Vraiment, les scénaristes de télé québécoise nous garderont encabanés tout l'automne avec leurs histoires captivantes. À la liste des émissions à dévorer avec appétit, comme La galère, Lance et compte: le grand duel, Les Parent, Aveux, Yamaska et Les hauts et les bas de Sophie Paquin, il faut maintenant ajouter Le gentleman, un thriller de gros calibre que nous a concocté avec beaucoup de finesse le tandem Anne Boyer et Michel d'Astous.

Si vous craquez pour des séries policières comme Fortier ou Damages, ce Gentleman, incarné par le mystérieux David Boutin, vous séduira, vous effraiera et vous clouera sur le bout de votre sofa pendant huit semaines, c'est garanti.

Après leur ambitieuse saga historico-romantique Nos étés, qui coulait sur les berges du fleuve Saint-Laurent, à Cap-sur-Mer, les Boyer-d'Astous nous catapultent ici dans le béton gris des rues de Montréal, dans un univers à la fois glauque et intrigant, celui de la prostitution de luxe. Un marché qui s'infiltre sournoisement dans les chics hôtels-boutiques et où les «compagnes et compagnons» d'un soir facturent 350 $ l'heure.

Le premier épisode du Gentleman, que TVA diffusera le jeudi 8 octobre à 21 h, démarre en coup de canon: après une mission d'infiltration particulièrement périlleuse, l'agent double Louis Cadieux (David Boutin), 35 ans, revoit en boucle des images ensanglantées de sa copine Kim (Marianne Farley), plongée dans un coma après avoir été abattue d'une balle à la tête. Première question: qui a tenté de tuer cette pétillante blonde, étudiante en chant au Conservatoire et barmaid à mi-temps à l'Observatoire, un bar BCBG?

La riche mère de Kim, campée par Angèle Coutu, se méfie de son gendre Louis: «Tu dégages des ondes de malchance autour de toi, monsieur le policier», lui siffle-t-elle sur un ton bourré de reproches.

Au poste de police, l'enquête «officielle» sur la tentative de meurtre de Kim, menée par Richard Beauvais (Michel Barrette) piétine, ce qui agace le bouillant Louis Cadieux, qui creuse aussi de son côté, en marge de ses collègues. Vous l'avez deviné: Cadieux, allergique à l'autorité, est obsédé par l'idée d'épingler celui, celle ou ceux qui ont voulu tuer sa douce Kim. Assez pour transgresser toutes les règles d'éthique de sa profession. Assez pour même enfreindre le Code criminel. Vous comprendrez au deuxième épisode, quand Louis Cadieux adoptera officiellement son identité de Lucky-le-gentleman.

Mais ne brûlons pas les étapes. En farfouillant dans le passé de Kim, Louis Cadieux déterre des infos bouleversantes, que je ne vous révélerai pas, question de garder intact votre plaisir de les découvrir. En parallèle, un jeune escorte, Glen Fenwick, étudiant à McGill, est égorgé dans son luxueux condo du centre-ville. L'assassin, extrêmement méticuleux, lui enfile même des bas blancs avant de partir. Pourquoi?

Peu de temps après, les flics dirigés par Richard Beauvais découvrent le cadavre d'une autre prostituée, Léa Pinera, assassinée le même jour que Glen Fenwick. Quels liens unissent ces deux travailleurs du sexe? Et, dans ce grand puzzle policier, où s'imbrique la pièce de Kim?

Un peu comme dans Le silence des agneaux de Jonathan Demme, l'allumé réalisateur Louis Choquette montre, petit à petit, le garage du meurtrier, ses mains gantées, ses plantes, ses instruments de boucherie, sa voiture blanche. Le visage de l'assassin reste toujours voilé.

Et sachez ceci: aucun détail, aucun indice n'a été semé de façon anodine. À vous de les décrypter. Pour confectionner leur Gentleman, Anne Boyer et Michel d'Astous, qui signent leur premier thriller, ont été inspirés par la sordide histoire du tueur en série Robert Pickton, qui se serait vanté d'avoir éliminé 49 prostituées et toxicomanes du Downtown Eastside de Vancouver, un quartier d'une extrême pauvreté.

Parmi les personnages gravitant autour de Louis Cadieux, notons sa soeur Nathalie (Marie-Chantal Perron), qui arbore une énorme cicatrice (info importante, n'oubliez pas) lui mangeant tout le dos. L'humoriste Lise Dion, dont le personnage comique sert à dissiper la tension, parfois de façon maladroite, joue la meilleure amie de Nathalie, Marise, une ostéopathe à la langue bien pendue. Marie-Hélène Thibault se glisse dans la peau de Dorice Tremblay, une collègue policière qui en pince pour Louis.

Ce qui fascine avec Le gentleman, c'est qu'aucun personnage n'est blanc ou noir et une atmosphère de paranoïa inquiétante colore la série. Comme le dit l'adage: la nuit, tous les chats sont gris (et les policiers aussi).

Tout le monde regarde

Le mercure dégringole, la pluie nous déprime et les jours raccourcissent. Conséquence? Les cotes d'écoute des grands réseaux explosent. Et non, TVA n'écrase pas outrageusement la SRC. Même que l'écart entre les deux chaînes rétrécit. Lundi soir, La classe de 5e de Charles Lafortune a intéressé 1 197 000 personnes à TVA, alors que 1 073 000 ont préféré Les Parent à Radio-Canada.

À 20 h, le premier épisode du téléroman Yamaska a rassemblé 1 362 000 fans devant leur téléviseur. Sur les ondes de la SRC, L'auberge du chien noir a bien résisté et conservé son million de fidèles (1 080 000). À 21 h, La galère de Renée-Claude Brazeau (849 000) n'a pas à rougir de sa performance devant Lance et compte: le grand duel (1 373 000). Bref, ça chauffe dans les chaumières.

 

Photo: Robert Skinner, La Presse

Anne Boyer et Michel d'Astous signent avec Le gentleman leur premier thriller avec une solide distribution.