L’auteur réplique à la chronique « Fichez la paix aux mourants (et aimez-les) », de Patrick Lagacé1, publiée le 16 mai dernier.

C’est avec grand intérêt que j’ai abordé la lecture de la chronique de Patrick Lagacé débutant par la présentation de la pièce documentaire sur l’aide médicale à mourir (AMM) que préparent Manuelle Légaré et la compagnie de théâtre Porte Parole. C’est bien normal, puisque le réseau citoyen que je coordonne, Vivre dans la dignité, espère libérer la parole sur les enjeux de fin de vie.

Alors qu’il est beaucoup question de l’AMM depuis l’adoption de la Loi concernant les soins de fin de vie, nous avons justement décidé de lancer cette semaine, à la radio et sur l’internet, une campagne constructive sur le thème de l’aide à vivre.

Cette campagne se veut une réponse à une demande légitime que nous recevons régulièrement : lorsqu’un proche songe à l’AMM, est-il encore possible de lui suggérer plutôt l’aide à vivre avec les soins et services dont il a besoin, et qui sont souvent des soins palliatifs ?

Encourager un proche à ne pas choisir l’aide médicale à mourir, c’est oser lui présenter d’autres options possibles.

La page Aide à vivre2 a été créée pour offrir des suggestions concrètes pour s’informer, dialoguer et accompagner, toujours dans le respect total de la décision finale du proche.

Retour à la chronique de jeudi. Quelle ne fut pas notre surprise de découvrir que la présentation du projet de pièce documentaire menait à une dénonciation de notre campagne. Sans nous nommer, on la présentait à tort comme l’œuvre d’un groupe religieux visant à dissuader des mourants qui auraient opté pour l’AMM.

Nous tenons à clarifier deux points importants :

1) Nous ne sommes pas un groupe religieux, mais un réseau citoyen apolitique et areligieux. Depuis 2010, près de 20 000 personnes (essentiellement du Québec) ont signé notre manifeste. Nous nous devons de bien les représenter. C’est le défi de tout réseau citoyen comptant des alliés à gauche et à droite de l’échiquier politique, croyants, agnostiques ou athées.

En visitant notre site internet, on peut trouver par association que des membres de notre équipe sont catholiques, mais honnêtement, je ne connais pas la foi ou l’absence de foi de tous. Ce n’est pas un enjeu pour un réseau citoyen comme le nôtre.

Nous participons à toutes sortes d’évènements pour échanger sur les questions de fin de vie. Comme une majorité d’experts en soins palliatifs sur la planète, nous avons la conviction qu’il y a toujours une meilleure solution qu’une mort provoquée par aide médicale à mourir. Cela étant dit, nous travaillons de concert avec une foule d’alliés qui ne sont pas opposés à l’AMM, mais qui remettent en question des élargissements passés ou futurs de la loi (retrait du critère de fin de vie, déficiences physiques, trouble mental, demandes anticipées, etc.).

Nous participons aussi bien à un évènement scientifique rassemblant des ressources œuvrant en AMM au CHUM qu’à un colloque sur la culture palliative (comme ce vendredi au Congrès de l’Acfas) ou, du 21 au 23 mai, à un symposium interconfessionnel sur les soins palliatifs. Comme réseau citoyen, nous souhaitons être en relation avec tous les acteurs et actrices de la société civile.

2) La peur de devenir un fardeau a été citée par 46 % des personnes ayant reçu l’AMM au Québec en 2022-2023. Notre campagne souhaite rappeler à nos proches qu’ils ne seront jamais un fardeau pour nous en nous assurant qu’ils voient concrètement comment nous les accompagnerons. Elle rappelle le trésor des soins palliatifs, dont l’accessibilité limitée relève encore malheureusement du code postal au Québec.

Je vous invite à lire particulièrement les sections « Accompagner » et « Vous connaissez quelqu’un dont la demande d’aide médicale à mourir a été acceptée et qui connaît maintenant la date de sa mort provoquée ? » de notre page Aide à vivre pour bien saisir que notre démarche se veut respectueuse de la conscience individuelle de chaque personne. En voici un court extrait : Si votre parent ou votre ami choisit tout de même d’aller de l’avant avec une demande d’AMM, vous serez appelé à poursuivre votre accompagnement, en respectant à la fois son choix et vos limites.

Une réflexion de Manuelle Légaré nous a particulièrement interpellés dans la chronique de Patrick Lagacé : « Peut-on devenir les champions du monde du mieux mourir ? Peut-on apprendre à en parler ? » Nos solutions ne sont peut-être pas les mêmes, mais nous partageons cet objectif. Osons en jaser à l’occasion de la préparation de sa pièce sur l’AMM, comme à l’occasion de notre campagne sur l’aide à vivre.

1. Lisez la chronique « Fichez la paix aux mourants (et aimez-les) » 2. Consultez le site web Aide à vivre Qu’en pensez-vous ? Participez au dialogue