Il y a un côté de moi qui se dit que ce trimestre scolaire condensé en quelques semaines, dont parle ma collègue Pascale Breton dans son reportage, doit être bien pénible pour les étudiants et les professeurs.

Trimestre condensé: des étudiants à bout de souffle

Pour les étudiants, pas le temps de réfléchir, de digérer les notions à apprendre, de prendre du recul et de s'interroger un peu plus. Pas le temps de se reposer en regardant les étoiles. Pas le temps de sentir les feuilles rougir en buvant un dernier café sur une terrasse, tout en discutant de Proust, Camus, Miron ou Kierkegaard, avec ou sans téléphone cellulaire.

Le militantisme du printemps, qui a permis à plus d'un de prendre le temps, à sa façon, de refaire le monde, a fait place aux études sous pression.

Pour les professeurs, la vie se passe à cent à l'heure.

On dirait que le mijoté, le braisé, ces apprentissages auxquels on laisse le temps de percoler, ont fait place à la pédagogie façon micro-ondes. Rapide.

Il ne faudra pas s'étonner que la cuisson ne soit pas toujours égale. Que certains morceaux soient plus à point que d'autres.

Tous doivent appuyer sur le bouton «avance rapide». Il faut que ça avance.

Pourtant, on ne peut pas tirer sur le gazon pour le faire pousser.

On ne peut pas s'attendre à ce que les étudiants apprennent autant et aussi bien, pendant ce trimestre ratatiné, que lors d'un trimestre normal.

Il y a un côté de moi, donc, qui se dit que cette situation ne doit être agréable pour personne. Surtout pas les profs. Surtout pas les élèves et les étudiants. Surtout pas ceux qui ne voulaient pas de cette grève et qui se retrouvent avec les conséquences douloureuses de choix qu'ils n'ont pas faits. Je pense aux étudiants de l'étranger, notamment, qui investissent encore plus dans ces études que ceux d'ici, en temps et en argent, ces études qui, au printemps dernier, n'ont tout simplement pas eu lieu.

Mais il y a un autre côté de moi, sorti de je ne sais trop où - peut-être trop écouté les discours de la Coalition avenir Québec durant la campagne électorale -, qui se dit qu'il n'y a pas d'épreuves, dans la vie, qui sont inutiles.

J'entends déjà mon collègue Foglia en train de hurler «Cyrulnik, sors de ce corps», mais c'est vrai, non? Il y aura des tas de leçons à apprendre de ce trimestre «microprocessé».

Des leçons d'efficacité, comment faire face au stress, comment gérer son temps de façon hyperproductive. Des leçons qui nous apprennent à laisser tomber le superflu pour aller à l'essentiel.

Ces trimestres bouleversés pourraient être ceux de l'antiprocrastination. Débrouillardise 101 et enrichie en une seule leçon.

Les étudiants en paieront-ils le prix? Peut-être.

Mais entre les manifestations qu'ils ont menées à bout de bras durant tout le début de l'année, avec les résultats qu'on connaît - la tenue d'élections et la mise en place de leurs demandes par le nouveau gouvernement élu -, et maintenant cette épreuve de vitesse de haute voltige, le moins qu'on puisse dire, c'est que ce cru 2012 ne sera pas banal. Pour le pire. Mais aussi pour le meilleur.