Pourquoi le prix de l'essence, dans une localité donnée, est-il identique ou presque d'une station-service à l'autre?

Pourquoi le prix de l'essence, dans une localité donnée, est-il identique ou presque d'une station-service à l'autre?

Réponse de l'ancien propriétaire de la station située en bas de ma rue: «Parce que les poteaux des stations-service, soit le rouge, le jaune, le bleu et le vert s'appellent dès le moindre changement de prix. Ils peuvent s'appeler deux, trois fois par jour. Ça dépend des semaines!»

J'ai eu beau raconter publiquement cette anecdote sur la communication des «poteaux d'essence» pour fixer le prix à la pompe maintes fois, jamais les organisations chargées de surveiller le prix de l'essence à la pompe n'y voyaient le moindre soupçon de cartel Que ce soit la Régie de l'énergie, le Bureau fédéral de la concurrence ou les ministères responsables des ressources et de l'énergie.

Eh bien! ce temps est maintenant révolu. Le Bureau de la concurrence du Canada vient de porter des accusations criminelles contre 13 individus et 11 entreprises impliquées dans la fixation des prix de l'essence dans les marchés de Victoriaville, Thetford Mines, Magog et Sherbrooke. Quatre des accusées ont déjà plaidé coupable.

Tout ce beau monde faisait le plein d'argent sur le dos des automobilistes et ce, grâce à la mise sur pied d'une sorte de cartel de l'essence impliquant les grandes bannières, telles Shell, Esso, Ultramar, Petro-Canada, etc.

Comme vous le savez sans doute, les entreprises canadiennes n'ont pas le droit de créer des cartels dans le dessein de fixer les prix des produits et services. Cela vaut pour toutes les entreprises, que ce soit des pétrolières, des banques, etc.

Au sujet de l'essence au Québec, deux organismes y jouent particulièrement les chiens de garde, soit la Régie de l'énergie du Québec et le Bureau fédéral de la concurrence.

Pendant que la Régie joue un certain rôle dans la fixation des coûts d'exploitation devant être supportés par les détaillants des stations-service, le Bureau de la concurrence, lui, enquête sur les plaintes déposées contre l'industrie pétrolière. On parle ici de plaintes portant notamment sur des complots de fixation et de maintien des prix des produits pétroliers et sur des agissements abusifs de la part de telle ou telle entreprise.

Au cours des 10 dernières années, le Bureau de la concurrence a mené dans l'ensemble du Canada six enquêtes à la suite de plaintes sérieuses qui portaient sur la création de cartels de l'essence. À chaque fois, le Bureau de la concurrence a été contraint de fermer les dossiers, faute de preuves suffisantes pour porter des accusations.

Le porte-parole du Bureau de la concurrence, Donald Plouffe, a indiqué à La Presse que la précédente accusation de cartel dans le secteur de l'essence remonte à 1955. Elle visait des entreprises de la Colombie-Britannique.

Depuis la création du Bureau de la concurrence, institution centenaire, ajoute M. Plouffe, 13 enquêtes ont été menées sur le prix de l'essence et du mazout. Résultat, huit condamnations criminelles de fixation et maintien de prix ont été prononcées.

La présente enquête du Bureau de la concurrence sur les allégations de fixation des prix de vente au détail de l'essence vise également d'autres villes et provinces au Canada.

Il faut s'attendre à ce que d'autres accusations de cartel soient portées au fil des prochains mois au Canada au sujet de l'essence.

Maintenant, n'allons pas croire que l'intervention du Bureau de la concurrence va faire descendre les prix. L'OPEP et les multinationales pétrolières n'en ont rien à foutre des enquêteurs du Canada. Et les grands spéculateurs des marchés pétroliers, encore moins.