La 67e soirée des Golden Globes, qui aura lieu demain, n'est plus depuis longtemps un indicateur fiable des Oscars. Mais le gala de l'énigmatique Hollywood Foreign Press Association, qui a lieu autour d'un dîner de stars arrosé de champagne, est la première remise de prix d'importance de l'année et reste parmi les plus sympathiques du genre. La cérémonie, diffusée demain au Canada dès 19h au réseau CTV et animée par l'hilarant Ricky Gervais (The Office, Extras), ne devrait pas faire exception. Survol des principales catégories cinéma.


Meilleur film (drame)

> Avatar

Visuellement splendide, techniquement irréprochable, populaire au-delà de toutes les espérancesetmalgré un scénario simpliste et prêchi-prêcha, d'un conventionnel navrant.

> The Hurt Locker

Un film grand public au regard d'auteur, doublé d'une fiction réaliste sur la déshumanisation du conflit armé et sur ses effets euphorisants. Pour être témoin des choix quotidiens de vie ou de mort d'une unité de déminage en Irak.

> Precious

L'histoire de Clarisse «Precious» Jones, 16 ans, battue par sa mère, illettrée, obèse morbide, mère d'un enfant trisomique et enceinte d'un deuxième, dont son propre père est le père. Des couches et des couches de pathos, des effets de réalisation malheureux et des ruptures de ton constantes.

> Up in the Air

Une tragicomédie spirituelle, ironique et fort «sympathique». Les dialogues sont savoureux, mais manquent un peu de mordant et demeurent dans un registre grand public acceptable pour Hollywood.

> Inglourious Basterds

Sordide, cynique et archiviolent, grandiloquent et ambitieux, mais aussi grandiose et majestueux. Une somptueuse métaphore de la puissance du cinéma.

Mon choix

Inglourious Basterds

Meilleur réalisateur

> Kathryn Bigelow

(The Hurt Locker)

Une réalisation précise, nerveuse, de perpétuelle tension. Une scène marquante: un soldat d'élite, démineur d'exception, est pris au dépourvu devant un étalage de boîtes de céréales dans un supermarché.

> James Cameron

(Avatar)

Un extrême souci du détail dans la mise en scène. James Cameron a attendu une dizaine d'années afin que la technologie puisse rendre adéquatement sa vision d'une planète créée de toutes pièces, avec son propre écosystème. On en vient à confondre les images de synthèse et les images réelles. Pour le reste, c'est du Terminator...

> Clint Eastwood

(Invictus)

Une réalisation convenue de type «téléfilm» pour une fiction célébrant la victoire de l'équipe sud-africaine à la Coupe du monde de rugby de 1995, ainsi que l'accession de Nelson Mandela à la présidence de son pays. On a connu Clint Eastwood beaucoup plus inspiré.

> Jason Reitman

(Up in the Air)

Une réalisation subtile et intelligente, aux effets mesurés, qui marie élégamment de véritables témoignages et des scènes fictives, la comédie et le drame, le regard d'auteur et le film populaire.

> Quentin Tarantino

(Inglorious Basterds)

L'enfant terrible du cinéma américain se trouve au sommet de sa forme, dans un cinéma de référence pleinement assumé, varié et foisonnant, avec une mise en scène extrêmement soignée.

Mon choix

Quentin Tarantino

Meilleur acteur (drame)

> Jeff Bridges

(Crazy Heart)

Jeff Bridges incarne avec maestria une ancienne star du country sur le déclin, mélange de Waylon Jennings et de Merle Haggard, dans le petit-film-surprise de l'année (à l'affiche le 22 janvier au Québec).

> George Clooney

(Up in the Air)

George Clooney est en grande forme dans le rôle d'un mercenaire du licenciement de masse, qui aide des entreprises à se débarrasser de leurs employés. Un beau sans coeur, sans attaches, que le beau Clooney parvient subtilement à nous rendre attachant.

> Tobey Maguire

(Brothers)

Le regard absent de Tobey Maguire, les yeux exorbités dans un visage émacié, traduit avec acuité le mal-être du soldat de métier arraché à ses frères d'armes pour être catapulté dans la société civile, dans l'émouvant film de Jim Sheridan.

> Colin Firth

(A Single Man)

La prestation précise et sentie de Colin Firth en professeur suicidaire n'arrive pas à sauver du naufrage ce film maniéré et prétentieux, réalisé de manière insupportable par Tom Ford, un designer égaré au cinéma.

> Morgan Freeman

(Invictus)

Morgan Freeman a beau avoir assimilé la gestuelle et le débit du leader du mouvement antiapartheid Nelson Mandela, l'acteur ne s'efface pas assez pour faire place au personnage historique. Mission impossible pour un acteur connu?

Mon choix

George Clooney

Meilleure actrice (drame)

> Emily Blunt

(The Young Victoria)

Une interprétation juste, mais froide et distanciée, des années de jeunesse - plutôt anecdotiques - d'un grand personnage de la monarchie britannique.

> Sandra Bullock

(The Blind Side)

Sandra Bullock fait-elle une meilleure actrice en blonde? Plusieurs critiques américains semblent le croire...

