Juillet aura été un mois des plus actifs pour les gouvernements canadien et québécois sur le marché des emprunts.

Ottawa a réussi à amasser 13,9 milliards de dollars avec ses émissions d'obligations au cours du mois. Un an plus tôt, c'était 9,4 milliards, selon la compilation faite par la Banque Nationale.

Québec n'a pas été en reste avec plus de 4 milliards, dont 3 milliards en dollars canadiens. C'est 2 milliards de plus qu'en juillet 2015.

Pour Ottawa, seul juillet 2009 aura été plus actif. L'année allait se solder par le plus grand déficit budgétaire de l'histoire, créé par le plan de relance pour sortir de la Grande Récession et l'effondrement des rentrées fiscales, en particulier celles liées à l'impôt sur le revenu des sociétés.

Les besoins d'emprunt d'Ottawa sont plutôt élevés cette année aussi, compte tenu du déficit estimé à près de 40 milliards qu'il faut financer. De plus, la stratégie fédérale de financement de la dette privilégie depuis des années les échéances obligataires de moins de cinq ans. Ces emprunts coûtent moins cher, mais il faut les renouveler plus souvent.

Des 13,9 milliards, 10,9 milliards ont été empruntés pour cinq ans ou moins.

Selon Warren Lovely et Taylor Scheich, de la Banque Nationale, cette stratégie s'est révélée très payante pour les Canadiens jusqu'ici.

Privilégier les courtes échéances, c'est agir un peu à la manière du ménage qui opte pour les taux variables ou les termes d'un ou deux ans pour sa dette hypothécaire.

Surtout dans un contexte où les taux restent faibles. Bien sûr, nous rabâche-t-on, ils remonteront un jour. Même dans ce scénario, il faudrait que ce soit spectaculaire et subit pour qu'Ottawa se retrouve avec des difficultés à se financer.

La dette canadienne est la mieux notée par les agences de crédit et elle peut servir de refuge aux détenteurs de capitaux, en cas de choc. Ces détenteurs préfèrent les courtes échéances afin de pouvoir redéployer leurs billes quand ils trouveront un terrain de jeu plus profitable.

Il y a quelques années déjà, Ottawa a réalisé en outre des emprunts de précaution, au-delà de ses besoins immédiats. Leur produit est déposé à la Banque du Canada. Cette mesure prudentielle permettrait d'absorber durant quelques mois le choc d'un éventuel gel des liquidités sur le marché des emprunts.

En privilégiant les courtes échéances, Ottawa diminue le service de sa dette. Ainsi, il a dévoilé vendredi avoir dégagé un léger surplus de 700 millions pour les deux premiers mois de l'exercice 2016-2017. Dans la Revue financière, on apprend que les frais de la dette publique ont précisément diminué de 700 millions durant ces deux mois ! Il est d'ailleurs bon de rappeler que le laborieux retour à l'équilibre budgétaire en 2014-2015, après huit déficits d'affilée, est au moins autant attribuable à la chute des coûts du financement de la dette qu'aux économies générées par les coupes dans les dépenses de programmes.

En privilégiant les courtes échéances, Ottawa laisse aussi le champ libre aux provinces et aux sociétés dans les échéances de 10 ans et plus.

Les provinces ne peuvent offrir aux investisseurs un produit obligataire aussi liquide que celui proposé par Ottawa. Elles empruntent en tirant le meilleur parti possible des conditions de marché. Quand les taux longs sont faibles, comme maintenant, cela leur permet en outre de mieux planifier le service de leur dette.

Il arrive toutefois que des prêteurs institutionnels réalisent des transactions directes avec une province. Très souvent, c'est sur une échéance de moins de 10 ans que les parties tomberont d'accord.

Ainsi, en juillet, Québec a emprunté 1,9 milliard dans les échéances de six et sept ans, à taux variable, auprès de prêteurs individuels. En général, son emprunt est confié à un syndicat de preneurs fermes qui le refilent à des prêteurs qui ont manifesté leur intérêt.

Québec a aussi levé 500 millions et l'équivalent de 76 millions en dollars australiens pour une période de 10 ans.

Cela porte à 9,7 milliards ses emprunts depuis le 1er avril et représente 72 % de ses besoins pour l'exercice en cours. Aucune province n'est aussi avancée.

L'Ontario, qui doit lever 24,4 milliards cette année, a complété 43 % de son programme d'emprunts jusqu'ici.

Notons enfin qu'Hydro-Québec a aussi comblé la moitié de ses besoins de financement de 2 milliards au cours de la présente année civile.