«Carbo! Carbo! Carbo!»

La foule du Centre Bell a parlé, hier soir. Elle a parlé fort. Et son message était sans équivoque: si c'était pour continuer à jouer aussi mal, le Canadien aurait pu s'épargner un psychodrame et garder son entraîneur.

Ceux qui croyaient que le Canadien profiterait du congédiement de Guy Carbonneau pour relancer sa saison en sont quittes pour une amère déception. Pour l'électrochoc, on repassera: la première semaine de Bob Gainey derrière le banc du Tricolore est loin d'avoir produit les étincelles espérées.

 

Oui, le Canadien a récolté trois points sur une possibilité de six. Mais comme Gainey l'a lui-même avoué après la rencontre, il faudra faire beaucoup mieux au cours de cette semaine si le Canadien ne veut pas se faire doubler par la compétition.

Ce qui est particulièrement inquiétant, c'est que les démons qui hantaient le Canadien sous Carbonneau ne montrent aucun signe de vouloir cesser leur influence malfaisante.

Le Canadien était inconstant sous l'ancienne administration? Il l'a été contre les Oilers et les Islanders, offrant des performances atroces lors de la deuxième période de ces deux matchs.

L'équipe avait la mauvaise habitude d'accorder trop de tirs à l'adversaire, compliquant la tâche de ses gardiens? Elle en a accordé 39 aux Islanders, la pire équipe de la ligue, et pas moins de 48 aux Devils hier soir.

L'équipe était indisciplinée? Elle a conservé son abonnement au banc des punitions. Rien qu'hier, elle a écopé de cinq punitions en première période. C'est tout ce qu'il fallait aux Devils pour marquer deux fois en supériorité numérique et donner à Martin Brodeur toute la marge de manoeuvre dont il avait besoin pour remporter sa 551e victoire et égaler le record de Patrick Roy.

Il ne faut pas se surprendre que de fortes huées aient retenti à plusieurs moments durant le match d'hier - et pas nécessairement pour contester les décisions des arbitres. Cette équipe ne montre aucun signe d'émotion, alors que sa saison est peut-être en train de lui filer entre les doigts. Au cours des dernières minutes du match d'hier, les joueurs avaient l'air aussi abattus que Fulgencio Zuniga l'était, 24 heures plus tôt, quand Lucian Bute lui a asséné un uppercut au plexus.

On ne pouvait par ailleurs pas espérer que la cohésion qui faisait défaut au Canadien, surtout en territoire défensif, reviendrait comme par magie grâce à l'arrivée de Gainey et de son nouvel adjoint, Don Lever. Mais il est pour le moins surprenant de constater que les joueurs ont passé très peu de temps à s'entraîner au cours des derniers jours.

«Un exercice d'équipe d'école secondaire», a dit Chris Higgins, sans ironie, après que les attaquants eurent passé une petite demi-heure sur la glace, vendredi. C'est bien beau de préserver ses énergies à ce stade de la saison, mais les joueurs ont de toute évidence besoin de faire un peu plus de «X et O» en compagnie de leurs entraîneurs.

Au début de la saison 2008-2009 de la LNH, j'ai prédit que le Canadien de Montréal finirait premier dans l'Association de l'Est. Ce n'était pas mon meilleur coup. Je n'ai heureusement pas poussé l'audace jusqu'à prédire la Coupe Stanley aux hommes en bleu-blanc-rouge. Le scénario d'un 25e sacre du Tricolore en cette année du centenaire apparaît aujourd'hui aussi improbable qu'un retour au jeu d'Aurèle Joliat.

Au fond, l'arrivée de Gainey ne change pas grand-chose. Le Canadien reste ce qu'il a été depuis le premier jour de l'année: une petite équipe de milieu de peloton. Une équipe capable de vaincre les meilleurs clubs à l'occasion - les Sharks de San Jose se sont inclinés au Centre Bell récemment, après tout - mais une équipe qui déclasse rarement ses adversaires. Et qui, trop souvent, a besoin que son gardien de but fasse des miracles pour espérer gagner.

Un réveil est encore possible, j'imagine. Mais il commence à se faire drôlement tard.

 

Où s'arrêtera Martin Brodeur?

Que dire de plus au sujet de Martin Brodeur?

Dans une journée qu'on imagine fertile en émotions, le gardien des Devils a fait fi de la pression pour atteindre la marque de Patrick Roy devant les siens, à Montréal. Au fond, c'est Roy qui a donné la pleine mesure des exploits, passés et à venir, de Brodeur.

«Ce qui est fascinant avec lui, c'est où ça va s'arrêter ? C'est extraordinaire, ce qu'il fait.» Chapeau bas à un joueur immense, un des plus grands ambassadeurs du hockey.