Pourquoi en parler ?
La légende du renard à neuf queues a voyagé de la Chine au Japon puis à la Corée. Par l’intermédiaire des mangas (Naruto en tête !), elle est également connue ici. Et c’est justement de ce bouillon de cultures qu’est né 9 Tail Fox. Celui-ci se définit comme « bistro coréen ». Il ne faut pas y aller en espérant manger un énorme bibimbap ou un bulgogi. Ici, on a plutôt voulu marier ingrédients québécois, savoir-faire montréalais et touches coréennes. Les chefs ont beaucoup d’admiration pour le très coté restaurant Atoboy, qui utilise New York comme toile de fond pour pratiquer une cuisine coréenne novatrice. Chicago a aussi nombre de tables du genre, comme l’excellent Parachute. C’est d’abord sous forme d’évènements d’un soir dans des restaurants du Sud-Ouest, comme Stem Bar, Satay Brothers et Bar Otto, que le concept a été testé. Puis à l’automne 2022, le joli local vitré, meublé de bois blond et verdi par les plantes, ouvrait ses portes à l’angle de la rue Notre-Dame et de l’avenue Greene.
Qui sont-ils ?
Jongwook Lee et WonGoo Joun habitent à Montréal depuis respectivement 10 ans et 15 ans. Le premier a fait l’école de cuisine en Corée, tandis que le second est autodidacte. Ils se sont connus au restaurant Big in Japan. Puis leurs chemins professionnels se sont séparés quand Jongwook Lee est allé travailler au Bouillon Bilk et au Cadet, tandis que WonGoo Joun a parfait ses connaissances dans les cuisines de Pastel, de Maison Boulud et de Park. Les amis s’étaient toujours dit qu’ils auraient un projet ensemble un de ces quatre. C’est le temps d’arrêt forcé des récentes années qui a permis aux deux hommes de rêver puis de mettre au monde leur renard à neuf queues.
Notre expérience
Un vendredi soir, à 20 h 30, la salle à manger est bien éclairée et aux deux tiers pleine d’une clientèle plutôt jeune. Le 9 Tail Fox est la définition même du resto informel. On y commande quelques plats, une ou deux bouteilles de soju pour se mettre dans l’ambiance, et on poursuit la soirée dans un des nombreux bars du coin, comme l’Atwater Cocktail Club ou le Baby, un peu plus loin.
À moins de commander tous les plats frits du menu (poulet, pleurotes, longe de porc), on ne sort pas de là dans un coma digestif. Il y a un équilibre dans les propositions et nous le reproduisons dans notre commande, alternant fraîcheur et richesse.
Les deux dodus dumplings aux cèpes et au parmesan, qui baignent dans une sauce soya au yuja (yuzu), sont des petites bombes d’umami. La saucisse maison, elle, goûte l’enfance universelle, avec sa sauce tomatée sucrée-salée (lire ketchup !) et sa purée de pommes de terre lisse. C’est une reconstitution d’un classique de la cuisine familiale coréenne, semble-t-il, que les deux chefs mangeaient petits.
En matière de réconfort, le riz frit au kimchi et bacon ne donne pas sa place. Et quelle sensualité lorsqu’on mélange l’œuf crémeux dans le riz chaud ! Plus « adulte », le crudo est ambitieux, avec trois « protéines » aquatiques assaisonnées différemment. Le pétoncle, l’omble chevalier et le bar cohabitent bien, avec leurs sauces qui finissent par fusionner élégamment dans l’assiette.
Il y a plusieurs autres propositions terre ou mer au menu, dont un tartare de bœuf, une pieuvre avec sauce romesco au gochujang et des fettucini maison aux moules façon « kalguksu ». Nous ne nous sommes pas rendus au dessert, mais il y en a et ceux-ci, comme l’opéra matcha, semblent bien appétissants, sur papier du moins.
On peut dire, finalement, que les chefs intègrent habilement et subtilement les ingrédients de leur cuisine natale à ceux qu’ils ont pris l’habitude de cuisiner ici. Le résultat est très, très montréalais, peut-être moins surprenant qu’on l’aurait aimé, mais néanmoins fort honnête.
Dans notre verre
Ici, on se démarque franchement. L’offre liquide a été développée par Simon Schmidt, maintenant au service du tout nouveau Yama. Elle est vaste et un peu confuse, mais originale. Il y a évidemment le soju, alcool distillé à base de riz ou d’autres céréales et rectifié à environ 17-20 % d’alcool. Si la SAQ vend la petite bouteille de 360-375 ml pour moins de 10 $, vous la paierez 25 $ avant taxes et pourboire au 9 Tail Fox. Le restaurant a une bonne sélection des marques Jinro et Chum Churum, que vous aimiez votre soju nature ou aromatisé à la fraise, à la mangue, au raisin, etc. Côté cocktails, on fait dans le kitsch avec des mélanges maison préparés d’avance aux couleurs éclatantes. Ils sont inspirés de classiques comme le cosmo, le margarita, le mojito, le mule. Ne reste qu’à choisir son format (verre ou pichet) et son spiritueux (gin, vodka, tequila…) qu’on ajoute après. Il y a aussi une panoplie de boissons gazeuses coréennes comme les Milkis, que l’on peut boire avec ou sans alcool. N’étant pas du tout la clientèle visée par ce festival des arômes ajoutés, je me suis tournée vers la carte des vins, loin d’être ennuyeuse. Mais pour boire hors références SAQ et « excitant », il faut compter au moins 80 $. Ce sont des prix un peu élevés pour la faune du coin, peut-être. Qui plus est, il n’y a pas de sommelier ou de sommelière sur place. Cela a donné lieu à un petit cafouillage lorsque nous avons dû retourner une bouteille défectueuse. Sinon, le service était souriant et attentionné.
Prix
Les plats les plus chers du menu sont la pieuvre (28 $) et le steak (29 $). Sinon, les prix se situent plutôt entre 17 et 20 $ pour une assiette de taille moyenne. Les plus petits formats, dont les brochettes (ggochi), sont à 5-11 $.
Information
Le 9 Tail Fox est ouvert du mardi au samedi à compter de 17 h 30.
3401, rue Notre-Dame Ouest, Montréal
Consultez le site du 9 Tail Fox