Le verdict est tombé. À la suite de la 15e réunion du Comité d’urgence du Règlement sanitaire international et sous la recommandation de ses membres, le directeur général de l’OMS, Tedros Adhanom Ghebreyesus, a levé le statut d’urgence de santé publique de portée internationale (USPPI) sur la COVID-19.

Ce moment était attendu avec appréhension par certains et avec un grand soulagement par d’autres qui auront enfin le sentiment d’avoir la bénédiction de passer à autre chose.

Pour rappel, la définition d’une USPPI implique que la situation : « est grave, soudaine, inhabituelle ou inattendue ; [qu’elle] a des implications pour la santé publique dépassant les frontières nationales de l’État affecté et [qu’elle] pourrait nécessiter une action internationale immédiate1 ».

L’exemple de l’Ebola

Une déclaration d’USPPI ne connaît pas de nuances. Elle est une urgence de portée internationale ou elle n’est pas. Il n’y a pas d’entre-deux. L’exemple d’Ebola nous permet de bien comprendre. Le 8 août 2014, après plusieurs mois de lobbying, l’OMS a déclaré l’Ebola urgence de santé publique de portée internationale et à sa révocation le 29 mars 2016, il y avait toujours de nouvelles chaînes de transmission, mais de fréquence décroissante.

Le comité considérait « que la transmission du virus Ebola en Afrique de l’Ouest ne constitue plus un événement extraordinaire2 ». Sur le terrain, je me rappelle que les équipes de Médecins sans frontières (MSF) traitaient encore quelques personnes infectées et faisaient surtout des suivis de contacts avec grande diligence. Tous étaient obsédés d’en arriver au patient zéro, d’en finir avec Ebola.

La levée d’une USPPI signifie que la phase d’urgence aiguë est terminée, mais pas la COVID-19. Nous rentrons dans une séquence de post-urgence immédiate où il y aura malheureusement encore des impacts tragiques de la COVID-19 par ses infections, ses hospitalisations, ses décès, ses symptômes résiduels de long terme, mais probablement en moindre nombre et osons l’espérer, de façon décroissante sur la durée.

Par ailleurs, dans le camp des appréhensions, la crainte est que nous baissions les bras complètement sur les efforts déployés pour la maîtrise de la COVID-19 et de ses répercussions. Le virus demeure en circulation, il continue d’évoluer et peut provoquer d’autres vagues.

C’est pour cette raison qu’il faut continuer de le suivre de près et d’être prêt à s’adapter. Encore une fois, ce n’est pas fini. Dans le camp des soulagés, je soutiens le passage à une autre phase COVID-19, mais mon souhait est de résister à la tentation de passer à l’amnésie collective totale.

Des leçons à retenir

Je nous exhorte à faire le point, un état des lieux sur notre réponse à la pandémie pour déterminer les meilleures pratiques et celles à mettre de côté. Car aucun de nous ne veut remettre sa vie professionnelle ou personnelle en pause pour de longs mois d’affilée, essuyer collectivement une contraction économique ou de ne pas pouvoir accompagner ses proches en fin de vie. Il faut finir « la job » en apprenant.

Nous ne devons pas commettre la double faute de ne pas avoir été prêts et de n’avoir rien retenu.

À l’échelle mondiale, nous avons devant nous des occasions clés dans les prochains mois avec la révision du Règlement sanitaire international (mai 2024), la négociation d’un Accord mondial sur la prévention, la préparation et la riposte face aux pandémies souvent référées au traité pandémique (printemps 2024), la déclaration politique sur la prévention, préparation et réponse aux pandémies à l’assemblée annuelle des Nations unies (septembre 2023). Ces différents mécanismes internationaux doivent reconnaître, haut et fort, dans la prévention, la préparation, et la réponse aux pandémies trois principes de base, soit :

  • la primauté des droits humains ;
  • la nécessité de l’équité dans l’accès aux contre-mesures (vaccins, traitements, tests) ;
  • l’inclusivité dans la gouvernance mondiale.

Le Canada se doit d’être le porte-voix de ces principes. C’est à ce prix seulement qu’on aura une chance de faire mieux collectivement la prochaine fois.

1., 2. Consultez le site web de l’OMS sur le Règlement sanitaire international et les Comités d’urgence Qu'en pensez-vous? Exprimez votre opinion