Il serait hypocrite d'écrire le contraire. Pour la majorité des téléspectateurs d'ici, l'intérêt principal des Oscars d'hier soir consistait principalement à croiser les doigts très fort pour les Québécois Yan England et Kim Nguyen, qui ont frayé avec le gratin hollywoodien. Ce qui est déjà tout un exploit en soi.

À 21 h 33, nous avons donc collectivement retenu notre souffle quand Kerry Washington et Jamie Foxx, les stars de Django Unchained, ont annoncé le nom du gagnant dans la catégorie du court métrage: Shawn Christensen, pour Curfew. La caméra a rapidement balayé Yan England, qui a donné l'accolade à son camarade Christensen dans la corbeille. Un moment qui a passé en un claquement de doigts.

Dix-huit minutes plus tard, c'était au tour de Kim Nguyen de concourir dans la catégorie du meilleur film étranger pour Rebelle. Sur la scène, les actrices Jessica Chastain (magnifique) et Jennifer Garner énuméraient les finalistes et, sans aucune surprise, c'est le magnifique Amour de Michael Haneke qui a triomphé. Contrairement à Yan England, Kim Nguyen n'a même pas eu droit à une seule seconde d'exposition devant le milliard de téléspectateurs qui visionnaient le gala d'hier partout sur la planète. Double déception.

Sinon, le déroulement cette interminable cérémonie n'a pas bougé d'un iota depuis des lustres. Pourquoi les organisateurs s'obstinent-ils à remettre autant de prix techniques, inintéressants pour le grand public, et pourquoi coincent-ils toujours les quatre trophées les plus prestigieux à la toute fin du gala, passé 23 h 30? Notre patience a des limites.

Il faut vraiment adorer le cinéma, le glamour et les vedettes pour s'enfiler la totalité du gala sans zapper. Prix du meilleur court-métrage animé, prix des effets visuels, des costumes, du maquillage, du mixage sonore, de la direction artistique... Il y a même eu égalité pour le meilleur montage sonore. Zzzz. Chère Académie du cinéma, il existe une chose très pratique qui s'appelle une remise de prix hors d'ondes. Tous les autres galas s'en servent pour décongestionner leur émission principale. Prière de l'employer l'an prochain, merci.

Dans cette nuée de fêtes d'autocongratulation du showbiz, le gala des Oscars se veut le plus prestigieux. Mais, hélas! c'est rarement le plus captivant. Encore hier, ce fut pénible, alors que l'animateur Seth MacFarlane peinait à trouver le ton approprié pour pousser ses blagues sur la scène du Dolby Theater.

Son numéro d'ouverture, beaucoup trop long, a été inégal. Certains des gags ont été bien piquants, comme celui sur l'absence de sourire de Tommy Lee ou cet autre sur Django Unchained, le film préféré de Chris Brown et Rihanna pour un rendez-vous galant. Par contre, on se serait passé du segment musical, très juvénile, sur les actrices ayant dévoilé leurs seins au grand écran.

Visiblement nerveux, et ça se comprend, Seth MacFarlane a passé sa soirée à osciller entre quelques trucs rigolos et des répliques sexistes qui ont semé le malaise au parterre. Heureusement pour lui, il a fait preuve d'une autodérision salvatrice.

Et contrairement à ses prédécesseurs, tels Steve Martin, Billy Cristal ou Whoopi Goldberg, Seth MacFarlane, 39 ans, est plus connu pour son travail derrière les caméras que devant. Créateur du populaire dessin animé Family Guy du réseau Fox, Seth MacFarlane prête sa voix suave aux personnages du père Peter Griffin, du petit Stewie, du voisin Quagmire ainsi qu'au chien mi-humain Brian. Dans son domaine, MacFarlane excelle. Comme maître de cérémonie, il a quelques croûtes à manger.

Côté variétés, l'orchestre a malheureusement enterré la belle Adele sur Skyfall, et Catherine Zeta-Jones semblait faire du lipsync pendant le numéro consacré à Chicago. Heureusement, les acteurs de la comédie musicale Les Misérables ont été parfaits, ce qui inclut le peu convaincant Russell Crowe.

Après l'hommage aux disparus de 2012, Barbra Streisand a montré à ses dauphines qu'il n'est pas nécessaire de hurler dans le micro pour toucher le coeur des gens. Jennifer Hudson, on prend des notes, s'il vous plaît.

Bonne idée que de lancer la musique du film Jaws pour couper le sifflet aux gagnants qui s'éternisent au micro.

Tout aussi éternelle que le gala lui-même, la présentation du tapis rouge a duré une heure et demie sur les ondes du réseau ABC. Quatre-vingt-dix longues minutes que l'animatrice (et comédienne de Broadway) Kristin Chenoweth a employées à parler de sa petite taille et à apostropher les stars à grands coups de «hey, girl». Pénible.

La chaîne spécialisée E! avait même installé une caméra qui filmait en gros plan les manucures des actrices. Ce sera quoi l'an prochain? Le zoom sur le Botox? Pénible (bis).