«Tu devrais jouer plus souvent au golf avec mon fils», m'a lancé hier Laurent Verreault, cofondateur du Groupe Laperrière&Verreault, en marge de l'assemblée annuelle des actionnaires de l'entreprise qui était à l'origine un fabricant d'équipements pour l'industrie des pâtes et papiers et qui s'impose depuis 2007 comme un leader mondial dans les technologies du traitement des eaux usées.

Laurent Verreault, aujourd'hui président du conseil du groupe industriel qui a été rebaptisé GLV en 2007, affirme qu'il a beaucoup ri, l'été dernier, lorsqu'il a lu et visionné le compte rendu d'une longue rencontre que j'ai eue avec son fils Richard, PDG de GLV, dans le cadre de notre série d'entrevues sur un terrain de golf qui étaient publiées le samedi dans La Presse+.

«J'ai bien ri en le voyant s'activer sur les verts alors qu'il explique que le contexte économique est difficile mais que GLV travaille fort à son redressement. J'ai surtout beaucoup ri le lundi lorsque l'action de GLV s'est appréciée de plus de 30% en une seule séance. Il faudrait qu'il joue plus souvent au golf», a lancé à la blague l'entrepreneur.

L'histoire - aussi véridique et surprenante soit-elle - illustre bien, pourtant, les difficultés que bien des entreprises québécoises inscrites à la Bourse rencontrent en raison du faible volume de transactions dont font l'objet leur titre.

L'entrevue que j'ai réalisée avec Richard Verreault a été publiée le samedi 29 juin. Le PDG explique, sans complaisance et sans fausses excuses, les difficultés que le Groupe a traversées au cours des trois dernières années à la suite de la plus importante acquisition de son histoire.

En 2009, GLV a lancé une offre publique d'achat (OPA) sur le groupe suisse Chris Water, spécialisé dans les eaux de procédés, destinées aux industries de la micro-électronique et de l'énergie. L'entreprise québécoise consolidait ainsi sa position dans les solutions de traitement des eaux usées.

Cette percée a cependant coûté cher puisque plusieurs contrats clés en main qu'avait signés Chris Water se sont avérés des gouffres financiers. GLV a mis trois ans avant de reprendre le contrôle de la situation.

Un actionnariat figé

Au cours de notre rencontre au golf, GLV venait d'enregistrer deux trimestres consécutifs de redressement et son action en Bourse, qui avait touché un creux à 1,65$ cinq mois plus tôt, s'était quelque peu remplumée pour franchir le cap des 3$.

Le mardi 2 juillet, le titre de GLV a bondi de plus de 30% pour franchir la marque des 4$. Un bond soudain, inexpliqué, qui a même amené les autorités du S&P/TSX à s'enquérir auprès de la direction de GLV pour savoir s'il n'y avait pas une nouvelle en voie d'être divulguée.

«On a été surpris. On a eu plusieurs appels d'investisseurs durant la journée qui voulaient prendre de nos nouvelles. L'article paru le samedi a été vraisemblablement beaucoup lu», souligne Richard Verreault.

Avec le recul, le PDG constate aussi que c'était la première fois en trois ans qu'il faisait une sortie publique qui ne s'adressait pas seulement à ses actionnaires institutionnels ou aux analystes qui suivent son entreprise.

Il faut dire aussi que plus de 65% des actions de GLV étaient détenues par des investisseurs institutionnels - fonds communs de placement, caisses de retraite, Caisse de dépôt et placement ou Fonds FTQ -, ce qui n'aide en rien à la liquidité du titre.

«Depuis l'été, notre actionnariat s'est toutefois modifié, observe Richard Verreault. Ma chef des finances m'a fait remarquer la semaine dernière que les institutions ne comptent plus que pour 50% de notre actionnariat.»

Une modification qui ne s'est pas réalisée sans heurts. Si GLV a profité d'une plus-value exceptionnelle de plus de 30% au cours de la seule séance du 2 juillet, son titre a perdu presque l'équivalent depuis la fin du mois d'août, un gros investisseur ayant largué plus de 700 000 actions au cours de quatre séances consécutives.

Le sort que subit l'action de GLV est comparable à celui de quantité de titres québécois dont le float, ou la liquidité, les maintient dans des corridors de valorisation potentielle très étroits.

Avant que le fabricant de trains d'atterrissage Héroux-Devtek n'annonce la vente de sa division industrielle, il y a un an et demi, son action était en complète stagnation depuis deux ans et s'échangeait à une valeur inférieure à sa valeur comptable.

Depuis l'annonce de cette transaction, l'action a pratiquement doublé en dépit de la perte d'une partie non négligeable de son volume d'affaires. Pour bien des entreprises québécoises, il faut réaliser un coup de circuit pour que le marché s'en rende compte. Ça prend certainement plus qu'une bonne ronde de golf.