Pas évident, ces derniers temps, de dénicher un entrepreneur disponible pour réaliser des travaux de construction ou de rénovation. Mais avant de se jeter sur le premier venu, peut-être serait-il plus sage de mener quelques vérifications, histoire de minimiser les risques de pépin ou d’éviter de faire affaire avec des professionnels peu recommandables.

Plusieurs ressources destinées au grand public sont offertes pour effectuer des recherches de base. Elles ne sont certes pas infaillibles et ne peuvent garantir que tout se passera pour le mieux dans le meilleur des mondes, mais permettent au moins de déceler une quelconque anomalie ou casserole aux fesses d’une entreprise.

Parmi les questions que l’on est en droit de se poser : l’entrepreneur avec lequel on est en passe de signer un contrat est-il blanc comme neige ? Pourrait-il avoir des liens avec des organisations un peu louches ? Nous avons sollicité le bureau d’enquête de La Presse pour savoir s’il existe des moyens de vérifier de possibles liens avec le crime organisé. Notre journaliste d’investigation Hugo Joncas, qui a justement déjà animé des ateliers informels sur le sujet, fournit ainsi quelques recommandations pour des vérifications de base.

Des infos à exploiter

Avant tout, il préconise de consulter le Registraire des entreprises du Québec, qui permet au public de se renseigner facilement sur les propriétaires, actionnaires et administrateurs d’une entreprise. « Avec ces résultats, on peut faire une recherche rapide sur Google pour voir si on trouverait quelque chose, comme une mention en lien avec la commission Charbonneau, une enquête policière rapportée par les médias, etc. », indique le journaliste d’enquête.

Consultez le Registraire des entreprises du Québec

Il recommande, dans la foulée, de garder ces informations en main et d’en profiter pour sonder l’Institut canadien d’information juridique (CanLII), dont le site permet d’accéder aux jugements et décisions des tribunaux du pays, afin de vérifier si l’entreprise ou ses représentants ont déjà eu maille à partir avec la justice.

On peut aussi consulter la base de données de la Société québécoise d’information juridique (SOQUIJ), qui donnera des résultats probablement similaires ; nous avons cependant retrouvé, après avoir passé au crible certaines entreprises de construction, des jugements qui n’étaient pas recensés par CanLII.

Consultez les données de CanLII Consultez les données de la SOQUIJ

Des réflexes de base

Même si elles ne révèleront pas d’éventuels liens avec le crime organisé, d’autres petites recherches constituent de bons réflexes de vérification. Par exemple, des consultations auprès du site de la Régie du bâtiment du Québec permettront de s’assurer que la licence d’une entreprise est valide, conseille Hugo Joncas.

Marc-André Harnois, directeur général de l’Association des consommateurs pour la qualité dans la construction (ACQC), incite même à aller plus loin.

PHOTO MARTIN TREMBLAY, ARCHIVES LA PRESSE

Marc-André Harnois, directeur général de l’Association des consommateurs pour la qualité dans la construction (ACQC)

S’assurer qu’un entrepreneur a une licence auprès de la RBQ [Régie du bâtiment du Québec] n’est pas suffisant. Il faut vérifier s’il a la bonne licence pour le type de travaux demandés, surtout s’il est question de plomberie et d’électricité.

Marc-André Harnois, directeur général de l’Association des consommateurs pour la qualité dans la construction (ACQC)

Consultez le site de la RBQ

De son côté, l’Office de la protection du consommateur (OPC) fournit également un outil pour vérifier si l’entreprise a fait l’objet d’un avis d’infraction auprès de cet organisme, a été ciblé par une mise en demeure et si elle est titulaire d’un permis.

Consultez le bottin de l’OPC

Enfin, le directeur de l’ACQC pointe une ressource à laquelle on ne pense pas forcément d’emblée : le répertoire de la Garantie Construction Résidentielle (GCR). « Normalement, c’est pour les bâtiments neufs, mais certains entrepreneurs font à la fois du neuf et de la rénovation. Jeter un coup d’œil sur la qualité du travail d’une entreprise dans le neuf en consultant son dossier chez GCR, ça peut donner un indice sur sa manière de travailler dans la rénovation », souligne M. Harnois.

Consultez le répertoire GCR

Précieuses recommandations

Cela dit, l’absence de traces judiciaires n’est pas automatiquement synonyme de fiabilité absolue. Des problèmes antérieurs peuvent par exemple être survenus, mais les clients lésés n’ont pas pu ou voulu se tourner vers les tribunaux. Aussi, des ententes à l’amiable, qui ne laissent pas de traces, peuvent avoir été conclues.

Le conseil que l’on donne en priorité, c’est d’essayer d’obtenir de bonnes références. On peut certes faire des vérifications, on recommande d’aller voir la jurisprudence, mais des entrepreneurs croches peuvent avoir leur licence RBQ, figurer au registre des entreprises et arriver à éviter des poursuites, même si leurs clients ne sont pas satisfaits.

Marc-André Harnois, directeur général de l’Association des consommateurs pour la qualité dans la construction (ACQC)

M. Harnois insiste sur les recommandations que l’on peut obtenir grâce à son réseau pour s’assurer que tout a roulé comme prévu durant les travaux.

Prudence aussi avec les avis et commentaires laissés sur le web ou les pages de réseaux sociaux : leur manipulation par l’entreprise elle-même aussi bien que le minage de réputation par un concurrent ne peuvent être exclus.

Les ressources des assurances

Votre assurance propose-t-elle des mécanismes d’aide pour la recherche d’entrepreneurs fiables ? Cela vaut la peine de le vérifier. Par exemple, pour des travaux de rénovation, Desjardins propose de recourir à Réno-Assistance (dont il est actionnaire majoritaire), « une plateforme pour mettre en relation des propriétaires qui ont des projets de rénovation avec des professionnels et entrepreneurs de confiance pour les mener à bien. Réno-Assistance dispose d’un bassin de plus de 1000 professionnels et entrepreneurs certifiés dans les domaines de la rénovation résidentielle et commerciale. Un conseiller en rénovation expérimenté accompagne chaque client tout au long de son projet », explique Valérie Lamarre, relationniste du Mouvement Desjardins.

Dans un contexte de réclamation après sinistre, l’institution propose des entreprises passées au crible, pour lesquelles les licences, antécédents judiciaires et financiers, et la conformité des équipements ont été vérifiés. « Nous faisons aussi des entrevues pour valider l’expertise, la compétence et les capacités du partenaire pour qu’il soit en mesure de répondre à nos exigences. Le client qui accepte de travailler avec l’un des partenaires que nous lui proposons n’a pas besoin de se soucier de faire des recherches », précise Mme Lamarre. Si l’une des entreprises proposées est choisie, une garantie de réalisation est assurée.

Gare aux fantômes itinérants

Le directeur de l’ACQC attire notre attention sur les entrepreneurs qui réalisent du porte-à-porte, dits commerçants itinérants. « Vérifiez que leurs outils promotionnels tiennent la route. On voit des cas où ils remettent leur carte d’affaires, mais que le site web n’existe pas, l’adresse postale ne correspond à rien. Certaines sont vraiment des compagnies fantômes », prévient-il. Ils doivent en outre posséder un permis de commerçant itinérant, ce qui peut être vérifié auprès de l’OPC.