La récession qui balaie les pays riches risque de frapper les économies émergentes comme un tsunami. Et les victimes sont surtout nos fournisseurs internationaux.

La récession «made in the USA» cause de plus en plus de ravages en Asie et dans les régions les plus pauvres.

La baisse de la consommation des Américains est en train de décimer l'armée de fournisseurs internationaux qui desservent les États-Unis et les autres pays riches. Et ce sont surtout les sous-traitants en provenance des pays en développement qui sont touchés.

Dans le secteur crucial du vêtement - si important pour les économies peu développées - la cohorte de fournisseurs étrangers qui exportent sur le marché américain a chuté de 72%... en l'espace d'un seul trimestre.

Leur nombre est passé de 22 099 en juillet dernier à seulement 6262 en octobre, selon la firme Panjiva, qui compile ces données à partir des bons de commande du secteur maritime.

Et les fournisseurs étrangers qui font encore des affaires avec les Américains n'ont droit qu'à des miettes: pour plus du tiers d'entre eux, la baisse des ventes aux États-Unis dépasse les 75% depuis l'été. Une catastrophe.

Dans un communiqué, le président de Panjiva, Josh Green, affirme que ces chiffres «brossent un portrait terrifiant de la situation des fournisseurs du monde». Peu connu des consommateurs, Panjiva est un nom familier pour les géants du commerce de détail, dont La Baie, qui utilisent les services de cette firme. La récession n'épargne personne, même un géant comme la Chine.

Le gouvernement chinois a récemment estimé que 67 000 usines - tous secteurs confondus - ont fermé au premier semestre 2008. Et la crise économique était alors encore jeune.

Qui plus est, l'intérêt de l'Occident pour les économies émergentes est en train de fondre comme neige au soleil.

Les investissements directs étrangers en Chine, une région "hot" il n'y a pas si longtemps, ont chuté de 37% (en glissement annuel), en novembre, après une légère baisse en octobre et une hausse 35% pour les 10 premiers mois de 2008.

La Banque mondiale en alerte

Pas surprenant que la Banque mondiale dresse un tableau pessimiste de l'économie de la planète pour 2009. On s'inquiète surtout du sort des plus pauvres.

L'organisme prévoit une croissance extrêmement faible, mais aussi des échanges commerciaux en recul, laissant craindre une crise sans comparaison depuis 50 ans.

L'économie mondiale croîtrait de 0,9% seulement, tandis que le volume des échanges reculerait de 2,1%.

La croissance serait de 4,5% dans les pays en développement, tandis que le produit intérieur brut des pays développés se contracterait de 0,1%.

Une croissance de 4,5% peut sembler considérable, vue de notre coin du monde. Mais pour les pays en développement, «un point de pourcentage en moins de croissance signifie qu'environ 20 millions de personnes perdront une occasion de se sortir de la pauvreté», souligne l'économiste en chef de la Banque mondiale, Justin Lin.

Déjà 100 millions de personnes ont été poussées vers la pauvreté du fait des prix élevés des aliments et du pétrole récemment, évalue l'organisme.

Mati���¨res premi���¨res: pas de p���©nurie

Sur une note plus positive, la Banque mondiale a par ailleurs ramené les pendules à l'heure concernant les ressources naturelles.

Plusieurs experts, qui pronostiquaient une éventuelle pénurie de matières premières lors de la toute récente flambée des prix du pétrole, des métaux et des aliments, vont en tomber à la renverse.

Dans son rapport annuel, la Banque mondiale soutient que le scénario «d'une quasi-pénurie de matières premières dont les prix seront plus élevés et en constante progression» semble «peu probable». Et ce, tenez-vous bien, pour les 20 ou 30 prochaines années!

La raison? La croissance plus lente de la population mondiale et des revenus va entraîner une baisse de la demande.

Et l'offre de pétrole? La demande continuera à croître pour atteindre 114 millions de barils par jour d'ici à 2030 contre 87 millions aujourd'hui. Mais les réserves de brut vont demeurer «incroyablement constantes» - à environ 40 années de production. Et ce, parce que les énergies de substitution (éolien, solaire, etc.) vont se multiplier malgré tout.

Mais les denrées alimentaires, alors? On ne risque pas de manquer de nourriture, sauf en Afrique, malheureusement, soutient Andrew Burns, économiste.

«Dans le monde entier, la production agricole progressera de 2,1% par an et la demande de 1,5% seulement», prédit le spécialiste. Au moins, voilà un scénario encourageant.