(New York) Remplacer le lait de vache par des boissons végétales comme celles à l’avoine ou au soja dans son latté n’est plus une fantaisie réservée aux « granos ». Pour réduire leur empreinte environnementale, de plus en plus de cafés privilégient ce qu’on appelle communément le lait d’avoine sur leur menu.

À l’angle de la 49Rue et de la très chic 5Avenue à Manhattan, les clients affluent dans la succursale de la chaîne Blue Bottle. Sur les tableaux suspendus derrière le comptoir, le menu ressemble à celui de n’importe quel autre café, à une exception près : il est inscrit que toutes les boissons sont préparées avec du lait d’avoine.

La barista Angela Cox explique que Blue Bottle a fait le changement il y a deux ans. « On a fait un sondage auprès des clients, dit-elle, de plus en plus demandaient des boissons végétales. Maintenant, c’est la norme. »

PHOTO KARYNE DUPLESSIS PICHÉ, COLLABORATION SPÉCIALE

Au Blue Bottle, toutes les boissons sont préparées avec du lait d’avoine.

Il est encore possible de commander un latté préparé avec du lait de vache. Il faut néanmoins débourser un dollar américain de plus la tasse.

Un peu plus au sud dans Midtown, le café Stumptown utilise aussi la boisson à l’avoine dans la préparation de tous ses cafés depuis un an. La chaîne ne facture toutefois pas de frais pour troquer la boisson végétale contre du lait de vache.

Cette façon de faire a inspiré Samuel Perreault. Le copropriétaire des cafés Paquebot au Québec a assisté au congrès de l’Association des cafés de spécialité (SCA) qui s’est tenu en mai dernier à Portland, en Oregon. Les chaînes américaines Blue Bottle et Stumptown ont alors expliqué pourquoi elles ont éliminé peu à peu le lait de vache de leur offre. Leurs arguments ont convaincu M. Perreault.

PHOTO MARCO CAMPANOZZI, LA PRESSE

Simon-Louis Brosseau-Fournier et Samuel Perreault, copropriétaires des cafés Paquebot

Le lait est la première pollution dans le café. Comme le lait de vache a une plus grande empreinte carbone que le lait d’avoine, le changement était naturel.

Samuel Perreault, copropriétaire des cafés Paquebot

Les cafés Paquebot ont d’abord cessé de facturer un supplément pour les cafés et les thés préparés avec de la boisson à base de plante. Un latté coûte le même prix, peu importe le lait choisi. Puis, le 1er février dernier, l’entreprise a fait le grand saut : tous ses cafés sont désormais préparés avec de la boisson à l’avoine sauf si le client exige du lait de vache.

Selon les premières données compilées par l’entreprise, l’utilisation du lait de vache a diminué de 12 % en seulement un mois dans ses succursales.

Meilleur au goût, mais plus cher

  • Chez Paquebot, tous les cafés sont désormais préparés avec de la boisson à l’avoine, sauf si le client exige du lait de vache.

    PHOTO MARTIN TREMBLAY, LA PRESSE

    Chez Paquebot, tous les cafés sont désormais préparés avec de la boisson à l’avoine, sauf si le client exige du lait de vache.

  • Les cafés Paquebot ont cessé de facturer un supplément pour les cafés et les thés préparés avec de la boisson à base de plante.

    PHOTO MARTIN TREMBLAY, LA PRESSE

    Les cafés Paquebot ont cessé de facturer un supplément pour les cafés et les thés préparés avec de la boisson à base de plante.

  • Afin de réduire leurs coûts et le gaspillage, les cafés Paquebot demandent maintenant aux employés de peser le liquide, comme c’est déjà le cas pour les grains.

    PHOTO MARTIN TREMBLAY, LA PRESSE

    Afin de réduire leurs coûts et le gaspillage, les cafés Paquebot demandent maintenant aux employés de peser le liquide, comme c’est déjà le cas pour les grains.

1/3
  •  
  •  
  •  

Les cafés Dispatch, à Montréal et à Toronto, ont simplifié leur offre en 2017. Ils ont gardé uniquement deux options de laits : de vache et d’avoine.

« Le lait d’avoine est plus écologique, mais surtout, c’est celui que les clients préfèrent », explique la propriétaire, Chrissy Durcak.

Dispatch s’approvisionne chez Dam, une entreprise montréalaise qui commercialise ses boissons végétales en concentré. Une fois le produit livré, le barista doit ajouter de l’eau et mélanger. Vendus dans des contenants réutilisables, les produits de Dam sont zéro déchet, mais ils sont aussi plus chers, constate Mme Durcak.

PHOTO MARTIN TREMBLAY, ARCHIVES LA PRESSE

Dispatch utilise désormais les produits Dam.

« Ça fait partie de notre philosophie d’acheter un produit local, de haute qualité, explique-t-elle. Mais on doit garder nos marges constantes. C’est pourquoi on demande environ 0,80 $ de plus pour les cafés préparés avec du lait d’avoine. »

La femme d’affaires cherche néanmoins un moyen d’enlever le supplément, car de l’autre côté de la frontière, cette pratique soulève la controverse.

En effet, une plainte a été déposée en janvier contre la chaîne Dunkin’ Donuts, en Californie, en raison du supplément de 2 $ imposé par l’entreprise pour les cafés et thés préparés avec de la boisson végétale. Les plaignants jugent cette pratique discriminatoire contre les personnes intolérantes au lactose. Selon un article publié par le journal The Guardian, plus du tiers des Américains sont intolérants au lactose. Cette maladie génétique toucherait principalement les personnes de couleur, précise l’article.

Une poursuite similaire a aussi été intentée contre le géant Starbucks en Californie en 2022. La chaîne conteste la requête. La cause est toujours devant les tribunaux.

Baisser le coût

PHOTO KARINE DUPLESSIS PICHÉ, COLLABORATION SPÉCIALE

Le café St Kilda produit désormais sa propre boisson à l’avoine grâce à cette machine.

À New York, près de Times Square, le café St Kilda a trouvé un moyen novateur de réduire le coût de son latté : le petit café produit depuis la fin de février sa propre boisson à l’avoine.

« On ne voulait plus facturer de frais, explique Hunter Julo chez St Kilda. On a acheté un appareil pour préparer notre propre boisson à l’avoine. »

Chez Paquebot, Samuel Perreault a lui aussi trouvé une méthode pour réduire sa facture de lait et de boissons végétales. Les employés doivent maintenant peser le liquide, comme c’est déjà le cas pour les grains.

« Quand tu fais un latté, tu en as toujours trop, observe-t-il. On finissait par jeter 10 000 $ de lait par année à la poubelle. »

Ainsi, un cortado nécessite 75 g de lait, un Flat White et un cappuccino, 130 g, tandis qu’un latté en contient 200 g.

À coût équivalent, le choix reste désormais une question de goût et de valeur.