Après les gouvernements centraux et régionaux, c'est au tour des villes, aux États-Unis et en Espagne notamment, de connaître de graves problèmes budgétaires.

La crise immobilière, qui a donné des sueurs froides aux banquiers, aux chefs d'État et aux investisseurs, fait maintenant faire des cauchemars à des centaines de maires dans plusieurs pays.

Aux États-Unis, la situation budgétaire des administrations municipales est à son pire en 25 ans, selon une étude publiée la semaine dernière.

La National League of Cities (NLC), organisme représentant des centaines de municipalités américaines, a sondé plus de 300 de ses membres durant l'été. Son rapport est plutôt alarmant: pour la première fois depuis des années, les revenus de taxation des villes sont en baisse et le pire est à venir.

Le monde municipal prévoit ainsi recueillir, en moyenne, 3,2% de taxes en moins cette année - la plus forte baisse depuis que la NLC a commencé ses sondages en 1985. Et pour équilibrer les finances, on prévoit des coupes budgétaires d'au moins 2,3%.

Cette perte de revenu est énorme dans la mesure où les recettes foncières avaient grimpé de 4,9% en 2009, sans oublier que les administrations municipales ont largement profité du boom immobilier au début des années 2000. Le vent a donc tourné brusquement.

Les effets de la crise immobilière, qui a provoqué une crise financière mondiale, ont pris du temps à se faire sentir en ce qui concerne cet ordre gouvernemental parce que, comme on le sait, les taxes municipales sont basées sur l'évaluation foncière, laquelle prend un certain temps à s'ajuster à la valeur marchande des propriétés.

2011 et 2012

Aussi, les problèmes ne font que commencer car le plein impact de la chute des prix des maisons ne sera visible sur les avis d'imposition qu'en 2011 et 2012, selon la NLC.

Résultat: la majorité des municipalités américaines prévoient réduire leurs services ou leurs effectifs en 2010, ce qui entraînera la perte de 480 000 emplois, affirme l'organisme.

Plusieurs d'entre elles devront aussi hausser les frais de certains services ou augmenter les taxes, causant une autre ponction dans le budget déjà serré des familles américaines.

Les ennuis budgétaires des villes américaines ont des échos jusque sur les marchés financiers: les rendements exigés sur les obligations municipales sont en nette hausse, reflet de l'inquiétude grandissante des investisseurs, ce qui complique d'autant la vie des administrations publiques.

On a même frôlé la panique, il y a quelques jours, lorsque Harrisburg, la capitale de la Pennsylvanie, a dû demander l'aide de l'État... pour payer les salaires de ses employés. Un vrai cauchemar. Le Michigan, le New Jersey et la Californie ont dû aussi brancher des dizaines de villes sur le respirateur artificiel.

Muchos problemas

Or, il n'y a pas que les maires américains qui ont des maux de tête. En Espagne, où les prix des maisons ont également plongé, la crise budgétaire municipale menace toute l'économie.

Selon des médias espagnols, des municipalités sont même incapables de payer leurs fournisseurs, qui leur ont vendu des matériaux de construction ou des services.

Si bien que la dette impayée d'environ 8000 municipalités du pays envers le secteur privé dépasse les 18 milliards de dollars (13 milliards d'euros), soit le tiers des emprunts des villes, selon la banque centrale espagnole.

La firme de courtage UBS, citée par le Wall Street Journal, prévient que la dégradation des finances municipales menace la fragile reprise en Espagne et pourrait obliger le gouvernement central à intervenir avec un plan de sauvetage. Un scénario que Madrid veut absolument éviter, avec les agences de crédit qui attendent la première occasion pour abaisser une autre fois la cote d'emprunt espagnole.

La déroute municipale menace aussi d'autres pays. Au Royaume-Uni, on a appris jeudi que les prix des maisons sont repartis à la baisse (-3,6% en septembre, selon Halifax), laissant craindre un «double dip» immobilier. Une bien mauvaise nouvelle pour les villes qui n'ont plus un penny en poche.

D'ailleurs, l'exaspération est évidente chez les Britanniques, qui souffrent beaucoup de la crise financière. Les élus, à court de solutions, ont récemment invité la population à soumettre leurs idées pour réduire les dépenses de l'État, à tous les niveaux.

Les propositions incluent: vendre aux enchères le matériel usagé des administrations publiques, obliger les détenus à cuisiner pour les hôpitaux et, pourquoi pas, maîtriser l'énergie dépensée sur les tapis roulants dans les «gyms» pour produire de l'électricité. La première «vente de garage» de Buckingham Palace ne devrait pas tarder...