Le résultat électoral laisse peu de doute sur le fait qu’il n’y aura pas de commission d’enquête sur la gestion de la pandémie. Soit. Mais au-delà des rapports portant spécifiquement sur la réponse à la COVID-19, n’y a-t-il pas des leçons scientifiques et sociales à retenir avant d’amorcer un autre cycle ?

Un enseignement me semble incontournable. On ne peut laisser la nature suivre son cours en présumant qu’il y aura normalisation. En fait, c’est un épisode de plus dans l’histoire de la médecine à cet égard. La société, avec tous ses travers et ses incohérences, est le meilleur rempart contre l’oubli et la déperdition des plus faibles.

En matière d’intégrité physique, la reconnaissance des maladies et notre effort à les éradiquer sont l’élément qui ressort le plus de notre engagement à former une société. Ainsi, un réseau de la santé performant et sécurisant doit prévaloir, s’imposer, comme valeur civique principale. J’oserais en rajouter : alors que les économistes décrient depuis 40 ans la part des dépenses publiques consenties à la santé, il a été fort bien démontré que ces sommes sont insuffisantes lorsque survient une crise.

Sans l’épine dorsale robuste du réseau de la santé, le reste de l’activité sociale, économique, culturelle est irrémédiablement compromis. Qui plus est, on doit aussi déduire que le financement historiquement consenti est trop restreint pour prédire le prochain problème de santé publique majeur, s’y préparer et en prévenir les impacts.

D’une crise à l’autre

Mais zut ! Ce prochain problème est déjà là ! Même si on n’en a que peu parlé en campagne électorale. Pas une autre vague de COVID mutant, mais une déferlante de conditions de santé laissées pour compte pendant la pandémie et qui mérite aujourd’hui le vocable d’épidémie, venant embourber urgences et divers lieux de consultation.

Le pire, c’est que la crise actuelle, en lien avec les cas de cancer, de santé mentale et de perte d’autonomie ne trouvera pas remède dans un vaccin aux vertus quasi miraculeuses et spontanées.

Pour contrer ces problèmes, il aurait fallu – et il faudra – un système de santé « en santé » et profitant d’une marge de manœuvre appréciable pour les juguler en temps opportuns.

Parce que quatre constats s’imposent :

  • La population augmente, en lien avec toutes les projections démographiques, et en conséquence, les infrastructures de santé doivent aussi profiter d’une majoration qui n’a cependant pas eu lieu depuis les fermetures d’hôpitaux des années 80 et 90, du moins nettement pas en proportion de la progression populationnelle ;
  • La population vieillit, ce qui était aussi prévisible démographiquement, demandant une adaptation qui ne s’est pas opérée pour pourvoir la quantité de soins et les plateaux techniques adaptés pour y parvenir ;
  • La population change, plus multiracée et multiethnique, sédentaire, exposée à des facteurs environnementaux nocifs. Les dogmes de soins doivent se mouler à ces nouveaux impératifs, offrir plus, offrir mieux, à chacun, en temps opportun ;
  • L’évolution technologique donne accès à des avancées diagnostiques et thérapeutiques qui doivent être intégrées pour favoriser la stabilisation, voire l’amélioration de l’espérance de vie et la qualité qui y est rattachée.

Il est rare que des objectifs généraux, fondateurs, absolus, soient déclamés par nos dirigeants. On parle d’accès aux données, de soins à domiciles, d’organigrammes. Il est bien de les mentionner et de les implanter, mais ce ne sont là que des outils dont doit disposer la population québécoise pour viser et s’obliger à, par exemple, la réduction de l’incidence et de la mortalité par cancer, à l’augmentation de l’autonomie fonctionnelle de la population plus âgée, au contrôle des variations pathologiques en lien avec l’état psychologique et psychique dans chaque strate de la société, et à la sécurisation face à un prochain risque pandémique.

« Ne permettez jamais à quelqu’un d’être votre priorité tout en vous permettant d’être leur option. » Mark Twain exprime bien ici que des enjeux sociaux, tels que la santé en particulier, transcendent les programmes politiques après plus de 60 ans d’instauration d’un système public.

Une priorité nécessite un financement conséquent et l’humilité politique de faire confiance à des professionnels et gestionnaires en mesure de proposer des objectifs et des plans en perpétuels ajustements pour les atteindre.

Et aussi de permettre la sécurité du reste des activités sociales et personnelles. Voilà en essence ce qui est espéré du ou des ministres qui voient aux destinées de la santé. Et ce tant en 2022 qu’en 2035.

Pour les patients de plus en plus vulnérables. Pour les professionnels de la santé engagés mais en perte de vocation.

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