Le directeur général des Hurricanes de la Caroline, Jim Rutherford, balaie du revers de la main les critiques soulevées par la mise sous contrat de l'attaquant russe Alexander Semin. Il se moque aussi des doléances de ceux qui prétendent que les 35 millions de beaux dollars qu'il versera à son nébuleux ailier droit au cours des cinq prochaines années représentent un gros gaspillage.

«Ça me fait toujours sourire quand j'entends des journalistes se soucier de la situation financière de mon équipe. Comme si l'argent que je dépense sortait de vos poches. Seul mon propriétaire, Peter Karmanos, a besoin de se préoccuper des dépenses. Et je peux t'assurer que j'ai non seulement obtenu son feu vert, mais qu'il est très heureux d'avoir Semin au sein de son équipe», m'a lancé le sympathique DG des Canes lors d'une conversation dans les gradins du Centre Bell, hier matin.

Un oeil sur la patinoire où Semin, les frères Staal et le reste des Hurricanes patinaient, un oeil sur son cellulaire qui n'en finissait plus de vibrer, Rutherford a esquissé un sourire lorsque je lui ai demandé s'il avait essuyé des remontrances de la part de ses homologues.

Si Peter Karmanos n'a pas fait une syncope en apprenant qu'il paierait 35 millions pour les services de Semin, plusieurs équipes en voudront aux Canes d'avoir établi une base de comparaison qui servira grandement la cause des Mike Ribeiro et autres attaquants en quête de lucratifs contrats au cours des prochains mois.

«J'ai reçu quelques appels. C'est un fait. Mais personne ne se plaignait. Contrairement à ce que tu crois, ils trouvaient même que cette entente était raisonnable.»

Parce que j'étais assis devant lui et qu'il semblait vraiment convaincant, j'ai cru Rutherford sur parole. Vous n'êtes pas obligé de m'imiter...

Courte probation

Ce ne sont pas tant les 7 millions que touchera Semin annuellement qui font tiquer autour de la LNH. C'est la durée du contrat. La sécurité associée aux cinq longues années de l'entente. Une sécurité qui pourrait faire plonger le Russe,qui vient d'avoir 29 ans, dans une oisiveté qu'on lui a plusieurs fois reprochée à Washington, où il a évolué pendant sept saisons avant de quitter les Capitals, l'été dernier.

Rutherford a d'ailleurs joué la carte de la prudence lorsqu'il a courtisé Semin sur le marché des joueurs autonomes l'année dernière. Disposé à lui offrir 7 millions, le DG des Hurricanes a limité à une seule saison la durée de son contrat.

«J'ai limité mon offre à une année, car je ne connaissais pas Semin. Je connaissais le joueur, son talent, sa capacité de marquer des buts. Pas l'homme derrière le joueur. J'entendais aussi tous les commentaires désobligeants sur son éthique de travail et sa personnalité. En moins de deux mois, il a dissipé tous les doutes», a plaidé le manitou des opérations hockey en Caroline.

Le lucratif contrat offert à Semin, ceux plus lucratifs encore offerts à Corey Perry (69 millions pour huit ans) et Ryan Getzlaf (66 millions pour huit ans) par les Ducks d'Anaheim tendent à démontrer que le lock-out qui a amputé la saison 2012-2013 de 34 matchs n'a servi à rien. Ou à pas grand-chose.

«Je ne suis pas d'accord. Ces contrats sont importants. Les sommes sont colossales, mais il faut les voir comme un investissement. Il faudra donc attendre de voir ce que ces investissements rapporteront avant de sauter aux conclusions. Dans notre cas, nous sommes convaincus d'avoir pris la bonne décision.»

Limité à 54 points lors de ses deux dernières saisons (65 et 77 parties disputées) à Washington, Alexander Semin affichait 10 buts et 34 points en 33 rencontres avant d'affronter le Canadien au Centre Bell.

Il est devenu le bras droit du capitaine Eric Staal, qui impose sans l'ombre d'un doute un leadership plus convaincant que ne le faisait Alexander Ovechkin à Washington. Sans oublier l'influence évidente des Kirk Muller, Rod Brind'Amour et Ron Francis au sein de l'état-major des Hurricanes.

Rivalités à bâtir

Rentrés en Caroline au cours de la nuit, les Hurricanes croiseront les Capitals de Washington ce soir. Des Capitals avec qui les Canes se battent pour tenter de rejoindre les Jets de Winnipeg et accéder aux séries éliminatoires. Des Caps avec qui les Hurricanes feront le saut l'an prochain dans la nouvelle division que je vais appeler Atlantique, faute de nom officiel.

«Le réaménagement des divisions nous compliquera la tâche sur le plan hockey, alors que le niveau de compétition sera très élevé. Mais c'est un beau défi pour nous. Et les nouvelles rivalités avec Pittsburgh, Philadelphie et les clubs de la région de New York devraient mousser la popularité du hockey dans notre marché. J'aime la redéfinition des divisions. Je n'aime pas la formule des séries. J'aurais préféré qu'on revienne avec des duels entre les quatre équipes de tête de chaque division. Cela aurait aussi aidé à maximiser les rivalités, tout en minimisant les déplacements.», a plaidé Rutherford.

L'ennui avec l'ancien système, c'est que les printemps ramenaient des confrontations prévisibles. Montréal et Boston, tout comme Québec et Hartford s'affrontaient souvent - peut-être même trop - en première ronde dans l'ancienne division Adams, avant que les Whalers ne deviennent les Hurricanes.

Avant de parler des séries de l'an prochain, Jim Rutherford est beaucoup plus préoccupé par celles qui approchent et que son équipe pourrait rater.

«Les blessures - Cam Ward, Pitkanen, Larose, Skinner, Faulk - nous ont minés toute l'année. C'est difficile de se faire justice quand tu es contraint à faire appel à ton troisième gardien soir après soir. Regardez ce qui est arrivé aux Devils après la perte de Martin Brodeur. Malgré tout, on est encore dans la course. J'ai beaucoup de discussions, mais je serais surpris de faire de gros coups d'ici la fin de la période des transactions. Notre objectif est de profiter des retours graduels des blessés pour accéder aux séries et de compter sur Cam Ward et une équipe en santé une fois rendus là.»

Depuis leur conquête de la Coupe Stanley, en 2006, jusqu'au retour de la saison annulée par l'avant-dernier lock-out, les Hurricanes ont accédé une seule fois aux séries, qu'ils pourraient rater pour une quatrième année consécutive.