L’inculpation récente de Donald Trump par le département de la Justice des États-Unis en raison de la rétention de documents hautement confidentiels en infraction avec la loi américaine sur l’espionnage domine toujours l’actualité aux États-Unis.

L’ancien président fait l’objet de 37 chefs d’accusation, une première devant la justice fédérale pour un président ! La réaction de Trump fut prévisible, il s’est décrit comme la victime de la « politisation » du système de justice par l’administration Biden.

Sans surprise, Trump répète que le président Biden agit sur une base de partisanerie politique et que le FBI et la justice américaine se sont engagés dans une chasse aux sorcières. Il souligne que son ancienne rivale démocrate, Hilary Clinton, et le fils du président Joe Biden, Hunter Biden, font l’objet d’un traitement de faveur face à la justice.

Or, Trump utilise la couverture médiatique entourant son inculpation pour financer davantage sa campagne à l’investiture du Parti républicain en vue de l’élection présidentielle de 2024.

Il faut noter que plusieurs leaders du Parti républicain se sont portés à la défense de Trump. Toutefois, contrairement aux réactions lors de son inculpation en mars dernier au sujet du scandale impliquant l’actrice de films pour adultes Stormy Daniels, Donald Trump fait désormais face à des critiques républicaines. « L’homme de téflon » serait-il en voie de subir une certaine contestation à l’intérieur de son parti ? Tour d’horizon.

Dissensions émergentes chez les républicains

D’abord, le président de la Chambre des représentants, Kevin McCarthy, ainsi que ses collègues républicains de la Chambre se sont ralliés derrière l’ancien président. Avec l’appui relativement fragile qu’il a obtenu lors de son élection comme président de la Chambre, et considérant les récentes divisions internes entourant l’entente sur le plafonnement de la dette, la prise de position de McCarthy n’est pas surprenante.

Ensuite, l’unité chez les républicains du Sénat est moins évidente.

Le leader Mitch McConnell est resté silencieux, et le whip en chef du parti, le sénateur John Thune, a fait valoir la nécessité d’un changement de cap concernant le leadership républicain pour la présidentielle de 2024.

Puis, certains anciens ténors de l’administration Trump et ex-proches de l’ancien président, incluant son ancien chef de cabinet, John Kelly, son ancien procureur général, Bill Barr, son ancien conseiller à la sécurité nationale, John Bolton, son ancien secrétaire à la défense, Mark Esper, ainsi que son ancien secrétaire d’État, Mike Pompeo, ont tous souligné le sérieux et la gravité des chefs d’accusation déposés contre Trump.

De plus, quelques-uns de ses concurrents à l’investiture républicaine en cours font la démonstration d’un malaise quant à la suite des choses. Certains ont mis en cause la notion de la politisation de la justice. C’est le cas du gouverneur de la Floride et plus proche rival de Trump, Ron DeSantis, qui s’est rallié à la défense de Trump. Par contre, plusieurs analystes interprètent cela comme un calcul stratégique visant à séduire les supporteurs de l’ancien président.

De son côté, l’ancien vice-président Mike Pence est plus nuancé. Tout en critiquant l’administration Biden pour l’inculpation de Trump, il laisse entendre que les chefs d’accusation sont sérieux.

PHOTO RICARDO ARDUENGO, AGENCE FRANCE-PRESSE

Manifestants devant un tribunal fédéral de Miami où a comparu Donald Trump, le 13 juin.

Enfin, deux anciens gouverneurs et anciens procureurs généraux qui sont également dans la course, Chris Christie et Asa Hutchinson, ont carrément pris position contre Trump.

Au fil des prochaines semaines, on peut prévoir que d’autres dissensions risquent d’émerger, notamment si d’autres accusations sont déposées contre Trump au sujet de la validation des résultats électoraux de 2020 et des évènements du 6 janvier 2021.

Où est Joe Biden ?

Compte tenu du contexte en vue de la prochaine élection, la Maison-Blanche a choisi d’opter pour la discrétion. Sous le couvert de l’anonymat, certains démocrates souhaiteraient toutefois que le président Biden intervienne et qu’il donne signe de l’importance de l’application de la règle de droit pour les anciens présidents, donnant le signal que Trump n’est pas au-dessus des lois.

Or, comme on a pu le constater récemment lors de la négociation de l’entente sur le plafonnement de la dette avec le président de la Chambre, Kevin McCarthy, Joe Biden est prudent et discipliné. Durant cet épisode, on a pu prendre conscience de toute sa patience, de son ouverture aux compromis et de son engagement envers la recherche de solutions bipartisanes.

Depuis l’inculpation de Trump, Biden se concentre sur la gouvernance et la prochaine campagne pour sa réélection en 2024. Un choix judicieux !

De toute évidence, Trump souhaite présenter sa campagne comme celle de la résistance envers l’administration Biden et sa conduite. C’est une approche risquée, car une campagne électorale implique plusieurs enjeux.

Donald Trump reste en ce moment le meneur dans les sondages chez les électeurs aux primaires républicaines à venir. Mais il ne semble pas faire de gains chez les électeurs indépendants, ce qui est essentiel pour remporter une élection présidentielle. Aussi, on sent qu’un inconfort commence à s’installer chez certains médias conservateurs. Voilà deux autres facteurs qui risquent d’entraîner davantage de critiques et de remise en question dans les prochains mois.

Au regard des perspectives actuelles, Trump court le risque de devenir encore plus vulnérable dans sa quête de l’obtention d’un deuxième mandat présidentiel. C’est à suivre dans les prochaines semaines et les prochains mois.

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