À travers les bons coups et, parfois, les moins bons, nos critiques de restaurants vous racontent leur expérience, présentent l’équipe en salle et en cuisine, tout en expliquant ce qui a motivé le choix du restaurant. Cette semaine : le Québec rencontre l’Afrique au Virunga.

Pourquoi en parler ?

Il y a eu quelques rendez-vous manqués au Virunga, au fil des ans, mais après avoir regardé la série Pendant ce temps en cuisine sur Prime (émission à laquelle, en toute transparence, j’ai participé), j’étais bien déterminée à enfin rencontrer Maria-José et Zoya de Frias en chair et en os. Ça s’est enfin produit un vendredi soir de la mi-mars. Ce joli restaurant de la rue Rachel propose une cuisine, des cocktails et un service bien uniques. Un repas au Virunga, c’est un voyage de découverte pour les papilles, une invitation à l’élargissement de ses horizons culinaires.

Qui sont-elles ?

PHOTO DOMINICK GRAVEL, LA PRESSE

Zoya de Frias et sa mère Maria-José

Maria-José et Zoya de Frias forment un inspirant tandem mère-fille. Si la maman a passé la première moitié de sa vie en République démocratique du Congo (RDC), la fille, elle, a grandi en Belgique, les conflits politiques ayant déplacé la famille. Maria-José, qui a aussi des origines portugaises, a pratiqué plusieurs professions, de cheffe d’entreprise en Afrique à styliste en Europe. C’est à Montréal qu’elle a suivi son cours de cuisine, au collège LaSalle, tandis que Zoya, arrivée au Québec à 16 ans, faisait des études en informatique et statistiques. En 2016, l’envie de faire découvrir la culture culinaire de leur terre d’origine aux Montréalais a commencé à titiller les deux femmes à la fibre entrepreneuriale. C’est ainsi que naissait Le Virunga, dont le nom est emprunté au grand parc national situé dans l’est de la RDC, aux frontières de l’Ouganda et du Rwanda. Connaissant les recoupements entre les cuisines des nombreux pays du continent, Maria-José et Zoya ont décidé de proposer un menu panafricain, plutôt que de se limiter aux spécialités congolaises. Et pourquoi pas ! On parle bien de cuisine méditerranéenne, après tout.

Notre expérience

« Pourquoi nous concentrer sur ce qui nous divise quand on peut plutôt célébrer ce qui nous unit », déclare Zoya de Frias, lorsque nous discutons au terme de la séance photo qui se fait quelques jours après mon repas au restaurant.

PHOTO DOMINICK GRAVEL, LA PRESSE

Les murs sont garnis d’art africain.

C’est en effet cette volonté de créer des ponts plutôt que de les brûler qui se ressent dès qu’on s’installe au Virunga. Cela s’exprime d’abord par la chaleur de l’accueil et par l’enthousiasme avec lequel Zoya nous informe des riches origines des diverses préparations que sa mère conçoit en cuisine.

On ne pratique pas une cuisine traditionnelle ici, mais l’authenticité des goûts y est, foi de clients d’origines africaines diverses.

Les alcools utilisés dans la majorité des cocktails sont soit africains (comme le Cruxland Gin et le Caperitif), soit québécois. Tous les vins viennent d’Afrique du Sud. Les plats sont pour leur part composés d’ingrédients de provenance locale, comme les champignons des 400 pieds, la truite des Bobines, le mouton des Trouvailles gourmandes du Canton, la Pintade sabinoise, etc., mariés à des incontournables du continent africain, comme le manioc et l’attiéké ivoirien, la citronnelle et l’anis vert du Cameroun, la noix de palme (pour faire la sauce graine d’Afrique de l’Ouest). Le poivre blanc de Penja est omniprésent.

La formule du repas est classique : entrées, plats, desserts. Maria-José et Zoya aimeraient un jour proposer un menu dégustation avec une succession de petits services, mais l’étroitesse de la cuisine et, surtout, la difficulté à trouver du personnel qualifié rendent la chose difficile.

Au premier service, on est un peu surpris par la petite taille des assiettes. Mon « couscous de manioc » (attiéké) servi avec courgettes, noix de cajou et curry bien aromatique est terminé en deux bouchées. J’en aurais bien pris le double ! L’entrée de champignons, œuf coulant et crème pili-pili (petit piment) est plus généreuse, mais le chapati tanzanien annoncé au menu est en fait un tout petit carré de pain plat d’environ 3 cm. Voilà qui n’épongera pas beaucoup de jaune ni de sauce !

Les plats principaux arrivent et là, c’est la fête ! La pintade, posée sur une poêlée de maïs et de fèves, baigne dans une délicieuse sauce à la noix de palme. Il y a aussi du mieliepap (« pap » pour les intimes !), que je décrirais comme un proche cousin de la polenta. C’est l’exotisme dans le réconfort.

On a peu l’habitude de manger de la chèvre et du mouton au Québec. C’est l’occasion d’essayer, au Virunga, et de découvrir que ce sont des viandes tout aussi délicieuses que l’agneau. Comme la pintade, l’épaule de mouton est un plat très chaleureux. La viande a été braisée à la malgache, c’est-à-dire dans une sauce pleine d’épices chaudes, comme la cannelle, le clou de girofle, le gingembre, etc. Son support est un mukimo, écrasé de pommes de terre avec épinards, petits pois verts et maïs d’origine kenyane.

Il ne faut pas partir avant le dessert. Le coup de cœur pour le Nzeto (tous les plats ont des noms qui évoquent leur influence principale, soit l’Angola dans ce cas-ci) est grand ! Une riche crème à la noix de coco surmontée d’une crème fouettée à l’érable jaillit d’une soupe de framboises bien concentrée et légèrement acidulée. On ne laisse pas non plus une miette du chou farci de crème pâtissière au gingembre, avec mangue caramélisée. Finale totalement réussie !

Dans notre verre

  • Le Cap floral est un délicat sour à base de gin, de citron et de citronnelle du Cameroun.

    PHOTO DOMINICK GRAVEL, LA PRESSE

    Le Cap floral est un délicat sour à base de gin, de citron et de citronnelle du Cameroun.

  • Tous les vins de la carte du Virunga viennent d’Afrique du Sud.

    CAPPHOTO DOMINICK GRAVEL, LA PRESSE

    Tous les vins de la carte du Virunga viennent d’Afrique du Sud.

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La « mixologie » de Zoya n’a rien à envier à celle des meilleurs bars à cocktails de Montréal. La copropriétaire sait composer une carte inspirée et équilibrée avec toujours ce petit clin d’œil aux parfums du vaste continent africain. Sa carte des vins d’Afrique du Sud, elle, est d’une belle audace. Malgré une offre plutôt limitée sur le marché québécois de « l’importation privée » africaine, elle réussit à dénicher du plus classique, du bio et même du nature, comme les vins vivants de Johan Herman Meyer, dans le Swartland. À suivre : les cuvées de MC Stander, d’Equinox Wines.

PHOTO DOMINICK GRAVEL, LA PRESSE

Le Virunga est situé rue Rachel Est.

Prix

Les prix sont justes pour une cuisine travaillée faite à base d’ingrédients de grande qualité. Vous paierez entre 14 et 16 $ pour une entrée, entre 32 et 39 $ pour un plat principal et 9 $ pour un dessert. Les cocktails valent largement les 13-15 $ demandés.

Ouvert du mercredi au samedi, en soirée.

851, rue Rachel Est, Montréal

Consultez le site du Virunga