On le connaît pour sa belle gueule, plutôt gagnante dans les comédies romantiques. Mais Ashton Kutcher est aussi un entrepreneur et un passionné des nouvelles technologies. C'est simple: il DEVAIT incarner Steve Jobs. Il le fait dans JOBS. Rencontre.

«Dès que j'ai lu le scénario, j'ai voulu le rôle», a lancé Ashton Kutcher lors de l'entrevue qu'il a accordée à La Presse à quelques jours de la sortie de JOBS, de Joshua Michael Stern. Il y incarne le cofondateur d'Apple, mort le 5 octobre 2011 d'un cancer du pancréas, à l'âge de 56 ans.

La ressemblance physique entre les deux hommes est frappante. Aux yeux de tous sauf du principal intéressé. «De mon point de vue, il y a plus de différences que de points communs entre lui et moi», dit-il en riant. C'est pour des raisons plus personnelles qu'il s'est senti interpellé par le projet. «Steve Jobs est à la jonction parfaite de mes intérêts personnels et de mon métier.»

Car si, pour bien des gens, l'acteur est l'ex de Demi Moore et le «nouveau» de Mila Kunis, le beau gosse de 35 ans se donne aussi à l'entrepreneuriat. Il a démarré plusieurs entreprises, investi dans d'autres. Nouvelles technologies et applications innovatrices sont au coeur de tous ses projets.

«En ce moment, chez moi, j'ai cinq gars avec des ordinateurs qui travaillent à un nouveau truc», indique le comédien à qui il tardait de rentrer à la maison... pour déballer la tablette Nexus 7 qu'il venait de se faire livrer.

Un génie, un homme

JOBS ou pas, Ashton Kutcher n'est donc pas «religieusement» Apple. «J'aime aussi les plateformes comme Android. J'aime ce que Google est en train de faire en connectant ainsi tous ses appareils. Apple a un peu perdu son attention là-dessus.»

Une position critique. Le film, qui chronique la vie de Steve Jobs de 1971 - lorsqu'il abandonne les études collégiales - au lancement de l'iPod en 2001, l'est aussi: on ne fait pas l'apologie de l'homme, on en montre le génie, mais aussi les travers.

«Il est le Léonard de Vinci de notre temps, artiste et inventeur. Il appréciait la beauté dans le design de produits qui devaient aussi être utiles et efficaces», poursuit le comédien qui n'a jamais rencontré l'homme derrière Apple. «J'ai failli le rencontrer, six mois avant sa mort. Ç'a été un rendez-vous manqué. Mais j'ai beaucoup d'amis proches et de collègues qui l'ont connu.»

Cela lui a donné un aperçu de l'homme. De ses forces. De ses défauts. Il a endossé les deux sans juger. «C'est une des premières choses qu'on apprend en tant qu'acteur: ne pas juger le personnage, mais justifier ce qui paraît irrationnel aux autres. En l'étudiant, j'ai compris ses cicatrices, sa solitude et ce sentiment de rejet qu'il a toujours porté en lui. Ses parents naturels l'ont abandonné et, plus tard, il s'est fait mettre à la porte de la société qu'il avait lui-même fondée en 1976 dans le garage de ses parents.»

Admiratif

Aux yeux d'Ashton Kutcher, l'honnêteté brutale de Steve Jobs et son comportement cruel lui ont aussi permis de prendre des décisions brillantes et ont poussé les gens autour de lui à faire le meilleur travail de leur vie.

«En même temps, il a blessé des proches, des collaborateurs», concède-t-il. Dont Steve Wozniak, son partenaire fondateur d'Apple, incarné dans le film par Josh Gad (The Book of Mormon). «Mais, dans sa tête, ses gestes et ses mots étaient justifiés. Il avait une exigence de perfection pour les produits qu'il fabriquait, pour lui-même et pour ceux qui l'entouraient.»

L'admiration et la passion se sentent dans chaque phrase de l'acteur. Qui a compilé une quinzaine d'heures de vidéos de Steve Jobs en action, afin d'étudier sa démarche très particulière, sa voix, sa gestuelle. Qui s'est mis à marcher pieds nus ou en sandales. Qui serait allé jusqu'à suivre la diète de Jobs, constituée uniquement de fruits, ce qui aurait conduit l'acteur à l'hôpital peu avant le début du tournage.

«Mais imiter le comportement d'une personne est moins compliqué que de déconstruire sa façon de marcher, de bouger, de parler afin de comprendre d'où elles viennent et de les rendre de façon naturelle.»

Au bout du compte, ce fut une expérience exaltante et terrifiante pour lui. «Mais c'est quand j'ai eu peur que j'ai fait mes meilleurs coups.» Il sourit. Et poursuit: «Vous savez, je pense que les personnes qui ont un ego assez gros pour vouloir être extraordinaires tendent à l'être, peu importe ce qu'elles font. Or, j'ai un ego gigantesque. Et je déteste l'échec plus que tout au monde.»

Steve Jobs, sors de ce corps?

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JOBS (JOBS en version française) prend l'affiche vendredi prochain. Les frais de voyage ont été payés par Remstar Films.