Lundi dernier, 26 juillet 2010. Theratechnologies publie un communiqué pour annoncer qu'un ancien actionnaire a déposé une requête pour autorisation d'exercer un recours collectif contre la société et certains de ses dirigeants. «Cette personne allègue que Theratechnologies n'a pas rempli ses obligations à titre d'émetteur assujetti en ne divulguant pas un changement important.»

Quel était ce «changement important» que la direction de Theratechnologies n'a pas jugé bon de commenter par voie de communiqué alors que le titre s'effondrait de 58%?

Retour sur une catastrophique histoire boursière.

Mardi 25 mai 2010. Bien avant l'ouverture de la Bourse, la FDA (Food and Drug Administration) diffuse sur son site internet les points majeurs sur lesquels les dirigeants de Theratechnologies seront interrogés au cours de leur témoignage (le 27 mai) devant un comité de la FDA portant sur la demande d'homologation du médicament vedette de la société, la tésamoréline. Des agences de presse économiques repiquent la nouvelle du site de la FDA et laissent entendre que la tésamoréline risque de provoquer le diabète.

La direction de Thera-technologies (TH) ne réagit pas à la publication de cette nouvelle de la FDA. Aucun communiqué n'est publié pour expliquer aux actionnaires le questionnement de la FDA, et aucune demande d'arrêt de transactions n'est acheminée à la Bourse de Toronto pour empêcher un effondrement du titre.

Ainsi, aucune réaction de la part des dirigeants de Theratechnologies, comme si cette nouvelle de la FDA ne représentait pas, en vertu de la Loi sur les valeurs mobilières, un «fait important dont il est raisonnable de s'attendre qu'il aura un effet appréciable» sur le cours du titre. Qui dit «fait important» dit obligation de la part d'une société de publier un communiqué.

Alors que la direction de Theratechnologies ne juge pas la nouvelle de la FDA assez importante pour publier un communiqué ou demander un arrêt de transactions, le monde de la Bourse, lui, se lance dans une folle spéculation. Conséquence? Dès l'ouverture de la séance du 25 mai, le titre de Theratechnologies s'effondre. Et il fera l'objet d'une spéculation débridée qui perdurera jusqu'au lendemain.

La question à 10 millions

Les petits investisseurs ont-ils une chance de se faire dédommager pour les pertes subies en Bourse à la suite de l'effondrement artificiel d'un titre attribuable à une carence d'information de la part de l'entreprise?

Voilà l'intérêt de la re-quête pour autorisation d'un recours collectif contre Theratechnologies que les avocats de l'investisseur Roger St-Germain viennent de déposer au nom de tous les actionnaires de la société qui ont encaissé de lourdes pertes (autour de 10 millions de dollars) en vendant leurs actions au cours des tumultueuses séances des 25 et 26 mai derniers.

À la suite de la publication de la nouvelle laissant entendre que la tésamoréline pouvait provoquer le diabète, le titre de Theratechnologies a eu le temps, en l'espace de 24 heures, de chuter de 58% (de 4,37$ à un creux de 1,83$) pour exploser par la suite de 94%, de 1,83$ à 3,55$. Et deux jours plus tard, l'action bouclait la semaine à 4,85$, en hausse de 10% par rapport à la fermeture de la précédente semaine.

Roger St-Germain, lui, fait partie des actionnaires de Theratechnologies qui ont littéralement paniqué et a liquidé ses 190 000 actions au pire moment de la séance, subissant ainsi une perte de 271 000$ par rapport à la précédente clôture du titre. M. St-Germain n'est pas le seul actionnaire à avoir cédé à la panique. Au cours de la séance du 25 mai, 4 millions d'actions ont changé de mains, soit 40 fois le volume quotidien habituel. Le lendemain, 2 millions d'actions ont changé de propriétaire.

Quels sont les arguments évoqués par M. St-Germain pour réclamer le droit de déposer un recours collectif contre Theratechnologies dans le but de se faire dédommager pour les lourdes pertes subies lors de l'écrasement du titre en Bourse?

Il reproche aux dirigeants de l'entreprise d'avoir omis de divulguer et d'expliquer par voie de communiqué (avant l'ouverture de la séance du 25 mai) les importantes informations concernant les points majeurs (dont le risque de contracter le diabète) sur lesquels la FDA allait les interroger au cours de la rencontre du 27 mai.

Il leur reproche de ne pas avoir demandé, juste avant l'ouverture de la séance catastrophique du 25 mai, un arrêt des transactions, et ce, jusqu'à la fin de la rencontre des dirigeants de Theratechnologies avec la FDA. Cela aurait empêché les actionnaires de céder à la panique et de liquider leurs actions à prix dérisoire.

Comme on sait, au cours de la réunion du 27 mai, les membres de la FDA ont finalement voté à l'unanimité en faveur de l'homologation de la tésamoréline. Ce qui a permis au titre de rebondir au-dessus du prix d'avant... le feuilleton boursier.