D’abord la question qui tue : combien de joueurs réguliers du club-école du Canadien au cours des dix dernières années ont-ils su éclore et s’implanter à Montréal en permanence au sein de l’un des trois premiers trios, du premier quatuor de défenseurs ou au poste de gardien numéro un ? Réponse : Aucun.

En étant généreux, on pourrait qualifier Jake Evans ou Rafaël Harvey-Pinard de joueurs de troisième trio, mais avec un club en santé, ils ne le sont pas. S’il maintient son rythme, Joshua Roy pourrait être le premier en une décennie, après une demi-saison à Laval.

Cole Caufield, qui a disputé deux matchs à Laval à son arrivée chez les professionnels, et six matchs la saison suivante pour se replacer, n’entre pas dans la catégorie de réguliers du club-école. Charlie Lindgren, Ryan Poehling, Jarred Tinordi et Michael McCarron sont devenus des réguliers dans la LNH, mais ailleurs, dans des rôles de soutien, et ils n’ont rien rapporté à l’organisation.

Il faut remonter à 2012-2013 pour en trouver un. Brendan Gallagher avait disputé une demi-saison à Hamilton, pendant le lock-out de la LNH, avant d’être rappelé à Montréal pour le camp d’entraînement. Il n’aurait peut-être jamais joué dans la Ligue américaine n’eût été cet arrêt de travail. Avant lui, Hamilton a produit David Desharnais et Max Pacioretty.

Un club-école n’est évidemment pas superflu pour autant. Il permet à certains jeunes parmi les plus doués de corriger certaines lacunes pendant un court stage, Arber Xhekaj constitue le dernier exemple digne de mention. Il sert aussi de base où puiser pour remplacer à court terme des joueurs blessés.

Il faut donc garder cette notion en tête quand vient le temps de cibler une relève parmi le club-école actuel. Combien aspirent à un poste régulier à Montréal ces prochaines années ? Ne répondez pas six par pitié…

Le Rocket a remporté un troisième match de suite mercredi soir. Il se retrouve à nouveau au plus fort de la course pour une place en séries.

L’aplomb de Logan Mailloux saute aux yeux en analysant un match du Rocket. Ce défenseur droitier de 6  pieds 3 pouces et 220 livres montrait mille failles au camp d’entraînement. Sa suspension, et la cessation des activités dans la Ligue junior de l’Ontario au plus fort de la pandémie, n’ont pas aidé à son développement.

Son jeu défensif s’est beaucoup amélioré. Il prend des décisions nettement plus intelligentes avec la rondelle et son efficacité lors des jeux de transition demeure même désormais un atout.

Non seulement vient-il au cinquième rang des compteurs chez les défenseurs de la Ligue américaine avec 38 points, dont 13 buts, en 58 matchs, à seulement 20 ans, mais il a une présence sur la glace. Les choses paraissent parfois même trop faciles pour le défenseur numéro un du Rocket.

Et c’est justement le défi de ce choix de premier tour du CH en 2021, nous disent nos antennes à Laval : ne pas tomber dans la facilité. Devant la faiblesse de l’adversaire, mercredi, Mailloux s’est rendu coupable de quelques jeux de mollesse et a eu tendance une fois ou deux à oublier la notion du bon positionnement en territoire défensif. Ses coéquipiers ont aussi eu à le ramener à l’ordre plus tôt cette saison pour son manque de ponctualité et de rigueur. Mais le talent est indéniable.

À l’autre bout du spectre, un autre défenseur droitier, Justin Barron, 22 ans, semble avoir perdu ses repères malgré ses 87 matchs d’expérience dans la LNH. Il connaît les mêmes difficultés dans la Ligue américaine que chez le Canadien : vulnérable sous pression, trop souvent mollasson, mauvaise prise de décision avec la rondelle. Il n’est évidemment jamais trop tard pour retrouver la confiance, mais il est loin derrière Mailloux à l’heure actuelle.

