Il en va d’un nouveau défi professionnel comme d’une nouvelle relation : après l’exaltation des débuts, le quotidien s’installe. Et s’il y a des problèmes à avoir, c’est généralement là qu’ils surviennent.

Le défenseur Jayden Struble n’est pas en territoire problématique, comprenons-nous bien. Mais après 43 matchs dans la LNH, l’étincelle qui brillait au cours des premières semaines s’est indéniablement amenuisée. La surprenante fiabilité qu’il affichait à son arrivée inattendue à Montréal vacille. Son jeu, de l’aveu même de Martin St-Louis, « n’est pas au niveau de ce qu’il nous a montré ». Il n’est plus « aussi constant ».

Il est difficile d’identifier le moment exact où l’Américain de 22 ans a perdu de sa superbe. Ses indicateurs défensifs, toutefois, ont commencé à chuter quelque part en janvier.

Le 10 janvier, à Philadelphie, Struble avait été sublime, passant tout près de 20 minutes sur la glace. Le lendemain, de retour à Montréal, toute son équipe s’était effondrée face aux Sharks de San Jose, mais le jeune homme avait particulièrement peiné, commettant des erreurs coûteuses en début de match.

Cette contre-performance a été le début d’un déclin statistique qui, sans être draconien, est constant. Depuis le 23match de Struble, lorsque le défenseur est sur la glace à cinq contre cinq, le Canadien accroît son déficit sur le plan des tentatives de tir, des tirs cadrés et des buts attendus.

La tendance n’est pas que théorique. Les erreurs sont plus nombreuses qu’auparavant. Mardi, contre les Blue Jackets de Columbus, ses deux dernières présences en deuxième période ont duré 3 minutes et 2 min 10 s, alors que son partenaire Johnathan Kovacevic et lui étaient prisonniers de leur territoire.

Pendant un moment, son temps de jeu n’en a pas trop souffert. Il avait toutefois commencé à baisser un peu avant qu’il se blesse au dos, le 22 février dernier, à Pittsburgh. Il a alors raté quatre rencontres. Or, sans que cela fasse de vagues, il a en réalité été laissé de côté pour deux de ces matchs, même s’il était disponible. Depuis son retour, son utilisation oscille entre 14 et 15 minutes et demie, alors qu’il était plutôt dans la fourchette des 16 à 20 minutes à son sommet.

Baisse

Cette tâche allégée coïncide certes avec la renaissance d’Arber Xhekaj. Le Canadien a aussi momentanément composé avec une blessure à Jordan Harris, ce qui réduisait les possibilités de changements en défense. C’est ce que Martin St-Louis a en tête quand il parle du nécessaire contexte entourant la situation d’un joueur.

Mais il n’y a pas que cela.

« En général, si ta game baisse, tes minutes vont sûrement baisser », a laissé tomber le Québécois, mercredi, après l’entraînement de son équipe.

Struble n’a certainement pas désappris à bien jouer en défense. Mais St-Louis n’a pas nié sa baisse de régime.

PHOTO JOSIE DESMARAIS, ARCHIVES LA PRESSE

Martin St-Louis

Comme jeune joueur, quand tu rentres dans la ligue, tout est nouveau, tout est le fun, et tu as de l’énergie. C’est comme dans une nouvelle job. Mais il y a un moment donné où tu embarques dans la normalité.

Martin St-Louis, entraîneur-chef du Canadien

Il importe donc, pour une recrue comme Struble, de montrer « qui il est quand il embarque dans la normalité ».

Sera-t-il appelé à rater des matchs, comme le font déjà Jordan Harris et Johnathan Kovacevic ? « Je ne sais pas encore », a répondu St-Louis.

Il aurait évidemment été poli de demander au principal intéressé sa lecture de la situation, mais en dépit de la demande d’entrevue de La Presse, il avait déjà quitté le centre d’entraînement lorsque les journalistes ont eu accès au vestiaire du club.

Saut

Sans commenter son cas spécifique, trois de ses coéquipiers ont convenu que le saut des rangs collégiaux à la vie professionnelle n’est pas facile.

Struble évoluait encore pour les Huskies de l’Université Northeastern il y a un an. Une blessure au bas du corps ainsi que l’éclosion d’une pandémie l’ont limité à un total de 39 matchs à ses deux premières années dans la NCAA. Les deux suivantes, il a disputé 34 et 31 matchs, respectivement, ce qui est loin d’un calendrier de la Ligue américaine (72 matchs) ou de la LNH (82). Soudain, les rencontres se succèdent à un rythme effarant, avec le voyagement qui vient avec.

Struble a déjà vécu les deux. Après 12 matchs avec le Rocket de Laval, il a été rappelé par le Canadien et n’a plus revu la couronne nord depuis.

La seule manière de s’y habituer, c’est d’en faire l’expérience. Tout le monde le vit à sa manière. Strubs est très calme, alors il gère bien les hauts et les bas [du quotidien], si bien qu’il ne transporte pas l’énergie et le stress d’un match à l’autre. Mais oui, c’est une transition que tout le monde doit réussir.

Johnathan Kovacevic, diplômé de Merrimack College

« Tout est différent, a abondé Alex Newhook, un ancien de Boston College. C’est une longue saison, et mentalement, c’est toute une bataille. Surtout dans les longues journées de février, c’est plus dur de garder le même état d’esprit à chaque match. »

Sans la nommer ainsi, lui aussi évoque la notion de normalité, qui prend probablement « deux ans » à apprivoiser. « La première année, c’est l’excitation, l’adrénaline. Après ça, il faut apprendre à gérer la saison complète, les voyages, les entraînements, sans s’épuiser. C’est énorme. »

« C’est encore pire en commençant dans la Ligue américaine, avec des séquences de trois matchs en trois matchs, a ajouté Jake Evans, qui a disputé quatre saisons à l’Université Notre Dame. Il faut s’adapter vite et prendre les conseils des joueurs plus vieux. Si tu prends du retard, tu es dans le trouble. »

Insistons de nouveau sur le fait qu’aucun des trois joueurs ne discutait explicitement de Struble. Ce qu’on conclura, toutefois, c’est que s’il cherche à chasser le passage à vide qu’il traverse, il a autour de lui des camarades qui sont passés par là.

Slafkovsky rate encore un entraînement

PHOTO DOMINICK GRAVEL, ARCHIVES LA PRESSE

Juraj Slafkovsky

De quel mystérieux mal Juraj Slafkovsky est-il atteint ? À l’évidence, ce n’est rien qui l’empêche de prendre part à des matchs, car le Slovaque fait partie des cinq joueurs du Canadien qui n’ont encore jamais sauté leur tour cette saison. Mais quelque chose cloche, puisqu’il a raté, mercredi, un quatrième entraînement consécutif, occupé qu’il était à subir des « traitements ». Colin White, pour sa part, a participé à tous les exercices, sans contrainte. Son nom est toujours sur la liste des blessés, mais il serait admissible à un retour au jeu s’il était physiquement prêt. C’est par ailleurs Samuel Montembeault qui affrontera les Bruins de Boston, ce jeudi.