Un bon score pour les libéraux, un score inquiétant pour les conservateurs, un score décevant pour le NPD... Tels sont les faits saillants des quatre élections partielles de lundi.

Le PLC a vu ses appuis monter considérablement dans deux circonscriptions manitobaines que le Parti conservateur aurait dû conserver très facilement. Dans Provencher, le PLC a quadruplé son vote de 2011, tandis que dans le circonscription voisine de Brandon-Souris - un fief «bleu» depuis des décennies, le candidat conservateur est venu à un cheveu de mordre la poussière aux mains du libéral, le PLC passant d'un vote de 5% en 2011 à 43% lundi dernier!

Les deux candidats libéraux manitobains n'étant pas particulièrement renommés, et ne disposant même pas d'une organisation locale solide, il faut attribuer leurs victoires morales à l'«effet Trudeau».

Le chef libéral est plus efficace sur les tribunes électorales, où il peut se contenter de livrer des petits discours «inspirants» qu'à la Chambre des communes, où son immaturité politique le fait apparaître le plus souvent comme un poids léger.

Camouflet supplémentaire pour le gouvernement Harper, les électeurs manitobains semblent avoir accordé plus d'importance à ses mauvais coups (scandale Duffy et tutti quanti) qu'à ses bons coups, comme le libre échange avec l'Europe, une politique favorable, entre autres, aux exportateurs agricoles de l'Ouest. Les Manitobains n'ont même pas remercié le gouvernement d'avoir adopté deux mesures qu'ils réclamaient à cor et à cri, l'abolition du registre des armes à feu et celle de la Commission canadienne du blé...

On a beau dire qu'une élection partielle obéit à des lois particulières (il s'agit souvent de punir momentanément un gouvernement qu'on aurait par ailleurs réélu s'il s'était agi d'élections générales), il reste que le PC a de quoi s'inquiéter.

Le NPD également, car on aurait pu s'attendre à ce qu'il fasse bien meilleure figure dans les deux comtés que le PLC a remportés haut la main. Dans Toronto-Centre, le NPD avait une bonne candidate en la personne de la journaliste de gauche Linda McQaig.

Dans Viau aussi, où la néo-démocrate Stéphane Moraille était bien plus intéressante que le libéral Emmanuel Dubourg. Mme Moraille, une ex-chanteuse de rock devenue avocate, était elle aussi d'origine haïtienne, ce qui en faisait une candidate sur mesure pour un comté où nombre d'électeurs viennent de l'île antillaise.

Deux excellentes candidates, donc, avec au surplus la performance vigoureuse du chef Thomas Mulcair en Chambre... Cela aurait dû donner des ailes au NPD, mais ce ne fut pas le cas. Mme Moraille n'a même pas mieux fait que le «poteau» que le NPD avait planté dans Viau en 2011, alors que nul ne prévoyait la vague orange.

C'est sans doute à la frustration qu'il faut attribuer la crise de nerfs du chef néo-démocrate au lendemain du scrutin. Justin Trudeau ayant emprunté pour célébrer sa victoire une phrase prononcée par Jack Layton sur son lit de mort (c'est du moins ce que veut la légende propagée par les proches de l'ancien chef), M. Mulcair a crié au crime de lèse-majesté. Du calme! Même un juif ou un athée pourrait fort bien citer une phrase de Jésus-Christ sans que les chrétiens les accusent de désacraliser la mémoire du grand homme!

Paradoxalement, ces résultats contiennent un motif d'optimisme pour les Conservateurs. Si le PLC continue à monter et le NPD à descendre, les deux partis se partageant par ailleurs, grosso modo, le même électorat, le PC pourrait facilement se faufiler entre les deux, alors qu'à la veille d'élections générales, les failles des deux leaders d'opposition seraient plus visibles, M. Trudeau étant jugé peu fiable et M. Mulcair, peu aimable...