La campagne électorale qui s'achève aux États-Unis aura été un moment historique pour les femmes.

Pour la première fois, elles ont réellement été au coeur des discussions, et pas seulement à cause de la couleur de leur rouge à lèvres.Bien sûr, on a parlé des rides d'Hillary Clinton, de la coupe de ses tailleurs et du timbre de sa voix. On a aussi commenté l'apparence de Michelle Obama et de Cindy McCain. Quant à l'apparition de Sarah Palin dans le décor, elle aura déclenché un véritable flot de commentaires esthético-capillaires qui n'ont pas beaucoup contribué à la vie démocratique américaine.

Malgré tous ces propos plus ou moins superficiels, il reste qu'on a longuement et sérieusement discuté de questions concernant les femmes. C'est réjouissant.

Les femmes seront plus nombreuses que les hommes à voter mardi prochain, environ neuf millions de plus. Leur vote fera la différence. C'est pourquoi on a sondé leur âme durant des mois: de la soccer mom à la hockey mom en passant par la Wal-Mart mom, leurs choix ont été décortiqués et analysés en profondeur.

On a discuté de leurs valeurs, de leur opinion en matière d'avortement, de leurs habitudes de consommation ainsi que de leur façon d'élever leurs enfants. Les débats ont été passionnants et franchement, on émerge de cette campagne avec l'impression de mieux connaître les Américaines.

La présence de candidates dans la course a en outre permis d'aborder des aspects essentiels de la difficile relation qu'entretiennent les femmes avec le pouvoir: le leadership au féminin, les attentes et le jugement de l'électorat à l'endroit des mères de famille, la participation du conjoint d'une personnalité publique dans l'éducation des enfants, le sexisme dans les médias. Cette campagne est venue confronter les acquis (ou du moins ce que certaines féministes percevaient comme acquis) des 40 dernières années. Et cette confrontation a été captivante du début à la fin.

Ce n'est pas la première fois dans l'histoire de ce pays qu'une femme a l'ambition d'accéder à la présidence. En 1872, une certaine Victoria Claflin Woodhull s'est présentée sous la bannière du Equal Rights Party. Mais il a fallu attendre jusqu'en 1964 pour qu'une autre femme, Margaret Chase Smith, se présente sous la bannière d'un des principaux partis politiques américains. Et contre toute attente, ce ne sont pas les démocrates qui ont fait preuve de cette audace...

Toutefois, dans les manuels d'histoire, ces femmes sont perçues comme des accidents, voire des anecdotes.

Cette fois, ce pourra difficilement être le cas.

On pourrait se désoler en pleurant la défaite d'Hillary Clinton à la course à l'investiture du parti démocrate. Mais reconnaissons plutôt que ses 18 millions d'appuis ont fait bien plus qu'égratigner le fameux plafond de verre. Ils l'ont craqué et depuis, une bouffée d'air frais s'est engouffrée dans cette ouverture qui ne devrait plus jamais se refermer.

En effet, difficile de croire qu'après cette élection si marquante pour les femmes, il faille attendre encore des années avant qu'une autre ou plusieurs autres femmes ne se lancent dans la course à la présidence des États-Unis. La campagne de 2008 a changé la donne. Il y aura un avant et un après 2008.