Plusieurs raisons ont incité Étienne Vigneron à acheter une maison centenaire en très mauvais état, à Waterloo, en 2019. Son budget limité a pesé lourd dans sa décision, tout comme son désir de lui donner une seconde vie, en mettant à profit son expertise dans la construction de maisons à haute efficacité énergétique.
« C’était un défi personnel, mais aussi une façon de montrer qu’avec un peu de vision, on peut transformer une dompe en une belle maison écologique et performante, avec un budget accessible », explique l’entrepreneur de 36 ans, qui a débuté dans le domaine de la construction en 2008 en tant que charpentier et s’est tourné vers la construction écologique en 2014, en suivant à Toronto une formation pour bâtir des bâtiments selon les principes de « maison passive » (Passivhaus).
Après avoir fait cela, il n’y a plus grand-chose qui me stresse. J’ai beaucoup grandi à travers ce projet commencé pendant la pandémie, quand tout le monde était à fleur de peau. J’ai gagné en sagesse et en maturité.
Étienne Vigneron
Il savait dès le départ qu’il devrait refaire en entier la maison centenaire, qui avait été déplacée dans les années 1980 et installée sur de nouvelles fondations. Puisqu’il avait fondé son entreprise ÉcoNovation à peu près en même temps, en 2020, il allait de soi pour lui que l’habitation serait rénovée en respectant les standards d’une maison passive.
« J’ai tout arraché en récupérant ce que je pouvais remettre en valeur, explique-t-il. Tout a été refait avec des matériaux durables et performants. J’ai mis une toiture d’acier et des fenêtres en triple verre. J’ai isolé la maison par l’extérieur en utilisant la technique de murs à double ossature Larsen Truss. Le gros avantage, c’est qu’on a une isolation et une étanchéité continues. Il n’y a aucun pont thermique et on est assuré d’une super haute efficacité énergétique. En plus, j’ai juste utilisé des matériaux à faible empreinte environnementale. Les murs de 12 pouces d’épaisseur ont été isolés avec de la laine de roche. La maison demeure fraîche l’été et elle ne coûte même pas 400 $ par année en frais de chauffage. »
Il s’est par ailleurs lancé le défi d’optimiser l’espace, sans l’agrandir. Le rez-de-chaussée, l’étage et le sous-sol ont conservé leur superficie de 600 pi2 (55,7 m2). « C’est possible d’avoir une maison compacte, qui est quand même spacieuse et conviviale, croit-il. J’ai déplacé l’escalier au centre pour ne pas avoir de corridor, à l’étage. Puis j’ai aménagé le sous-sol pour qu’il soit prêt à devenir un appartement indépendant. J’ai pensé à cela pendant la crise de la COVID-19, en me disant que ma mère pourrait peut-être s’y installer. J’ai excavé l’arrière de la maison et j’ai aménagé des murs de pierres pour que ce soit accessible par une porte extérieure. »
Il s’est souvent tourné vers ses proches pour l’héberger quand la maison était inhabitable.
J’ai fait la majorité des travaux seul, et à l’occasion avec les membres de mon équipe, de soir, pendant les week-ends et pendant la période de confinement. La police a même vérifié si j’étais bien le propriétaire de la maison et que j’avais le droit de travailler !
Étienne Vigneron
Une âme
Il n’a pas pu récupérer grand-chose, à part la structure du plancher original au rez-de-chaussée. Il a enlevé une à une les planches et les a réinstallées au plafond, lorsqu’il a effectué la structure du plancher de l’étage. Quelques planches servent de tablettes au bas des fenêtres. Quant au parquet à l’allure antique, au rez-de-chaussée, il est composé de lattes d’érable provenant d’un condo montréalais.
Étant un des experts en habitat écologique du centre de formation Solution ERA, il estime que la rénovation d’une telle habitation fait écho aux gros enjeux de la société, à la fois environnementaux, économiques et sociaux (en parant à l’isolement des aînés).
Comme sa vie personnelle emprunte une nouvelle direction, il s’est résolu à vendre la demeure, cet automne. Les acheteurs partagent les mêmes valeurs environnementales que lui et apprécient la qualité de son travail, se réjouit-il.
« C’est une maison compacte qui a beaucoup de cachet. Tout l’amour que j’y ai mis leur a plu, explique-t-il. Il y a plein de belles touches. L’escalier est spectaculaire, avec la lumière qui passe à travers. »
C’est une passion pour moi. C’est inconcevable que je fasse un projet simple et standard, cubique en gypse. J’aime travailler la matière puis la transformer pour faire des lieux de vie inspirants, confortables, où on se sent bien.
Étienne Vigneron
Il estime avoir donné 100 ans supplémentaires à la maison centenaire, qui a conservé son âme. « Ce sont les prochaines générations qui vont en profiter et qui vont bénéficier d’une maison saine et confortable, avec très peu de frais d’entretien », fait-il remarquer. Ce qui lui procure une grande fierté.
En bref
Durée des travaux : de 2020 à 2023
Gros des travaux : de mars 2020 à août 2021
Fini le sous-sol en 2022
Aménagé le terrain en 2023
Prix initial de la maison : 78 500 $
Total emprunt et argent investi personnellement : 320 000 $
Valeur du temps consacré : inestimable
Prix de vente : 480 000 $
Objectif : laisser un legs aux générations futures
Défi : ne pas agrandir l’espace