Avec sa série supra carnivore Martin sur la route, à Radio-Canada, le chef Martin Picard a présenté au public son côté rugueux comme du gros papier sablé. Avec sa nouvelle émission, Un chef à la cabane, à Télé-Québec, le propriétaire du restaurant montréalais Au pied de cochon nous montre sa facette plus sucrée, plus facile à digérer, mettons.

Car, non, il n'y a pas de boucherie ou de tuerie dans Un chef à la cabane, qui démarre demain à 21h. Les images ne vous écoeureront pas, au contraire. Ça se sent: l'imposant Martin Picard, 46 ans, veut qu'on l'aime dans ce projet. Pas qu'on le craigne.

Et ce projet, ce n'est pas un show de cuisine traditionnel mesuré en tasses et en cuillères à soupe. C'est plutôt une sorte de téléréalité dans les coulisses de l'érablière que Martin Picard a achetée en 2009 à Saint-Benoît de Mirabel, à une heure de route de Montréal.

C'est donc à cet endroit - la cabane à sucre du Pied de cochon, qui ouvre ses portes au public le 15 février - que se tourne cette savoureuse série de huit émissions d'une heure. Outre le rabelaisien Martin Picard, plusieurs «personnages» défilent devant la caméra dont Mononc Marc, le bouilleur de sirop, Vincent le responsable des cuisines, Gabrielle la pâtissière, Carl l'agronome et Stéphane le biologiste.

Tous ces gens travaillent réellement pour Martin Picard. Et Mononc Marc est vraiment l'oncle du célèbre chef, auquel les «foodies» vouent un culte depuis plus de dix ans déjà. À l'opposé, ses détracteurs lui reprochent sa cuisine excessive et ultra-riche.

Le premier épisode d'Un chef à la cabane se déroule en octobre et s'attarde notamment aux ravages causés par une tornade qui a dévasté cet été une partie de l'érablière de 130 acres. Martin Picard et ses complices partent en tracteur et transplantent certains arbres pour limiter les dégâts.

C'est précisément dans ces moments que Martin Picard semble avoir le plus de plaisir: dehors, dans le bois, avec sa chemise de chasse et ses grosses bottes en caoutchouc. Le chef s'occupe aussi de quelques cochons qu'il élève sur ses terres et qu'il engraisse à la citrouille. Des cochons qui finiront, évidemment, dans l'assiette de ses clients.

Tournée de prosciutto!

Quand une truie donne naissance à huit jolis porcelets, en pleine nuit, à la fin du premier épisode, Martin Picard s'exclame même: «On est rendus à huit jambons, faut pas lâcher.» Certains végétariens ou végétaliens vont peut-être grimper dans les rideaux ici. Tant pis pour eux.

Bien sûr, il y a des recettes dans l'émission: une sucrée et l'autre, salée. La première, un traditionnel rôti de palette, est exécutée en solo par le bras droit de Martin Picard, Vincent Dion-Lavallée. Pour un débutant du petit écran, il passe très bien le test. Ses explications sont claires et il sait communiquer de façon efficace. On reverra ce Vincent ailleurs, c'est certain.

La deuxième recette, c'est un millefeuille complètement hallucinant à l'érable et à la courge. La préparation de ce dessert est très complexe, mais le résultat fait saliver. Attendez de voir l'épaisseur des tranches que les employés de la cabane se servent, en sablant le champagne. Allô, les calories! Le festin qu'ils dégustent dans les dernières minutes est tout aussi généreux. «Ostie que c'est bon!», laissera échapper Martin Picard.

Pour ceux qui se posent encore la question: oui, on mange extrêmement bien chez Martin Picard.

Hier, le chef a reçu un petit groupe de journalistes avec des manchons de canard glacés à l'érable, une tourtière avec petits morceaux de cervelle, des oeufs dans le sirop, des grilled cheese aux truffes et au chèvre, une soupe aux pois ultra-consistante, des oreilles de crisse décadentes, des whippets à l'érable et de la tire sur la neige. C'était délicieux.

Là, vous rouspétez sans doute devant votre café: on sait bien, vous faites une critique positive d'Un chef à la cabane parce que vous vous êtes bourré la fraise aux frais du prince. Non, pas du tout.

Je n'ai pas été le plus grand fan de Martin sur la route, une émission qui coupait l'appétit plus qu'il ne l'ouvrait. Et au chapitre des relations publiques, Martin sur la route a renforcé l'image de rustre qui colle à Martin Picard depuis ses débuts.

Un chef à la cabane est beaucoup plus grand public, plus agréable, ce qui rend sympathique sa tête d'affiche. L'émission vous donnera sûrement le goût d'aller vous remplir la panse à cette cabane haut de gamme. Malheureusement, c'est déjà complet jusqu'en mai. Quand les places s'ouvrent au public, elles se vendent en moins de 24 heures. Faut se lever tôt pour réserver.