Le ministère des Finances du Québec n'a pas chômé cet été. Pour alimenter la Commission d'examen sur la fiscalité québécoise, le Ministère a produit trois fascicules, totalisant quelque 325 pages, sur le système d'imposition du Québec. Les plus grandes surprises viennent de l'impôt prélevé aux entreprises. Voici un survol de certaines découvertes.

Trois fois plus d'aide aux entreprises au Québec

En 2013, l'aide fiscale accordée par le gouvernement du Québec aux entreprises s'est élevée à 2,5 milliards. Cette aide a pris diverses formes: crédits d'impôt pour les emplois informatiques, pour le multimédia, pour la recherche et développement, pour la capitalisation des entreprises (Fonds FTQ et CSN), etc. En comparaison, l'aide fiscale s'est élevée à 1,5 milliard en Ontario. Comme le Québec est plus petit que l'Ontario, son aide de 2,5 milliards équivaut à 0,67% de son PIB, contre 0,22% en Ontario, ce qui est trois fois plus.

20 entreprises touchent 260 millions

Une vingtaine d'entreprises obtient une grosse part de l'aide fiscale au Québec, soit 260 millions par année. La moitié de ces entreprises vient du secteur informatique (CGI, IBM, etc.), à qui l'on a versé 171,5 millions en 2011 (les plus récents chiffres disponibles). L'autre moitié vient du secteur multimédia (88,5 millions), parmi lesquels on trouve Ubisoft et Warner Bros. Games. L'aide de l'État prend la forme d'un crédit d'impôt qui sert à payer une partie du salaire des employés.

Des impôts «négatifs» pour 5000 entreprises

Au Québec, les entreprises de deux secteurs ne rapportent rien en impôts au gouvernement. En fait, non seulement ne rapportent-ils rien, mais encore ils coûtent de l'argent sous forme de crédits d'impôt. Ainsi, le fardeau fiscal est négatif de 112 millions pour le groupe de 2900 entreprises du secteur «services aux entreprises», ce qui est surprenant. Ce secteur comprend les entreprises de services informatiques, notamment. L'autre groupe qui a un fardeau fiscal négatif - ce qui n'est guère surprenant - oeuvre dans le secteur appelé «services aux individus». Ce secteur comprend près de 2200 entreprises, pour l'essentiel dans le secteur culturel (cinéma, musique, etc.). Il bénéficie d'un avantage fiscal net de 178 millions.

Un fardeau deux fois plus grand pour le Québec inc.

Le fardeau fiscal global des entreprises est deux fois plus imposant au Québec que dans les autres provinces. Cet écart s'explique par la cotisation que doivent verser les employeurs pour les services de santé. Pour estimer l'écart, le ministère des Finances a appliqué aux entreprises du Québec le régime des autres provinces, ce qui comprend l'impôt sur les profits, la taxe sur le capital et la taxe sur la masse salariale. Ainsi, une entreprise qui a un fardeau fiscal de 100 au Québec aurait un fardeau de 68,6 en Ontario, de 49,2 en Colombie-Britannique et de 45,8 en Alberta. Pour les entreprises du Québec, l'écart avec le régime ontarien représente 2,9 milliards.

Un taux d'imposition de seulement 9,4% pour les particuliers

Les particuliers québécois paient un taux d'imposition moyen sur leur revenu de seulement 9,4% au gouvernement du Québec. Pourquoi? En principe, ils auraient dû verser 38,9 milliards de dollars en impôts à Québec en 2011 (l'année la plus récente disponible). Cependant, il faut retrancher de cette somme 15,5 milliards de crédits d'impôt (dons de charité, solidarité, etc.). Impôt net: 23,4 milliards, ce qui équivaut à 9,4% du revenu total de l'ensemble des Québécois (248,6 milliards). Ce taux de 9,4% n'inclut pas la portion fédérale. Le taux marginal d'imposition maximum, prélevé sur la portion la plus élevée des revenus des particuliers, est de 25,8% au Québec, mais de 50% lorsque combiné au fédéral.

Quatre sur 10 ne paient pas d'impôts, mais...

Contrairement à la croyance populaire, le Québec ne détient pas le titre du plus grand nombre de contribuables exempts d'impôts. Globalement, 36,6% des Québécois n'ont pas payé un cent d'impôt sur le revenu en 2011 (l'année la plus récente disponible), contre 44,1% en Colombie-Britannique, 41,4% en Saskatchewan ou même 38,3% en Alberta. Le Québec vient au 5e rang. La plus faible proportion se trouve à l'Île-du-Prince-Édouard (27,0%). Les provinces plus riches peuvent se permettre d'exempter plus de contribuables pauvres. Cependant, les contribuables des autres provinces n'ont pas accès aux garderies à 7$ et aux universités peu chères.

Les Québécois plus endettés, donc plus imposés

L'impôt sur le revenu représente au Québec une plus grande proportion de la richesse collective qu'ailleurs en Amérique. Les Québécois versent en impôts l'équivalent de 12,3% de leur produit intérieur brut (PIB), comparativement à 10,8% ailleurs au Canada et 8,2% aux États-Unis. Dans les pays du G7, ce taux est de 8,9%. Diverses raisons expliquent cet écart. D'abord, les Québécois obtiennent un peu plus de services qu'ailleurs. Ensuite, la dette publique est plus grosse, et les Québécois doivent verser plus d'impôts pour en payer les intérêts. Enfin, notre richesse relative (PIB) est proportionnellement plus faible, et ce plus petit dénominateur fait augmenter le taux à 12,3%.