Un État relativement peu endetté, avec des réserves pour les temps difficiles. Oui, ça existe: le Chili, grâce à un bas de laine tout «rouge» de 12 milliards US, a aussi les moyens de se relever du terrible séisme qui a secoué le pays.

Le tremblement de terre meurtrier qui vient de ravager le Chili, faisant plus de 500 morts, aurait causé des dommages pouvant atteindre 30 milliards US, selon des études.

C'est un choc énorme, qui équivaut à près de 15% de l'économie chilienne. C'est comme si une catastrophe infligeait pour 130 milliards de dollars de dégâts au Canada.

L'économie chilienne sera donc durement touchée à court terme par ce séisme, vu les dommages causés aux infrastructures du pays, disent les experts.

Mais le «Jaguar de l'Amérique latine», surnom inspiré des Tigres et Dragons asiatiques, est l'un des pays les plus stables du sous-continent. En fait, le Chili cultive depuis des années de solides traditions économiques qui devraient lui permettre de se remettre rapidement de cette crise.

Dans une note financière datant d'avant le séisme, Stantard&Poor's y allait d'ailleurs de ces remarques: le Chili, qui jouit de la meilleure cote de crédit d'Amérique latine, a «un système politique stable» et une «économie faiblement endettée et bien armée pour résister au déclin (de l'économie mondiale)».

Preuve de cette bonne gestion: l'argent de la relance se trouve déjà, en bonne partie, dans le Fonds de stabilisation économique du Chili - une jolie cagnotte estimée à 12 milliards CAN par la firme américaine Goldman Sachs.

Un bas de laine «rouge»

D'où vient cet argent, demande-t-on dans les pays lourdement endettés de l'hémisphère nord? Du cuivre.

Le Chili est le champion mondial de ce secteur, avec plus du tiers de la production du métal «rouge», la couleur du cuivre à l'état naturel.

Avec beaucoup de sagesse, Santiago a constitué il y a quelques années un fonds «pour les mauvais jours», qui cumule une part des bénéfices de l'entreprise d'État, la Codelco, premier producteur de cuivre du pays.

Et la bonne nouvelle, c'est que le séisme a épargné les mines de cuivre, surtout situées dans le nord du pays. Elles ont d'ailleurs rapidement repris leur production. Si bien que le prix du cuivre, qui avait bondi de 5% au lendemain des secousses meurtrières, est vite revenu à son point de départ.

Certes, les Chiliens ont dû - mais modérément - puiser dans leur bas de laine pour faire face à la crise financière. Il y a un an, la présidente Michelle Bachelet, qui termine son mandat cette semaine, avait annoncé un plan de 4 milliards US (2,8% du PIB) pour contrer les effets de la récession. Sans cet effort, la contraction de l'économie chilienne, de 1,6% en 2009, aurait été bien pire.

Mais le fonds d'urgence chilien est encore bien garni. Aussi la croissance devrait-elle atteindre 5,5% cette année, ce qui est meilleur que la prévision de 5% avancée avant le séisme, grâce aux efforts de reconstruction, prédit la firme JP Morgan.

Quand le cuivre va...

À moins d'une mauvaise gestion de la crise par l'État ou de l'effondrement de l'économie mondiale, le Chili peut alors espérer des jours meilleurs.

Car le cuivre profitera de la reprise qui est actuellement en cours sur la planète. Le métal rouge est utilisé dans la construction, le secteur automobile et les technologies qui font intervenir des câbles électriques. En bref, un bon indicateur de l'économie.

Mais le nouveau président chilien, Sebastian Piñera, fait face à de grands défis. D'abord le cours du cuivre, qui a bondi de presque 150% l'an dernier grâce aux achats des Chinois et aux spéculateurs, a subi une forte correction dans les derniers temps, menaçant le renflouement du fonds d'urgence chilien.

De plus, le Chili a besoin d'adopter des politiques plus efficaces sur les plans de la concurrence, de l'innovation et de l'éducation, affirme l'OCDE dans un récent rapport.

La pauvreté et les inégalités demeurent aussi élevées dans ce pays, où le revenu par habitant équivaut encore à moins de la moitié de la moyenne des pays riches.

On peut néanmoins être optimiste. Le cuivre est, avec l'or, le premier métal à avoir été utilisé par l'homme: des objets en cuivre datant de 8700 avant J.-C. ont été trouvés au Moyen-Orient. C'est donc une découverte très ancienne, encore prisée par le monde industriel, dont la valeur a encore augmenté depuis la dernière tragédie.