À chaque campagne électorale, les partis politiques présentent des cadres financiers trop optimistes, destinés à amadouer les électeurs. Cette campagne ne fait pas exception, même si les engagements électoraux ont déjà été plus excessifs.

Voici une revue critique des cadres financiers des trois partis de l'opposition (pour le PQ, le budget Marceau a été amplement décortiqué).

PLQ

Au PLQ, les engagements coûteront entre 5,5 et 6,1 milliards de dollars sur cinq ans. Le parti de Philippe Couillard veut, entre autres, injecter plus d'argent dans la santé (700 millions), relancer le Plan Nord (301 millions), abolir la hausse à 9$ des tarifs de garderie (466 millions) et investir davantage dans des infrastructures, notamment pour le Plan Nord (1,1 milliard de plus pour le service de la dette).

Le problème tient au financement de cet ambitieux programme de cinq ans, c'est-à-dire la façon dont le PLQ prévoit amasser les quelque 6,0 milliards (1,2 milliard par année).

D'abord, le PLQ prévoit que l'économie du Québec croîtra de 4,5% par année, en incluant l'inflation, soit beaucoup plus que les économistes du secteur privé (3,6%). Cette croissance très optimiste, de 0,9 point de plus que le privé, permettrait au PLQ d'engranger environ 450 millions de plus par année, soit 2,25 milliards sur cinq ans. Wow!

Le PLQ explique cet optimisme par la relance de son Plan Nord et sa stratégie maritime. Or, les prix des métaux ont chuté depuis le départ de Jean Charest, ce qui fait douter de la vigueur des investissements miniers d'un nouveau Plan Nord.

Ensuite, le PLQ dit vouloir réduire la bureaucratie et améliorer l'efficacité dans les secteurs de la santé et de l'éducation et dans les sociétés d'État (2,5 milliards sur cinq ans). L'objectif est noble, mais les gouvernements qui se sont succédé n'y sont pas parvenus, malgré leur volonté.

Enfin, le PLQ prévoit réduire les versements prévus au Fonds des générations de 1,3 milliard de dollars sur cinq ans. Or, la hausse des versements au Fonds a pour objectif de réduire la croissance de notre dette, l'un des plus grands problèmes du Québec.

La CAQ

Du côté de la CAQ, on est irréaliste sur les compressions de dépenses plutôt que sur la croissance des revenus. La CAQ soutient être en mesure d'éliminer complètement le déficit de 1,75 milliard prévu cette année par les péquistes, essentiellement en faisant des coupes.

La CAQ veut réduire dès cette année une grosse part des subventions et crédits d'impôt aux entreprises (450 millions) que touchent des multinationales comme CGI ou IBM. Un tel changement est majeur et aurait assurément un impact sur l'emploi et la croissance économique au Québec à court terme, et donc sur les recettes du gouvernement. Il faudrait plutôt l'envisager à plus long terme.

Même chose pour la réduction de la main-d'oeuvre (521 millions dès la première année), qui se calculerait en milliers de postes abolis. L'effort de compression est trop rapide, dans le contexte des conventions collectives.

Québec solidaire

Québec solidaire, de son côté, prévoit une mini-révolution. Les engagements ne se chiffrent pas à 6 milliards sur cinq ans, comme au PLQ, mais à 8,3 milliards... par année. Tous les voeux de QS y passent: réinjection dans la santé et l'éducation (2,5 milliards), revenu minimum garanti (1,7 milliard), plan de sortie du pétrole (1,1 milliard), logements sociaux (500 millions), etc.

Pour y parvenir, le parti veut augmenter les impôts des entreprises et des institutions financières de 2,0 milliards par année, ce qui correspond à une hausse de plus de 15% de leur fardeau fiscal. Nul doute qu'une telle hausse aurait un impact sur l'activité économique, qui n'est pas pris en compte par QS.

L'impôt des particuliers serait aussi augmenté de 2 milliards. Comme QS veut réduire le fardeau des pauvres et de la classe moyenne, ce sont les riches qui écoperaient. Amir Khadir parle des contribuables qui gagnent plus de 85 000$. Pour eux, la hausse se chiffrerait donc à quelques milliers de dollars par année.

QS annulerait aussi la hausse des tarifs de garderie, une annonce qui n'a pourtant fait aucune vague. Il cesserait aussi de verser de l'argent dans le Fonds des générations lorsque la cagnotte serait rendue à 10 milliards (d'ici trois ans, selon le budget Marceau).

En somme, sur le plan financier, les promesses des partis politiques sont pour la plupart très optimistes, sinon carrément irréalistes. Quelques bonnes idées à retenir de ces partis, tout de même: la réduction de la bureaucratie, le plafonnement de la dette, le report des projets hydroélectriques Romaine-3 et Romaine-4 et la réorganisation des subventions aux entreprises.