Face à cette marée de scandales, réels ou allégués, qui est en train de détruire la réputation de Montréal et le moral de ses habitants, il n'est pas inutile d'aller voir ailleurs, sur le thème de l'adage bien connu: quand on se regarde, on se désole... mais quand on se compare, on se console!

Consolons-nous donc un petit moment, en regardant ce qui se passe en France... cette France qui est loin d'être le pays le plus corrompu d'Europe - un titre que se disputent chaudement la Grèce et l'Italie.

15 décembre 2012: l'ancien président Jacques Chirac est condamné à deux ans de prison avec sursis pour «détournement de fonds publics». Comme maire de Paris, il avait parrainé un système d'emplois fictifs au bénéfice de son parti, mais l'immunité offerte au chef de l'État lui avait permis d'échapper à la justice pendant 15 ans.

19 mars 2013: Jérome Cahuzac, ministre du Budget, est soupçonné d'avoir eu un compte bancaire suisse qui lui aurait permis de placer une partie de sa fortune à l'abri du fisc. Le ministre du Budget doit notamment sévir contre... l'évasion fiscale!

C'est le deuxième ministre du Budget qui tombe en trois ans, le premier étant Éric Woerth, en 2010. Il a été mis en examen pour recel, pour avoir présumément servi d'intermédiaire entre le gestionnaire de fortune de Liliane Bettencourt, la richissime héritière de l'Oréal, et M. Sarkozy.

21 mars 2013: Nicolas Sarkozy, ex-président de la République, est inculpé d' «abus de faiblesse», supposément pour avoir requis, lors de la campagne présidentielle de 2007, quelque 150 millions d'euros en espèces de la part de Mme Bettencourt, dont les facultés mentales étaient alors affaiblies.

Précisons que ces derniers sont à ce stade présumés innocents.

Mais quand même, on ne parle plus ici du menu fretin qui fait les beaux jours de la commission Charbonneau. La fraude était, est encore peut-être, au plus haut sommet de l'État!

La démission forcée de M. Cahuzac, l'un des poids lourds de l'équipe Hollande, a eu l'effet d'un coup de tonnerre dans le ciel déjà fort sombre du pouvoir socialiste, aux prises avec des records d'impopularité. Un enregistrement obtenu par Mediapart a lancé l'affaire, qui a rebondi cette semaine lorsque le parquet de Paris a confirmé que la voix masculine mentionnant l'existence d'un compte secret était bien celle du ministre.

Coïncidence troublante, c'est deux jours plus tard que le juge d'instruction chargé du dossier Bettencourt a inculpé M. Sarkozy, après l'avoir confronté aux témoignages de domestiques de la milliardaire.

Quoique le juge Gentil ne soit pas engagé politiquement, il est connu pour ses méthodes brutales et son caractère intransigeant. Il est du reste notoire que les enquêtes préliminaires menées par les juges d'instruction sont souvent entachées de considérations politiques ou, à tout le moins, d'un zèle suspect de grand inquisiteur, pour peu que ces «petits juges» aient mis la main sur une proie de haut niveau. La justice française, au moins à ce stade, n'a pas du tout la rigueur de la justice canadienne.

Autre élément que les partisans de Sarkozy ne se privent pas de claironner, l'inculpation de l'ancien président survient au moment où, selon un récent sondage de Paris-Match, sa cote de popularité dépasse de neuf points celle du président Hollande.

Ce spectaculaire retournement dans l'opinion, moins d'un an après la victoire de ce dernier, a alimenté la rumeur voulant que M. Sarkozy soit tenté par un éventuel retour en politique... Une possibilité que ces démêlés avec la justice, qui risquent de s'étaler dans le temps, vont compromettre sérieusement.