> Helen Mirren

(The Last Station)

The Last Station prendra l'affiche au Québec le 12 février.

> Carey Mulligan

(An Education)

La jeune Carey Mulligan est fort inspirée, pétillante et enjôleuse, dans le rôle d'une première de classe qui s'amourache d'un charmant arnaqueur (Peter Sarsgaard). Mais le film de la Danoise Lone Scherfig, prometteur, tourne à l'eau de boudin à 20 minutes d'une fin particulièrement moralisatrice.

> Gabourey Sidibe

(Precious)

Crédible mais en même temps effacée dans le rôle d'une jeune obèse illettrée, maltraitée par ses parents, qui tente de reprendre son destin en main en s'inscrivant dans une école pour raccrocheurs.

Mon choix

Carey Mulligan

Meilleur acteur dans un second rôle

> Matt Damon

(Invictus)

Crédible en capitaine courage blond et musclé de l'équipe de rugby sud-africaine, dans un film malheureusement médiocre de Clint Eastwood.

> Woody Harrelson

(The Messenger)

Remarqué au dernier Festival de Berlin, où il était en compétition (prix du scénario), The Messenger n'a pas pris l'affiche au Québec.

> Christoph Waltz

(Inglourious Basterds)

L'acteur autrichien, méconnu au cinéma, est époustouflant dans le rôle du perfide et polyglotte colonel S.S. Hans Landa. Il vole la vedette à Brad Pitt.

> Stanley Tucci

(The Lovely Bones)

Je n'ai pas encore eu l'occasion de voir Stanley Tucci en tueur en série dans le nouveau film de Peter Jackson, qui prend l'affiche ce week-end.

> Christopher Plummer

(The Last Station)

The Last Station
doit prendre l'affiche au Québec le 12 février.

Mon choix

Christoph Waltz (à défaut d'avoir vu tous les autres)

Meilleure actrice dans un second rôle


> Penélope Cruz

(Nine)

L'Espagnole s'en tire plutôt bien dans le rôle de la maîtresse de Guido Contini/Marcello Mastroianni/Federico Fellini/Daniel Day-Lewis. Elle chante juste, joue de sa sensualité à merveille. La comédie musicale de Rob Marshall, en revanche, sonne faux et fait fort dans les clichés éculés sur le néoréalisme, l'esbroufe, le carton-pâte et le déjà-vu.

> Vera Farmiga

(Up in the Air)

Actrice sous-estimée, Vera Farmiga trouve enfin un rôle à sa mesure, en alter ego féminin du personnage solitaire de George Clooney, dans le film de Jason Reitman. Libre, séductrice, absolument crédible.

> Anna Kendrick

(Up in the Air)

En recrue ambitieuse, perfectionniste et névrosée d'une firme spécialisée dans le licenciement, qu'elle joue avec juste assez de candeur, elle complète avec brio le duo amoureux formé par George Clooney et Vera Farmiga. > Mo'Nique

(Precious)

L'humoriste et comédienne montre tout son savoir-faire dans ce contre-emploi de mère violente, irresponsable et méprisable. Une tirade spectaculaire, d'une brutalité inouïe, destinée à sa fille, et ses explications pathétiques à une travailleuse sociale interprétée par Mariah Carey, devrait lui valoir bien des prix.

> Julianne Moore

(A Single Man)

Julianne Moore, en expatriée britannique qui déchante de l'Amérique, est formidable comme toujours dans le rôle vraiment secondaire d'un film noyé dans le tic publicitaire.

Mon choix

Mo'Nique

Meilleur film en langue étrangère

> Baaria (Italie)

Baaria, de Giuseppe Tornatore, mal reçu à la Mostra de Venise (et financé par Silvio Berlusconi), n'a pas pris l'affiche au Québec.

> Étreintes brisées

(Espagne)

Étreintes brisées n'est pas un grand Almodóvar. Son intrigue est plutôt mince, son scénario assez conventionnel, sa charge émotive mal canalisée, mais c'est néanmoins un film fluide et séduisant, qui porte la signature lumineuse de son auteur.

> La nana (Chili)

Le film de Sebastian Silva n'a pas encore pris l'affiche au Québec.

> Un prophète (France)

Le récit puissant de l'ascension fulgurante en milieu carcéral français d'un sans-abri illettré de 19 ans qui tombe sous la coupe de mafieux corses avant de devenir lui-même caïd. Deux heures et demie de pur délice cinématographique, dans le style lancinant de Jacques Audiard. Ce grand film, d'une réalité brutale, doit prendre l'affiche au Québec le 26 février.

> Le ruban blanc

(Allemagne)

Une oeuvre austère et cérébrale, magnifiquement filmée, aux forts accents bergmaniens, tournée principalement en plans fixes, en allemand, sans musique. Michael Haneke y traite de la montée du fascisme, en illustrant comment la génération qui a embrassé le nazisme a été élevée dans un climat de terreur. Le film doit prendre l'affiche au Québec le 5 février.

Mon choix

Un prophète