à Bristol à tirer de la carabine. Pourvu que Steven Cowan soit parti jouer au bingo, sinon sa nouvelle télé va y goûter.