Les Québécois ont été nombreux à prendre d’assaut les pistes de ski de fond pendant l’hiver qui vient de se terminer. Plusieurs se sont toutefois tournés vers une autre discipline, le ski de montagne. Cet afflux de nouveaux skieurs sur les pentes et dans les sous-bois est une excellente nouvelle pour le sport, mais il a aussi entraîné certains inconvénients.

Le ski de montagne est un terme que la Fédération québécoise de la montagne et de l’escalade (FQME) utilise pour désigner les sports de glisse qui se pratiquent dans des milieux montagneux sans remontée mécanique ou motorisée.

« Il y a eu un énorme engouement, assure Maxime Bolduc, directeur du ski à la FQME. Nos statistiques à l’interne ont augmenté de façon fulgurante. Le nombre de membres a augmenté d’un peu plus de 200 % du début du confinement jusqu’à aujourd’hui. Évidemment, ça se ressent sur les sites. »

L’engouement s’est notamment manifesté dans les stations de ski qui offrent une expérience de ski hors-piste : on y monte sur des sentiers balisés et on redescend directement dans les pistes de ski alpin.

« Il y a eu des explosions dans à peu près toutes les stations qui offrent cette discipline, affirme M. Bolduc. Beaucoup de débutants se sont cantonnés dans ces stations. C’était un bon choix que de faire ses premiers pas dans un environnement beaucoup plus contrôlé. »

Dans les secteurs plus sauvages, l’achalandage a été exacerbé par le manque de neige à certains endroits : les skieurs se sont donc concentrés là où il y avait de la poudreuse.

Au Saguenay, par exemple, « la deuxième Mecque du ski après la Gaspésie », il y a eu un déficit de neige. « On n’a pas pu ouvrir le Petit Saguenay, un nouveau site très communautaire en plein cœur du village », déplore M. Bolduc.

« Certains désagréments »

PHOTO MARCO CAMPANOZZI, LA PRESSE

Ski de montagne dans le parc national de la Gaspésie

Les skieurs ont donc improvisé, ce qui a créé certains problèmes. « Les personnes qui commencent ne sont pas nécessairement au courant des règles d’éthique, de la façon dont il faut se comporter sur le terrain, déclare Maxime Bolduc. Ça a pu apporter certains désagréments. »

Par exemple, il ne faut pas marcher dans les sentiers de remontée : il faut utiliser des skis munis de peaux ou des raquettes. À moins, évidemment, que le sentier soit totalement glacé. Il faut aussi suivre les bonnes vieilles règles du Sans trace. Et, surtout, il faut respecter les terrains privés.

Les gens ont tendance à dire : c’est du ski hors-piste, on ne dérange personne, on va aller skier quand même. Mais on doit respecter les environnements qui ne sont pas accessibles : on ne peut pas aller n’importe où, n’importe quand.

Maxime Bolduc, directeur du ski à la FQME

Le Parc d’environnement naturel de Sutton (PENS) a vu un bon nombre de skieurs hors-piste envahir son territoire cette année. Or, une grande partie de ce territoire est une réserve naturelle créée par Conservation de la nature Canada et la municipalité de Sutton. « Dans cette réserve, tout ce qu’on a le droit de faire, c’est de se promener à pied dans les sentiers, note Patricia Lefebvre, directrice générale du PENS. On n’a pas le droit de sortir des sentiers parce que ça a un impact sur la faune qu’on doit protéger. »

La Gaspésie a également connu une controverse au sujet de l’accès au territoire l’hiver dernier. Des skieurs qui avaient l’habitude de skier dans un secteur du mont Saint-Pierre se sont vu refuser l’accès par de nouveaux propriétaires. Les réseaux sociaux se sont enflammés et les nouveaux propriétaires, Sarah-Maude Poirier et Dany Lévesque, ont eu fort à faire pour faire comprendre leur position.

Mme Poirier fait valoir que les propriétaires précédents n’ont jamais autorisé la pratique du ski sur le terrain. « Il y a eu une grande confusion à la suite de la parution d’un guide des lignes de ski haute route en Haute-Gaspésie, mais les auteurs n’ont jamais demandé l’autorisation avant d’inclure ces lignes-là. »

C’est notamment une question d’assurance qui inquiète les nouveaux propriétaires. « On parle de terrains avalancheux, rappelle Mme Poirier. S’il y a un accident, la responsabilité va revenir au propriétaire terrien. »

Sarah-Maude Poirier et Dany Lévesque offrent des forfaits guidés de ski de montagne sur un autre terrain près de Sainte-Anne-des-Monts, Cap-Castor. Ils ont toutefois acquis la nouvelle propriété du mont Saint-Pierre pour son potentiel forestier. « Cap-Castor, c’est juste trois mois par année, on ne vit pas de ça, explique Mme Poirier. Ce sont les lots à bois qui sont notre gagne-pain. Si les gens montent dans nos lignes, coupent des branches, décident que tel arbre est dans leurs jambes, prennent leur scie mécanique… Avec l’essor du hors-piste, c’est rendu là, c’est intense. »

La FQME espère calmer le jeu dans la région. La solution peut passer par l’ouverture de davantage de sites officiels. « Il y a un bel engouement, s’enthousiasme Maxime Bolduc. Quand on a commencé, c’est nous qui faisions des demandes pour ouvrir les sites. Maintenant, c’est l’inverse : ce sont les gens des régions, des organismes, des municipalités, des privés, qui nous appellent pour développer des secteurs. C’est l’implication citoyenne dans ce qu’elle a de mieux. »

Suggestion de vidéo : Boum badaboum

Même les meilleurs skieurs professionnels tombent de temps à autre. Pour finir la saison de ski, voyez une petite compilation des plus jolies dégringolades filmées par Matchstick Productions.

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Chiffre de la semaine : 106,8

C’est le nombre de millimètres de précipitations (pluie et neige) que reçoit en moyenne Petite-Rivière-Saint-François en avril. Cela en fait l’endroit le plus arrosé de la province. Par comparaison, Kuujjuaq en reçoit 26 mm.

Source : ministère québécois de l’Environnement et de la Lutte aux changements climatiques