La dernière ronde de dévoilement des résultats financiers des banques s'est terminée jeudi et, contrairement à ce que plusieurs observateurs appréhendaient, le sang n'a pas giclé.

Mieux encore, les PDG des cinq grandes banques canadiennes - qui figurent avantageusement dans le peloton de tête des dirigeants bancaires les mieux rémunérés d'Amérique du Nord en 2012 - peuvent même espérer gagner encore plus d'argent cette année.

Évidemment, enregistrer un solide deuxième trimestre ne présage pas des résultats de toute une année. Mais les profits que viennent de dégager les banques canadiennes à leur deuxième trimestre ont surpris tout le monde, tant ils ont été vigoureux et d'autant plus qu'ils ont été réalisés dans un contexte nettement défavorable.

La Banque TD a affiché des profits de 1,7 milliard, en hausse de 2%; la Banque Nationale, de 369 millions, (+6%); la CIBC, de 876 millions, (+8%); la Scotia, de 1,6 milliard (+10%); et la Royale, de 1,94 milliard (+26%). Seule la Banque de Montréal affiche des profits en baisse de 5%, mais qui ont tout de même totalisé 975 millions.

Pour bien des gens, ce festival de millions ne marque rien de nouveau. Les banques nous ont habitués, trimestre après trimestre et année après année, à la livraison de profits toujours plus importants. Toujours plus qu'hier et moins que demain.

Ce qui étonne cette fois, c'est que la performance des banques a été bien au-delà des attentes des analystes, qui étaient inquiets des effets du ralentissement du marché immobilier et de la faible croissance de l'activité économique que l'on observe au Canada.

Avec un marché immobilier qui fonctionne au ralenti depuis plus d'un an maintenant et dont l'accessibilité a été considérablement réduite pour les premiers acheteurs de maison, plusieurs observateurs anticipaient une érosion de la profitabilité des activités de détail des grandes banques canadiennes.

D'autant que la faiblesse persistante des taux d'intérêt affecte directement les marges de profit que les institutions prêteuses réalisent sur leurs activités de financement hypothécaire.

L'inquiétude était donc bien réelle et elle a d'ailleurs été abondamment nourrie par les dirigeants des institutions financières qui ont maintes fois indiqué que leurs objectifs de croissance allaient être freinés cette année par la lenteur de l'économie canadienne et le refroidissement de l'activité immobilière.

Un baromètre insensible

Chose certaine, le marché immobilier canadien est en nette régression par rapport à l'an passé. Les ventes de maisons existantes ont chuté de 15% l'an dernier pour l'ensemble du Canada.

Manifestement, le ministre des Finances, Jim Flaherty, a atteint son objectif de réduire l'endettement des ménages canadiens en ramenant à 25 ans le terme maximal d'amortissement d'un emprunt hypothécaire. Il y a trois ans, les ménages pouvaient étaler leur remboursement sur une période de 40 ans, ce qui a fortement contribué à alimenter le marché immobilier.

Au Québec seulement, le mouvement de repli se poursuit depuis le début de l'année, alors qu'on a enregistré au premier trimestre de 2013 une baisse de 16% de l'activité de la revente de maisons.

La construction résidentielle a aussi été affectée par le resserrement des règles d'amortissement. Selon le Mouvement Desjardins, le nombre de mises en chantier de maisons individuelles a chuté de 20% durant les quatre premiers mois de 2013.

Enfin, preuve indéniable de l'importance de la chute de l'activité immobilière au pays, la Société canadienne d'hypothèques et de logement n'a assuré que pour 8,2 milliards de financement hypothécaire au cours du premier trimestre, soit moins de la moitié des 19,0 milliards qu'elle avait assurés l'an dernier.

Les banques réalisent donc moins de financement hypothécaire que l'an dernier. Pourtant, seule la Banque de Montréal affiche à son second trimestre une baisse de 1% de ses profits sur ses opérations canadiennes de détail. Toutes les autres institutions ont enregistré des profits en hausse, malgré le recul de l'achalandage hypothécaire.

Si nos banques paraissent pour l'instant blindées contre le ralentissement du marché immobilier, elles vont tôt ou tard en subir les effets. Heureusement pour elles, plusieurs de leurs autres secteurs d'activité, notamment celui de la gestion de patrimoine, leur permettront d'atténuer le choc en haussant leur contribution à la colonne des bénéfices. Tant que les marchés boursiers ne planteront pas...