Au moment où la Ville de Montréal songe à imposer un péage pour pousser les automobilistes à laisser leurs voitures à la maison, Statistique Canada nous apprend qu'en matière de dépendance à l'automobile et de transports en commun, les Montréalais ont déjà une longueur d'avance sur les citadins des autres grandes villes canadiennes.

Au moment où la Ville de Montréal songe à imposer un péage pour pousser les automobilistes à laisser leurs voitures à la maison, Statistique Canada nous apprend qu'en matière de dépendance à l'automobile et de transports en commun, les Montréalais ont déjà une longueur d'avance sur les citadins des autres grandes villes canadiennes.

Une étude publiée cette semaine dans Tendances sociales canadiennes, une revue spécialisée de l'agence, montre que Montréal détient un double championnat: d'une part, les déplacements en voiture y sont moins fréquents que n'importe où ailleurs au pays; d'autre part, c'est à Montréal que les transports en commun sont le plus populaires.

Le chercheur Martin Turcotte, auteur de l'étude, a examiné les déplacements des résidents des huit plus grandes agglomérations urbaines du Canada: ce sont, par ordre de grandeur, Toronto, Montréal, Vancouver, Ottawa-Gatineau, Calgary, Edmonton, Québec et Winnipeg. Nous parlons ici des régions métropolitaines de recensement, ce qui signifie, dans le cas de Montréal, non seulement la ville centre, mais aussi la Rive-Sud, Laval et la couronne nord.

Ses chiffres sont basés sur l'Enquête sociale générale de 2005 et bien qu'ils datent déjà de quelques années, ce sont les plus récents disponibles.

L'étude se penche sur les déplacements des personnes âgées de 18 ans et plus. Elle contient des ventilations en fonction de la densité de la population, la distance du lieu de travail, l'âge, le sexe, le revenu, le niveau de scolarité, le nombre d'enfants, le lieu de résidence, entre autres. Il en résulte le portrait le plus complet jamais publié sur la question.

D'entrée de jeu, l'auteur reconnaît que la plupart des Canadiens ne pourraient tout simplement pas se passer de leur voiture. «Les parents de jeunes enfants en savent quelque chose, eux qui doivent souvent, dans une même journée, se rendre au travail et en revenir, aller reconduire les enfants à la garderie ou à leurs activités du soir, se rendre à un rendez-vous, faire des courses et parfois plus encore», écrit-il. Difficile de faire tout cela en autobus!

Dans ces conditions, il ne faut pas s'étonner que 87% des Canadiens font au moins un déplacement en voiture lors d'une journée typique. Chez ceux qui résident à plus de 20 kilomètres du centre-ville, cette proportion grimpe à près de 93%.

Dans la grande région de Montréal, cette proportion baisse à 65%. C'est le meilleur score au Canada, suivi de très près, il faut le dire, par Toronto, avec 66%. La pire ville au Canada est Edmonton, en Alberta, où 77% des gens utilisent l'automobile au moins une fois par jour. Le score d'Ottawa-Gatineau est de 71%, celui de Québec, 74%.

Ces chiffres peuvent sembler assez bas quand on sait, comme on vient de le voir, que la moyenne canadienne se situe à 87%. C'est que les huit grandes agglomérations abritent la moitié de la population du pays. L'autre moitié abrite des villes plus petites, ou des régions rurales où les transports en commun sont souvent rudimentaires, parfois même inexistants. L'automobile devient alors une nécessité.

Pour ce qui est des transports en commun, Montréal l'emporte haut la main. Au cours d'une journée typique, 18% des Montréalais utilisent les transports en commun au moins une fois. Ce chiffre peut sembler assez maigre, mais il faut savoir que Montréal distance assez nettement Toronto (16%) et Ottawa-Gatineau (15%), Dans les autres grandes villes canadiennes, le moins que l'on puisse dire, c'est que les transports en commun n'ont pas la cote: seulement 12% d'utilisateurs à Calgary et à Vancouver, 10% à Winnipeg, 9% à Edmonton et à Québec.

Certes, il y a encore beaucoup de place pour réduire la pollution automobile à Montréal. Mais les autres villes sont bien mal placées pour lui faire la leçon.

Comme il faut s'y attendre, les comportements varient considérablement selon que l'on habite la ville ou la banlieue. Nous avons vu plus haut que 65% des habitants de la région de Montréal font au moins un déplacement en automobile par jour; dans la ville centre, ce pourcentage baisse à 43%; chez les banlieusards, il grimpe à 73%. De la même façon, 30% des habitants de la ville centre utilisent les transports en commun, contre 14% des banlieusards.

Pourquoi existe-t-il un tel écart entre Montréal et les autres grandes villes? Laissons le mot de la fin à M. Turcotte. «La faible densité des quartiers est associée à une plus grande utilisation de la voiture, écrit-il. Le fait que Montréal soit une ville plus âgée, déjà bien établie avant que l'automobile ne devienne omniprésente comme aujourd'hui, pourrait expliquer cette différence».