Comme si la très haute montagne n’était pas déjà assez dangereuse, avec son oxygène raréfié, ses vents violents et ses avalanches, voilà qu’un sinistre tueur en série y sévit. C’est du moins le sujet d’un nouveau polar, Asphyxie, d’Amy McCulloch, qui se passe sur le Manaslu, un sommet de 8163 mètres situé dans l’Himalaya, au Népal.

Ça tombe bien, pendant l’entre-saison, on a le temps de lire et la littérature de montagne permet de rêver et de planifier des aventures. Asphyxie ne fait pas exception. Le rêve ressemble peut-être à un cauchemar, mais le récit, précis et détaillé, permet de comprendre en quoi consiste une expédition sur un haut sommet himalayen.

Ce n’est guère surprenant : Amy McCulloch, une Canadienne qui vit maintenant à Londres, a elle-même gravi le Manaslu en 2019.

Elle n’avait pas une immense expérience en alpinisme : elle avait atteint le sommet du mont Toubkal, au Maroc, au tout début de 2018, puis celui de l’Aconcagua, en Argentine. Le leader de cette dernière expédition, Nirmal Purja, un ancien militaire népali-britannique, était encore inconnu, mais il avait un grand rêve : enchaîner dans un temps record les 14 sommets de plus de 8000 mètres. Il a invité Amy McCulloch à se joindre à son équipe pour le Manaslu.

« C’est une occasion qu’il me fallait saisir, que je fasse le sommet ou non, raconte-t-elle en entrevue de Londres. Mais ça a précipité mon introduction aux sommets de plus de 8000 mètres. »

Mme McCullough, auteure de roman jeunesse, pensait bien tirer un roman de cette expérience, peut-être une sorte d’essai autobiographique comme Wild de Cheryl Strayed.

PHOTO FOURNIE PAR MICHEL LAFON

Au sommet du Manaslu, Amy McCulloch commence à prendre des notes pour son futur polar.

Ce n’est qu’à mon arrivée au camp de base du Manaslu que j’ai réalisé que c’était le cadre parfait pour un polar. Non seulement est-ce un endroit isolé, mais l’environnement lui-même comporte aussi de nombreux dangers. Il n’y a pas de policiers ou de détectives et vous êtes entouré d’inconnus qui ont leurs propres raisons d’être là, qui ont de fortes personnalités et qui ont souvent un fondement très macho.

Amy McCulloch

Pendant une telle expédition, il y a beaucoup de temps morts et de périodes monotones, alors qu’on suit les mêmes sentiers encore et encore pour parfaire son acclimatation. « Il y a donc beaucoup de temps pour penser… » Et beaucoup de temps pour observer les partenaires d’expédition et peaufiner une intrigue.

Un des personnages du roman est une alpiniste québécoise d’expérience, influenceuse, toujours bien maquillée, Élise Gauthier. Amy McCulloch reconnaît qu’elle a pris pour modèle la première Québécoise à gravir le K2, Marie-Pier Desharnais, mais aussi l’Andorrienne Stefi Troguet, qui gravit les 8000 mètres sans oxygène, mais avec du rouge à lèvres, et la Finlandaise Lotta Hintsa, un ancien mannequin qui insiste pour porter tout son matériel. « Élise Gauthier est un composite », souligne l’auteure.

Asphyxie suit l’ascension de Cecily Wong, une jeune journaliste pigiste qui accompagne le grand alpiniste Charles McVeigh. Celui-ci espère conclure au Manaslu l’ascension des 14 sommets de 8000 mètres sans assistance et sans oxygène. Il a promis à Cecily une entrevue exclusive… uniquement si elle atteint elle aussi le sommet.

Mais voilà, des accidents mortels surviennent et la journaliste commence à soupçonner la présence d’un tueur en série. Mais qui ? Et quels sont ses motifs ? Cecily est-elle en danger à son tour ?

Le lecteur identifie plusieurs suspects, tout en glanant de précieuses informations qui pourront l’aider lors de ses futures expéditions en haute montagne. Sans assassin sanguinaire, faut-il espérer.

PHOTO FOURNIE PAR MICHEL LAFON

L’auteure péruvienne Silvia Vasquez-Lavado a gravi les sommets des sept continents.

Autre suggestion de lecture

Une autre femme vient d’apporter sa contribution à la littérature de montagne, un genre traditionnellement dominé par les auteurs masculins. À l’ombre des montagnes, de l’alpiniste péruvienne Silvia Vásquez-Lavado, retrace son ascension du mont Everest en mai 2016. On n’y retrouve pas une course à l’exploit ou à la gloire, mais une tentative d’outrepasser un traumatisme qui remonte à l’enfance.

Silvia Vásquez-Lavado a fondé Courageous Girls, une organisation visant à aider les femmes victimes d’abus sexuel et de trafic humain à découvrir leur force intérieure. C’est dans ce cadre qu’elle a guidé un petit groupe d’Américaines et de Népalaises jusqu’au camp de base de l’Everest, avant de se joindre à une agence réputée pour entreprendre l’ascension proprement dite. Son récit alterne entre l’Everest, son passé difficile à Lima et son comportement autodestructif à San Francisco. Il s’agit d’un livre introspectif qui donne une bonne idée des difficultés que représente l’ascension de l’Everest.

Asphyxie

Asphyxie

Michel Lafon

462 pages

À l’ombre des montagnes

À l’ombre des montagnes

Michel Lafon

430 pages

Suggestion de vidéo

Émerger de l’hiver

Sur cette belle vidéo du département des Ressources naturelles du Minnesota, un pygargue pêcheur émerge de son nid après une bordée de neige.

Regardez la vidéo au complet

Chiffre de la semaine

-19

C’est la température maximum moyenne, en Celsius, pour le mois d’avril à Alert, au Nunavut. Le printemps tarde…