Originaire de Terre-Neuve, le réalisateur Brad Peyton a été associé à certaines des superproductions les plus lucratives ces dernières années. Son dernier en lice, Rampage, est un film d'action avec des monstres géants et un dur à cuire qui s'attendrit pour un gorille. Chaud devant!

Signe des temps? On trouve désormais autant de nerds que d'étoiles à Hollywood. La popularité des films tirés de jeux vidéo et autres histoires de superhéros contribue sûrement à cette «nerdtrification» de la capitale du cinéma américain.

Prenez le réalisateur Brad Peyton, rencontré jeudi dernier, au lendemain de la première mondiale de Rampage à Los Angeles. À 39 ans, Peyton dit parfois s'enfermer chez lui des jours durant, happé par des jeux vidéo, comme Red Dead Redemption. L'homme possède une centaine de jouets Star Wars et aussi une collection de plus de 4000  comic books Marvel. Au grand dam de sa blonde qui aimerait bien qu'il fasse le ménage dans ses précieux objets...

«J'ai grandi dans les années 80 et 90, en jouant à des jeux et en regardant des thrillers au cinéma, explique le réalisateur de San Andreas. J'adore Spielberg, Cameron et Lucas ; mes films fétiches sont Jurassic Park et Return of the Jedi

Très jeune, le réalisateur né à Gander, Terre-Neuve, rêvait de faire le même genre de films que ses maîtres, avec des effets spéciaux, des monstres et des budgets faramineux. Sans se douter qu'à l'aube de la trentaine, il se retrouverait à bosser à Hollywood pour Warner et New Line, dirigeant des superproductions qui ont récolté des centaines de millions de dollars dans le monde. «Je suis dans ma zone de confort ici, à Hollywood, car je réalise des films que j'ai toujours aimé voir au cinéma, dit Peyton. Des films immersifs, plus gros que nature, faits pour être vus en salle sur grand écran.»

Des gorilles et des hommes

Son dernier en lice, Rampage, est un film de destruction massive, mettant en vedette Dwayne (The Rock) Johnson et un gorille qui se nomme George. Basé sur un jeu vidéo créé en 1986, Rampage raconte les suites dramatiques d'une catastrophe scientifique qui dérègle le métabolisme de certains animaux (dont George, le gorille et «meilleur ami» du personnage de Johnson). Ceux-ci se mettent subitement à grandir démesurément, menaçant les humains.

Les ingrédients d'un bon popcorn movie, en somme?

« Rampage est sur la ligne entre le film purement amusant et divertissant et un contenu plus sérieux et éducatif », nuance le réalisateur de Rampage. Selon lui, son long métrage, qui rappelle les vieux films de monstres japonais, n'est pas dénué de message et d'émotion. «C'est un film enraciné [grounded] avec de vraies émotions. J'aurais pu miser seulement sur l'humour absurde. Or, pour moi, les animaux sont innocents. Ils deviennent méchants uniquement s'ils ont peur ou ont faim. Dans Rampage, les animaux sont victimes de la méchanceté de personnes sans foi ni loi. Pour moi, dans la vie, les vrais monstres sont les êtres humains.»

Travailler avec The Rock

Lorsqu'on demande au cinéaste de qualifier sa relation de travail avec Dwayne Johnson, avec qui il collabore pour la troisième fois, le réalisateur est élogieux. «J'ai eu la chance de diriger Dwayne dès mon deuxième long métrage ; juste avant qu'il devienne une mégastar planétaire de cinéma avec Fast Five. Sur le plateau, il nous oblige à nous surpasser. C'est le genre d'acteur pour qui tu veux te lever à 6 h chaque matin, même si tu manques de sommeil depuis six mois.»

À ses yeux, le succès de Johnson, dans plusieurs sphères d'activités, n'est pas le fruit du hasard. «Dwayne est à la fois engagé, inspiré et passionné par le projet qu'il défend. J'ai parfois le complexe du gars de Terre-Neuve qui ne veut pas déranger. Dwayne est tout le contraire. Il se lance dans un projet sans filet. Quand il se présente au marbre, il vise le coup de circuit. Ou rien!»

Retour au Canada? 

Le réalisateur et scénariste qui a étudié au Canadian Film Centre à Toronto demeure attaché à son pays et à son cinéma. Souhaiterait-il revenir tourner un film au Canada, maintenant qu'il est installé dans la Mecque des superproductions? «Je ne dis pas non. Mais le genre de films que je réalise n'est pas vraiment moussé par l'industrie du cinéma canadien. Et ce n'est pas seulement une question d'argent. Il y a une autre manière de voir le cinéma au Canada.»

Rampage a un budget de 130 millions US. C'est beaucoup d'argent... mais «pas assez» aux yeux du cinéaste. N'y a-t-il pas un danger de sacrifier sa liberté créative pour ne pas déplaire à l'appât du gain des studios hollywoodiens? «Je ne pense pas qu'un cinéaste ait plus de liberté parce qu'il fait un film à petit budget. En 10 ans, je n'ai jamais vu un producteur débarquer sur le plateau pour me dire quoi faire, répond Peyton. Warner et New Line me font confiance et me laissent complètement libre.»

Pour le réalisateur, le cinéma, c'est d'abord et avant tout un art de collaboration. Et à Hollywood, il a la chance de travailler avec des artistes et artisans de talent, parmi les meilleurs du monde. «Je suis entouré d'une centaine de professionnels sur un plateau. Et ils sont tous là pour m'aider à réaliser "exactement" le film que je veux faire. Le cinéma, ce n'est pas une question de liberté, mais de savoir collaborer avec une équipe.»

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Rampage (Ravages en version française) est à l'affiche depuis vendredi.

Les frais de ce reportage ont été payés par Warner Bros.

Photo fournie par Warner Bros.

Une scène du film Rampage, avec Naomie Harris et Dwayne Johnson