Au premier coup d'oeil, 43 ans après la fusion des 14 municipalités de l'île Jésus, l'expérience lavalloise est une réussite.

Au premier coup d'oeil, 43 ans après la fusion des 14 municipalités de l'île Jésus, l'expérience lavalloise est une réussite.

Le taux d'emploi, qui mesure la proportion d'adultes de 15 ans et plus occupant un emploi, est un des meilleurs indicateurs de la santé économique d'une région.

Ce taux se situe à 64,3 % à Laval, contre une moyenne québécoise de 60,6 % (cette chronique utilise principalement les chiffres les plus récents de l'Institut de la statistique du Québec).

Et il s'agit de bons emplois.

Le revenu médian d'un ménage de deux personnes, à Laval, atteint 46 400$, soit 8,2 % de plus que la moyenne provinciale de 42 900$.

Laval compte pour 5 % de la population québécoise. Pourtant, en 2007, la ville compte pour 7 % de la valeur des permis de bâtir dans le secteur résidentiel au Québec, 8 % dans le commercial et 10 % dans l'industriel.

Une ville en plein essor, quoi !

On pourrait multiplier les exemples.

Le taux d'assurance emploi, par exemple (la proportion de la population en âge de travailler et touchant des prestations d'assurance emploi) est de 7,6 % dans l'ensemble du Québec, mais seulement 4,4 % à Laval.

Et ainsi de suite ...

C'est beaucoup de chemin parcouru depuis le 6 août 1965, date à laquelle le gouvernement de Jean Lesage impose la fusion.

Du coup, Laval se retrouve au deuxième rang des villes les plus populeuses du Québec avec 170 000 habitants.

Elle perdra ce statut en 2002, avec les fusions de Québec et de Longueuil. N'empêche : elle abrite aujourd'hui 380 000 habitants, ce qui en fait la quatrième ville du Québec.

Elle est même jugée assez importante pour détenir, à elle seule, le statut de région administrative.

Mais les statistiques ne disent pas tout. Les beaux chiffres que nous venons de voir sont en grande partie artificiels.

L'enquête sur la population active, qui mesure les taux d'emploi, d'activité et de chômage, est basée sur le lieu de résidence, et non sur le lieu de travail.

Un résidant de Laval qui décroche un emploi à Montréal contribue à faire baisser le taux de chômage à Laval, pas à Montréal. Or, des dizaines de milliers de Lavallois traversent les ponts chaque jour pour travailler à Montréal.

Certes, il existe aussi des emplois à Laval, mais pas en quantité suffisante pour fournir du travail à tous les Lavallois.

D'ailleurs, son produit intérieur brut (PIB), c'est-à-dire la valeur de le l'ensemble des biens et services produits sur le territoire lavallois, fait 4,1 % du PIB québécois, chiffre inférieur à son poids démographique.

De plus, si plusieurs indicateurs économiques de Laval sont au beau fixe, on ne peut en dire autant de certains indicateurs sociaux.

Le taux de décrochage au secondaire est de 26,7 % à Laval, sensiblement plus élevé que la moyenne québécoise de 24,2 %.

Sur le plan de la santé, Laval compte 139 médecins par tranche de 100000 habitants, contre une moyenne provinciale de 209. C'est encore pire chez les médecins spécialistes : 58 à Laval, contre une moyenne québécoise de 108.

Sans compter que Laval, quatrième ville du Québec, ne possède pas de quartier historique significatif ou de centre-ville animé et allumé, contrairement à Montréal, Québec ou Longueuil.

Certes, la plupart des anciennes municipalités de l'île Jésus ont conservé un petit secteur historique intéressant, que les autorités lavalloises essaient bien de mettre en valeur (on peut les apprécier en se procurant la brochure Marcher et découvrir Laval, distribuée gratuitement par la Ville).

Mais cela n'a absolument rien à voir avec la richesse patrimoniale du Vieux-Montréal ou du Vieux-Québec.

Quant au centre-ville lavallois, 43 ans après la fusion, il demeure toujours une vision de l'esprit.

Le maire Lucien Paiement, dans le temps, rêvait d'un centre-ville tout neuf dans le coin de Place Laval, mais pour toutes sortes de raisons, le projet n'a jamais décollé.

Le centre d'intérêt s'est ensuite déplacé plus à l'ouest, à l'intersection des autoroutes 15 et 440, où on a construit une profusion d'hôtels et de centres commerciaux, ainsi qu'un centre de congrès. Mais on peut difficilement qualifier de «centre-ville» ce spaghetti d'autoroutes et cet assemblage hétéroclite d'édifices sans âme où il est à peu près impossible de se déplacer à pied.

Le maire Gilles Vaillancourt, qui détient le record de longévité à ce poste et qui connaît ses dossiers sur le bout des doigts, nous parle de déplacer le centre-ville, cette fois-ci vers le sud, près du métro.

Espérons que cette fois-ci sera la bonne.