Les lois sur la protection des consommateurs au Québec ne suffisent pas pour protéger les enfants contre la publicité de malbouffe en ligne.

« Dis-moi ton costume d’Halloween. » Ce gazouillis a été publié le jour de l’Halloween par l’une des plus grandes chaînes de restauration rapide au Canada à ses plus de 168 000  abonnés sur Twitter. Compte tenu du style, de l’orthographe et de la demande, à quelle tranche d’âge pensez-vous qu’il s’adresse ? Il n’y a qu’une seule réponse, bien sûr : nos jeunes.

Depuis 1980, le Québec possède l’une des meilleures lois sur la protection des consommateurs, qui protège les enfants contre la publicité, du moins en théorie. Et pourtant, en pratique, il existe de grandes lacunes quand il s’agit de publicité en ligne de boissons et d’aliments mauvais pour la santé ciblant les enfants.

Notre nouvelle étude1 des médias sociaux canadiens réalisée en 2020 – financée par Cœur + AVC – présente des statistiques alarmantes. Et certaines voies à suivre évidentes pour le Québec et les décideurs fédéraux.

Nous notons dans notre étude que les 40 principales marques d’aliments et de boissons dans les catégories ciblant souvent les enfants et les jeunes au Canada ont gazouillé plus de 30 000 fois (soit plus de 80 fois par jour). La plupart des messages provenaient des grandes chaînes de restauration rapide.

Nous avons également constaté qu’en un an seulement, les 40 marques principales étaient mentionnées dans le contenu généré par les utilisateurs 16,9 millions de fois au Canada sur Twitter, Reddit, Tumblr et YouTube – les gazouillis à eux seuls ont été vus potentiellement environ 491 milliards de fois.

Si vous pensez que les enfants ne font pas partie de ce public des médias sociaux, détrompez-vous : 44 % des enfants canadiens ont déclaré utiliser les médias sociaux de deux à quatre heures par jour dans un rapport de 2018, et 20 %, cinq heures ou plus par jour.

La conclusion inéluctable est que nos enfants sont bombardés chaque jour d’incitations à consommer des boissons et des aliments mauvais pour la santé.

De nombreux enfants succombent à la tentation, ce qui entraîne une mauvaise alimentation, des problèmes de santé, maintenant et plus tard, et une espérance de vie plus courte. L’omniprésence de la publicité d’aliments mauvais pour la santé dans les médias sociaux cause du tort à nos enfants et accroît les pressions exercées sur notre système de santé.

La Loi sur la protection du consommateur du Québec n’est pas assez rigoureuse pour protéger les enfants contre la publicité de malbouffe en ligne. Les publicités ne sont pas systématiquement surveillées par le gouvernement, et bien que la loi s’applique à la publicité en ligne ciblant les enfants, les enfants au Québec peuvent encore voir la publicité d’aliments malsains ne comportant pas de caractéristiques attrayantes pour les enfants ni de produit réel (publicité de marque).

Le Far West que représentent les médias sociaux pour la publicité de boissons et d’aliments mauvais pour la santé pourrait être maîtrisé dans le cadre de la nouvelle réglementation prévue par le gouvernement fédéral pour limiter l’exposition des enfants de moins de 13 ans à la publicité de tels produits. Cette réglementation pourrait s’appliquer parallèlement à celle du Québec pour aider à combler les lacunes et mieux protéger les enfants.

L’adoption de ces restrictions par le fédéral s’impose depuis longtemps, mais si la réglementation ne comprend pas les médias sociaux, elle perdra considérablement en efficacité. L’industrie pourrait exploiter cette échappatoire, le cas échéant, et l’assaut de la publicité dans les médias sociaux pourrait s’accroître dans les faits.

Les jeunes sont un public captif dans les médias sociaux. L’industrie des aliments et des boissons le sait, et consacre déjà une partie importante de ses dépenses à la publicité en ligne.

La nouvelle réglementation fédérale qui limite la publicité d’aliments mauvais pour la santé réduirait encore davantage l’exposition des enfants à ce type de publicité au Québec et aiderait les parents à favoriser la consommation d’aliments sains chez leurs enfants. Pour y parvenir, il est essentiel que cette réglementation soit exhaustive et vise tous les médias et milieux où des enfants sont présents, sinon le bombardement publicitaire se poursuivra.

Le gouvernement fédéral a annoncé sa stratégie en matière de saine alimentation2 comme l’un de ses principaux engagements peu de temps après être arrivé au pouvoir en 2015, mais nous attendons encore l’adoption de ces restrictions cruciales de la publicité d’aliments mauvais pour la santé.

Il est urgent d’adopter ces restrictions, qui doivent inclure les médias sociaux.

1. Consultez l’étude de Cœur + AVC 2. Consultez la stratégie de Santé Canada en matière de saine alimentation Qu'en pensez-vous? Exprimez votre opinion