PHOTO CHRISTINNE MUSCHI, ARCHIVES LA PRESSE CANADIENNE

Justin Barron (à droite)

Brandon Gignac représente sans l’ombre d’un doute le meilleur attaquant du Rocket, mais à 26 ans, il n’est plus considéré comme un joueur d’avenir pour le Canadien, ce qui ne l’empêche pas pour autant d’aspirer à nouveau à la Ligue nationale dans un rôle de soutien.

Parmi les espoirs proprement dits, l’ailier suédois Emil Heineman, 22 ans, doit être considéré parmi les premiers de classe malgré une baisse de production offensive par rapport à ses débuts fracassants de la fin de saison dernière, neuf points, dont sept buts, en onze matchs.

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Emil Heineman

Heineman a amassé 20 points, dont 11 buts, en 34 matchs, mais il possède la vitesse, un bon gabarit à 6 pieds et 202 livres, de la fougue et de la solidité sur patins pour devenir un bon ailier de milieu de formation s’il développe son potentiel. Il constituerait sans doute déjà un joueur plus efficace que Jesse Ylönen ou Michael Pezzetta. Mais ceux-ci doivent passer par le ballottage pour être renvoyés dans les mineures et Heineman, obtenu dans la transaction pour Tyler Toffoli, est utile au Rocket dans la course aux séries.

PHOTO CHRISTINNE MUSCHI, ARCHIVES LA PRESSE CANADIENNE

Sean Farrell (à droite)

Sean Farrell, 22 ans, suscitait beaucoup d’espoir à son arrivée des rangs collégiaux l’an dernier. Il a dominé outrageusement à sa dernière saison dans la NCAA avec 53 points en 34 matchs à Harvard. Il a même participé aux Jeux olympiques et au Championnat mondial avec les Américains. Mais sa petite taille et son manque de force physique et d’explosivité sur patins rendent ses débuts difficiles chez les professionnels. Il a bien 23 points en 33 matchs à Laval, marqué son huitième but mercredi, mais à moins d’améliorer de façon notable sa force musculaire, son patin et son tir, il aura de la difficulté à percer.

Outre Mailloux et Heineman, il y a le jeune gardien Jakub Dobes, une recrue de 22 ans, choix de cinquième tour en 2020, brillant cette saison après un départ pénible.

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Jakub Dobes

Dobes, 6 pieds 5 pouces, a accordé 26 buts à ses six premiers départs en carrière dans la Ligue américaine, subi quatre défaites. Il a alloué plus de deux buts seulement quatre fois à ses treize derniers départs et plus de trois buts seulement deux fois. Il a une fiche de 15-8-2 depuis le 9 décembre.

Joueurs réguliers du club-école ayant accédé à un poste permanent à Montréal depuis quinze ans

2022-2023

  • Rafaël Harvey-Pinard
  • Jesse Ylönen
  • Cayden Primeau
  • Jayden Struble

2021-2022

Aucun

2020-2021

  • Michael Pezzetta

2019-2020

  • Jake Evans

2018-2019

Aucun

2017-2018

Aucun

2016-2017

Aucun

2015-2016

Aucun

2014-2015

  • Greg Pateryn

2013-2014

  • Nathan Beaulieu

2012-2013

  • Brendan Gallagher (une demi-saison pendant le lock-out)

2011-2012

Aucun

2010-2011

  • David Desharnais

2009-2010

  • P. K. Subban

2008-2009

  • Max Pacioretty (37 matchs à Hamilton, 34 matchs à Montréal)

Jake Allen a d’abord dit non

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Jake Allen

Ainsi donc, Jake Allen aurait refusé une première fois de passer aux Devils en début de saison. On peut le comprendre puisqu’il ne voulait pas se retrouver à nouveau dans un ménage à trois au New Jersey. Or la donne a changé quand le DG des Devils, Tom Fitzgerald, a réussi à larguer le gardien numéro un Vitek Vanecek à San Jose le jour de la date limite des transactions. Fitzgerald a obtenu un gardien en retour, Kaapo Kahkonen, mais celui-ci, à quelques mois de son autonomie complète, ne figure pas dans les plans d’avenir des Devils. Cette révélation permet aussi de comprendre pourquoi le CH s’est retrouvé dans ce triangle de gardiens aussi longtemps.