Le gouvernement Charest a déposé lundi sa proposition en vue du renouvellement des conventions collectives des 262 000 employés des secteurs public et parapublic. Les représentants du front commun des centrales syndicales ont tout de suite constaté le «décalage énorme» entre cette proposition et leurs demandes. Malgré la largeur du fossé qui les sépare, le ton modéré employé par les parties laisse croire qu'une entente est possible. D'ailleurs, certaines modalités des offres du gouvernement pourraient paver la voie à un tel accord, accord qui serait mille fois préférable à l'imposition de contrats de travail par loi spéciale.

La présidente du Conseil du Trésor, Monique Gagnon-Tremblay, propose des conventions collectives de cinq ans au cours desquelles la rémunération des syndiqués croîtrait de 7%, pour une hausse annuelle moyenne de 1,4%. Toutefois, cette hausse comprend non seulement le salaire, mais la contribution de l'employeur aux régimes de retraite, l'équité salariale et diverses primes. Coût total la cinquième année: 2,3 milliards.

 

Les demandes syndicales sont évidemment beaucoup plus élevées. Seulement au chapitre des salaires, elles visent une augmentation de 11,25% sur trois ans, soit 3,75% par année. Coût la dernière année: 3,8 milliards.

Or, on sait que la marge de manoeuvre de l'État québécois est microscopique. Pour contenir la croissance du déficit, le gouvernement prévoit augmenter ses dépenses de programmes de seulement 3,2% par an. Cela signifie qu'outre la Santé et l'Éducation, les autres missions de l'État subiront des compressions substantielles. Dans ce contexte, il est impossible d'augmenter beaucoup la rémunération (55% des dépenses). Toute hausse importante entraînera des compressions plus dures encore et une augmentation du fardeau fiscal et tarifaire supporté par les Québécois.

Mme Gagnon-Tremblay a ouvert deux pistes intéressantes. Le gouvernement se dit prêt à convenir d'une formule selon laquelle, lors des deux dernières années du nouveau contrat, l'augmentation des salaires serait plus importante si la croissance économique dépassait 4,2%. Ce seuil est élevé, mais pourra sans doute être négocié à la baisse. Les syndiqués auront au moins l'espoir de voir leur sort s'améliorer lorsque la situation financière du gouvernement sera rétablie.

Québec propose aussi de revoir l'organisation du travail, notamment dans la Santé et dans l'Éducation, de façon à la rendre plus souple. Les sommes ainsi économisées seraient consacrées à l'amélioration des conditions de travail des employés.

Ces deux modalités indiquent que le gouvernement Charest souhaite trouver des moyens pour maintenir le pouvoir d'achat de ses employés, autant que faire se peut. Le front commun syndical doit saisir cette perche.

De part et d'autre, on a avantage à ce que ces négociations se concluent par un accord. C'est aussi dans l'intérêt de la population québécoise.