(Montréal) Fin de parcours probable pour Yves Ulysse Jr, victoire à l’usure pour Erik Bazinyan : le premier gala de l’année d’Eye of the Tiger Management (EOTTM) a connu une issue toute en contrastes, jeudi soir, au cabaret du Casino de Montréal.

Finaliste de la soirée, Bazinyan (29-0, 21 K.-O) a livré une bagarre de ruelle comme il n’en avait jamais vécu avant de l’emporter par décision majoritaire face à l’Américain Alantez Fox (28-4-1, 13 K.-O.).

« Je voulais l’arrêter, mais il avait une bonne mâchoire, une bonne expérience », a réagi le Montréalais de 27 ans, qui conserve ainsi ses ceintures NABF et NABA des poids super-moyens (168 lb).

Deux juges ont remis une carte de 98-92, tandis que le troisième a vu un combat nul de 95-95, ce qui a surpris le clan du Québécois.

Il faut dire que Fox, un longiligne pugiliste de 6 pi 5 po, s’est bien servi de sa portée et a donné du fil à retordre à son opposant en l’accrochant constamment.

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Erik Bazinyan conserve ses ceintures NABF et NABA des poids super-moyens (168 lb)

« Je suis content parce que j’ai gagné une bonne expérience, a souligné Bazinyan. J’ai vécu des rounds avant de me battre pour un championnat du monde. J’avais besoin de cet excellent combat. »

L’Arménien de naissance montait sur le ring pour la première fois depuis la mort tragique de son père Ara, son premier partisan, fauché par une crise cardiaque à 52 ans l’été dernier.

« J’y pense en me réveillant tous les jours, mais j’ai essayé de ne pas trop y penser dans les deux dernières semaines avant le combat », a réagi le gagnant, qui a fondu en larmes après l’affrontement.

« Ça m’a frappé. Je ne voulais pas faire ça, mais ce sont des émotions que je ne pouvais pas retenir. C’est la vie. »

Bazinyan a été ennuyé par l’accrochage constant de son rival du Maryland, qui se déplaçait bien également.

« Je voulais me battre, je voulais être le premier à frapper, mais il utilisait beaucoup le poids de son corps sur moi. […] C’est un combat, ça doit être difficile comme ça. Chapeau à Fox. »

L’Américain de 30 ans n’a pas rechigné à l’annonce des résultats, même s’il jugeait que les deux cartes de 98-92 ne reflétaient pas l’allure des échanges.

« Le 8 à 2, j’ai le sentiment que c’était une décision locale, mais c’est ma faute, a déclaré Fox. Je savais que je venais me battre dans la cour arrière d’Erik. Je devais en faire plus. La nulle sur une carte, c’était une évaluation assez juste, mais c’était à moi d’en faire plus. »

Fox, qui revenait d’une défaite contre le prodige cubain David Morrell, actuel champion mondial de la WBA, a chanté les louanges de son vis-à-vis.

« J’ai senti sa jeunesse et sa force. Erik Bazinyan est un excellent boxeur. Il sera l’un des prochains champions mondiaux ou, au moins, il se battra pour un titre. »

Marc Ramsay, le coach de Bazinyan, était satisfait d’avoir observé de nouvelles aptitudes de la part de son protégé, avant tout réputé pour sa technique impeccable.

« J’aurais aimé qu’on reste un peu plus organisés vers la fin du combat, mais j’ai vu quelque chose d’émotionnel, quelque chose de physique que je n’avais pas encore vu en lui. Il s’est fait frapper, mais il n’a jamais été ébranlé. Il a été en mesure de bien gérer ses énergies pour un gros 10 rounds. Il a quand même fini en force. C’est un bon signe pour la suite des choses. »

« Erik, ça a toujours été de l’excellence du point de vue technique, a ajouté l’entraîneur. Ce soir, il est allé chercher du cœur à l’ouvrage, quelque chose de plus personnel. »

Antonin Décarie, directeur général d’EOTTM, estime que Bazinyan avait besoin d’un tel défi après un parcours sans fautes chez les amateurs et les professionnels. « Ça va le faire grandir énormément. Ça va surtout lui permettre de s’ouvrir un peu sur le marché québécois. Je pense que les gens vont triper sur lui. »

Fin dramatique pour Ulysse Jr

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Yves Ulysse Jr s’est fait pincer par un uppercut dévastateur du Mexicain Gabriel Gollaz Valenzuela.

La demi-finale s’est terminée de façon dramatique quand Yves Ulysse Jr s’est écroulé au tapis à peine 40 secondes après le son de la première cloche. Le Montréalais de 34 ans (22-4, 12 K.-O.) a tenté de se relever immédiatement avant de basculer, blessé à une cheville, mais surtout sonné. Sans hésiter, l’arbitre Martin Forest a arrêté son compte et mis un terme à l’affrontement après 52 secondes.

Ulysse Jr s’est fait pincer par un uppercut dévastateur du Mexicain Gabriel Gollaz Valenzuela (26-3-1, 16 K.-O.), que les experts annonçaient dangereux à raison.

Ulysse a peiné à se rendre dans son coin. Après le dévoilement du verdict, il a boité avant de sortir du ring. Un homme l’a empoigné pour le transporter jusqu’au vestiaire comme un enfant.

Le super léger a déjà fait partie des 10 meilleurs mondiaux de sa catégorie. Le WBC le considérait encore comme son 14e aspirant. Ce combat, après quatre succès consécutifs, dont le premier contre Mathieu Germain à Rimouski en 2020, sera vraisemblablement son dernier.

« C’est le temps de passer à autre chose, il a d’autres projets en tête », a résumé son jeune entraîneur Giuseppe Moffa. « Il est soulagé. Il était un peu tanné de la boxe dernièrement. Mais ça n’a aucun rapport avec sa préparation ou sa santé mentale. Il veut aider sa communauté, son quartier. »