Ellen DeGeneres, championne de l'humour pince-sans-rire, a entamé hier soir le 86e gala des Oscars avec beaucoup plus de finesse que son prédécesseur, Seth MacFarlane. Elle a livré un monologue d'ouverture dépouillé, juste assez piquant et pas trop méchant. Quoique Liza Minnelli n'a pas eu l'air d'apprécier que la maîtresse de cérémonie la confonde avec un personnificateur masculin. Mais, bon.

La reine des talk-shows s'est gentiment moquée de Jennifer Lawrence, Meryl Streep et Jonah Hill. Le tout, avec classe et sourire. Une note parfaite.

Après Tina Fey et Amy Poehler qui ont été superbes à la barre des Golden Globes en janvier, on se disait que l'année 2014 serait celle des femmes aux commandes des cérémonies les plus prestigieuses de Hollywood. C'était bien parti, en tout cas.

Malheureusement, Ellen DeGeneres, élégante en lavallière blanche et tuxedo noir, a levé le pied et ses gags, de moins en moins comiques, sont devenus prévisibles et répétitifs. La pizza pour tout le monde? On a compris. Les actrices anorexiques n'ont pas mangé depuis trois jours pour entrer dans leurs robes à 15 000 $.

À au moins quatre reprises, la caméra a montré Ellen en retard dans ses entrées sur scène. Et elle n'arrêtait plus de descendre au parterre du Dolby Theater pour prendre des photos avec son téléphone cellulaire blanc. Le commanditaire Samsung a dû jubiler.

J'avoue, par contre, qu'il y avait du gros wattage dans le cliché avec Jennifer Lawrence, Brad Pitt, Meryl Streep, Julia Roberts, Angelina Jolie, Kevin Spacey, Bradley Cooper et Channing Tatum, entre autres. La royauté de Hollywood, un peu comme s'il s'agissait d'une page couverture du Vanity Fair.

La première demi-heure du gala a renfermé de très beaux moments, comme le numéro coloré et enjoué de Pharrell Williams sur Happy, chanson extraite du film Despicable Me 2. Toutes les stars se trémoussaient dans la foule.

Le premier prix de la soirée, remporté par Jared Leto du film Dallas Buyers Club, a donné lieu à un discours brillant. Le nom du réalisateur Jean-Marc Vallée a résonné plusieurs fois au micro et pourtant, la caméra du réalisateur des Oscars ne l'a pas montré, multipliant plutôt les plans sur Matthew McConaughey et Jennifer Garner assise derrière. Dommage.

Bien aimé aussi The Moon Song du film Her, chantée par Karen O des Yeah Yeah Yeahs et Ezra Koenig de Vampire Weekend. Prestation douce, touchante et sans flafla. Lupita Nyong'o, formidable dans 12 Years a Slave, a été extrêmement émouvante dans ses remerciements.

Le problème avec les Oscars, et c'est la même rengaine depuis des décennies, c'est que la majorité des téléspectateurs ne s'intéresse qu'à six des 24 prix remis en ondes. On parle ici du meilleur acteur, de la meilleure actrice, du meilleur film, du meilleur réalisateur, du meilleur acteur de soutien et de la meilleure actrice de soutien.

Pour les 18 autres statuettes du gala, une ribambelle de récompenses souvent très techniques et pointues, mettons qu'il faut vraiment être un mordu du septième art pour attendre avec impatience l'Oscar du meilleur montage sonore ou celui meilleur court métrage animé.

Conséquence: il est possible de regarder les 45 premières minutes et la dernière demi-heure sans rien rater de vraiment important. C'est étonnant que des gens dont le métier est de divertir n'aient pas encore réussi à concocter une formule des Oscars plus dynamique, moins ronflante.

Certains de ces trophées pourraient facilement être remis au gala hors d'ondes sans que les téléspectateurs s'en plaignent. En même temps, cette mise à l'écart des catégories de métier offusquerait les artisans qui bricolent, dans l'ombre, tous ces films. Chose certaine, il y aurait des correctifs à apporter.

Le tapis rouge officiel des Oscars, qui a duré 90 minutes sur ABC, a été aussi insignifiant qu'à l'habitude. Nous avons même eu droit à un topo sur les ravages de la pluie sur les préparatifs de cet événement ultra mondain. Pas facile de déambuler élégamment sur une carpette mouillée. Et toute cette humidité fait autant de misère aux crinières. C'est ça, la misère des riches, les amis.